Les guichets automatiques privés - ceux qui ne sont pas exploités par des institutions financières - peuvent être utilisés pour blanchir de l'argent avec une facilité alarmante, compliquant la tâche de l'agence fédérale chargée d'enquêter sur les transactions illicites.

Les guichets automatiques privés - ceux qui ne sont pas exploités par des institutions financières - peuvent être utilisés pour blanchir de l'argent avec une facilité alarmante, compliquant la tâche de l'agence fédérale chargée d'enquêter sur les transactions illicites.

Dans un rapport préliminaire préparé cette année, le Centre d'analyse des opérations et déclarations financières du Canada (CANAFE) explique par quel moyen on peut s'y prendre pour blanchir de l'argent: l'exploitant du guichet automatique privé le remplit de billets de provenance illicite.

Avec le temps, les consommateurs vident l'appareil, qu'on remplit ensuite d'argent «propre».

Les fruits du crime semblent ainsi être devenus des fonds légitimes, mentionne le rapport, obtenu par La Presse Canadienne en vertu de la Loi sur l'accès à l'information.

On trouve souvent ces guichets privés, qui ne sont pas affiliés à une banque, dans les dépanneurs, les aéroports et les bars.

CANAFE est une instance indépendante chargée notamment d'enquêter sur le blanchiment d'argent et, lorsque c'est approprié, de transmettre l'information recueillie à la police et au Service canadien du renseignement de sécurité (SCRS).

La loi lui impose cependant de maintenir un délicat équilibre entre le respect de la vie privée et la transmission aux autorités des informations dont celles-ci ont besoin pour faire enquête, et poursuivre les criminels.

Ces restrictions peuvent entraver son travail et la lutte au blanchiment d'argent, selon Martin Rudner, un professeur à la retraite de l'Université Carleton, directeur du Centre canadien d'études sur le renseignement et la sécurité.

«Imaginez la situation à la GRC et au SCRS, explique M. Rudner. Ils ont beaucoup d'autres choses à faire dans la vie. Soudainement, ils se font dire «en passant, voilà du travail pour vous, mais nous ne pouvons rien vous dire».»

Cet automne, un rapport déposé à l'enquête sur l'affaire Air India a fait ressortir le gouffre qui sépare les institutions financières et CANAFE, la GRC et le SCRS.

Ce rapport soulevait des craintes concernant le fait que les lois régissant ces organismes pouvaient les empêcher de fournir des informations détaillées aux institutions qui leur divulguent des renseignements sur des transactions financières illicites.

Les autorités auraient ainsi plus de mal à remonter la piste de l'argent «sale».