Gildan (T.GIL), dont les usines syndiquées comptaient pour la moitié des installations il y a seulement cinq ans, n'en aura plus aucune après la fermeture annoncée de la dernière, celle de la rue Louvain à Montréal, dont la production sera transférée vers l'Amérique centrale.

Gildan [[|ticker sym='T.GIL'|]], dont les usines syndiquées comptaient pour la moitié des installations il y a seulement cinq ans, n'en aura plus aucune après la fermeture annoncée de la dernière, celle de la rue Louvain à Montréal, dont la production sera transférée vers l'Amérique centrale.

Évolution suspecte ou signe des temps ? Les militants pour la responsabilité sociale des entreprises se montrent plutôt indulgents pour le fabricant de t-shirts.

«La direction dit qu'elle n'a pas le choix de déplacer la production pour rester compétitive, et on n'est pas en mesure de remettre cette explication en question, juge Kevin Ranney, directeur de la recherche chez Jantzi, l'une des principales firmes de classement des compagnies selon des critères éthiques.

Tout en soulignant que Gildan devra être surveillée d'encore plus près qu'avant une fois le transfert de sa production complété, Jantzi considère aujourd'hui l'entreprise «acceptable» malgré un passé controversé au chapitre des relations de travail.

«Elle est très exposée aux enjeux éthiques, mais elle est plus ouverte qu'avant», résume M. Ranney.

Gildan a annoncé il y a quelques jours la fermeture des deux usines qu'il lui restait à Montréal, mettant ainsi fin à sa production au Canada. Elle met aussi la clé dans la porte d'une de ses usines américaines et sort du Mexique, où elle employait 1365 personnes.

Le tout vise à transférer les activités vers l'Amérique centrale, où les coûts de main-d'oeuvre sont moins élevés.

Discrètement, ce mouvement emporte la dernière usine syndiquée de Gildan, qui était montréalaise. Il y a cinq ans, trois des six installations de la compagnie, toutes nord-américaines, étaient syndiquées, indique le vice-président des opérations André Joly.

Mais il assure que le facteur syndical n'a joué aucun rôle dans le déplacement de la production vers le Sud.

«On ne peut pas être compétitifs dans la situation actuelle, malgré des améliorations à la productivité et à la qualité des produits au cours des dernières années», soutient-il.

«On n'a pas de raison de soupçonner qu'ils essaient de se débarrasser des syndicats, puisque le gros du transfert part du Mexique, où les employés ne sont pas syndiqués», raisonne Kevin Ranney.

La tendance à déplacer le travail vers les pays à «bon marché» est généralisée dans le secteur manufacturier, fait valoir M. Ranney. «On n'est pas heureux de ça, mais on ne porte pas de jugement (sur une compagnie en particulier).»

L'organisme de défense des droits des travailleurs Maquila Solidarity Network, qui s'en est pris à Gildan par le passé, parle d'une véritable «course vers le fond» dans toute l'industrie manufacturière.

«Ce n'est excusable pour aucune compagnie, mais on ne veut pas singulariser Gildan», dit son porte-parole Bob Jeffcott.

Selon lui, l'exode des emplois vers le Sud est devenu un énorme enjeu même au Mexique, où l'accord de libre-échange nord-américain a fait monter les salaires.

«Les coûts de main-d'oeuvre augmentent au Mexique», confirme André Joly, de Gildan, en expliquant le départ de son entreprise.

Pour Kevin Ranney, de Jantzi Research, la vraie question sera de savoir si Gildan réalisera sa transition de façon responsable, par exemple en traitant convenablement ses nouveaux employés d'Amérique centrale.

Le Maquila Solidarity Network, de Toronto, a fait campagne contre Gildan en 2004 en l'accusant de pratiques antisyndicales au Honduras. Les pressions de l'organisme ont semblé porter fruits : la compagnie a promis de corriger ses pratiques et, selon les groupes sociaux, elle s'est substantiellement améliorée.

Le titre a gagné 12 % depuis l'annonce, le 27 mars, de la nouvelle phase de déplacement de sa production.

L'automne dernier, c'était l'usine de Gildan à Salaberry-de-Valleyfield qui fermait ses portes.