L'industrie québécoise des cercueils ne repose plus en paix. Elle se prépare à l'arrivée massive de produits fabriqués en Chine. Même dans le deuil, les Québécois auront à choisir entre une bière fabriquée dans la Belle Province ou dans l'empire du Milieu.

L'industrie québécoise des cercueils ne repose plus en paix. Elle se prépare à l'arrivée massive de produits fabriqués en Chine. Même dans le deuil, les Québécois auront à choisir entre une bière fabriquée dans la Belle Province ou dans l'empire du Milieu.

"Il n'y a pas un jour qui passe sans qu'on entende parler des cercueils chinois", affirme Alain Dumont, président de Fournitures funéraires Victoriaville, le plus important fabricant de cercueils au Canada avec une production annuelle dépassant les 100000 unités.

Selon M. Dumont, les cercueils asiatiques sont vendus en Amérique du Nord depuis quelques années déjà. Leur présence sur les marchés canadiens et québécois était toutefois timide à ce jour.

"Mais là, dit-il, je crois que ça ressemble de plus en plus à ce qui s'est passé avec l'industrie du meuble. Les fabricants chinois sont très dynamiques. Toutes les semaines, on reçoit des échantillons et ils veulent à tout prix nous rencontrer pour qu'on distribue leurs produits", explique Alain Dumont, qui a visité la Chine à trois reprises depuis 18 mois.

M. Dumont s'inquiète évidemment de la situation. D'autant plus, dit-il, que la qualité des produits asiatiques, qu'ils soient en bois ou en acier, ne cesse de s'améliorer. Autre argument dérangeant: un cercueil chinois peut se vendre deux fois moins cher qu'un cercueil québécois.

Il est toutefois trop tôt, selon lui, pour dire si l'arrivée de produits chinois provoquera des pertes d'emplois ou la fermeture de certains fabricants d'ici. "Nous sommes en réflexion. Nous ne savons pas si produire là-bas est une solution pour nous. Pour le moment, nous allons miser sur un produit de qualité, mieux adapté aux demandes des clients et dont les délais de livraison sont très courts", explique Alain Dumont.

L'industrie québécoise des cercueils compte une quinzaine de fabricants et emploie plus de 1000 personnes. Il s'agit d'un secteur en décroissance selon la majorité des acteurs du secteur joints par La Presse Affaires. Étant donné que la crémation gagne en popularité, les cercueils seraient en effet de moins en moins utilisés dans les rites funéraires, nous dit-on. L'arrivée d'un nouvel acteur n'aide donc en rien la situation des industriels québécois.

Actuellement, toujours selon M. Dumont, le Québec compte cinq distributeurs de cercueils fabriqués en Chine. Cercueils André, de Durham-Sud, est du lot. Depuis huit mois, l'entreprise vend surtout des cercueils d'acier originaires du pays de Mao.

"C'est sûr que je vois ça comme une menace, mais si ce n'est pas moi qui en fait la distribution, ça va être un outsider qui va le faire à ma place et il va nous rentrer dedans", explique François St-Jean, président de Cercueils André.

M. St-Jean est d'avis que de très gros changements s'en viennent dans l'industrie. "Ça va bien, les produits chinois, mais j'importe encore des cercueils d'acier des États-Unis. Et je continue à fabriquer des cercueils en bois, mais je connais une décroissance. Je ne pense pas que ce soit une aberration d'importer des produits de là-bas. Peu importe dans quel secteur on est, on n'a plus le choix: le consommateur veut payer moins cher", dit-il.

La partie n'est pas pour autant gagnée par les concurrents asiatiques, soutient Alain Dumont, de Fournitures funéraires Victoriaville. "Les produits chinois ont deux éléments qui jouent contre eux en ce moment: ça leur prend un mois pour envoyer leurs conteneurs ici et ils n'ont pas encore accès à d'importants réseaux de distributeurs. Leur distribution demeure limitée. "

Il se fabriquerait annuellement près de deux millions de cercueils par année en Amérique du Nord, où le secteur funéraire en général représente un marché d'au moins 12 milliards de dollars.