Aussi étonnant que cela puisse paraître, votre plus petit client pourrait bien s'avérer un meilleur porte-parole pour votre entreprise que le plus illustre personnage publique. C'est à cette conclusion pour le moins surprenante que les travaux d'Anik St-Onge, étudiante au doctorat en marketing à HEC Montréal, l'ont récemment menée.

Aussi étonnant que cela puisse paraître, votre plus petit client pourrait bien s'avérer un meilleur porte-parole pour votre entreprise que le plus illustre personnage publique. C'est à cette conclusion pour le moins surprenante que les travaux d'Anik St-Onge, étudiante au doctorat en marketing à HEC Montréal, l'ont récemment menée.

Mais pour exploiter cette nouvelle mine d'or, encore faut-il savoir la repérer. " Dans cette étude ayant pour cadre les communautés virtuelles sur Internet, je cherchais à vérifier s'il existait un profil de personnes sur lesquelles les organisations pourraient miser pour transmettre leurs messages. Un genre de connecteur qui ferait circuler la bonne nouvelle dans son cercle de connaissances. "

Pour valider ses hypothèses, l'étudiante a convaincu quatre organisations culturelles québécoises (Les Grands Ballets canadiens, l'Orchestre symphonique de Montréal, le Théâtre du Nouveau Monde et Zone 3) de se prêter à l'expérience. " Nous avons tout d'abord envoyé un courriel aux 32 254 personnes abonnées aux bulletins électroniques de ces organisations afin de les convier à répondre à un questionnaire permettant d'identifier qui étaient les connecteurs. "

Les études en marketing montrent qu'il y a trois types de personnes susceptibles de répandre la bonne nouvelle: les leaders d'opinion (des spécialistes d'un domaine en particulier), les mavens (surtout des femmes, au courant de tout, mais pas des expertes, grandes consommatrices de magazines et journaux, qui se plaisent à informer leurs amis) et les innovateurs (des avant-gardistes qui aiment être les premiers à savoir ce qui se passent).

" Aux 4000 internautes ayant rempli le questionnaire, nous avons ensuite fait parvenir un message personnalisé les invitant à diffuser à leurs amis un courriel provenant de leur organisation culturelle respective. Ainsi, l'abonné TNM a reçu un courriel annonçant la sortie d'une nouvelle pièce de théâtre. Des outils technologiques nous ont ensuite permis de vérifier si les courriels étaient bien redirigés, à qui et en combien de temps. "

Plus d'efficacité

Résultat intéressant: 10 % des personnes invitées à essaimer le message se sont avérées des connecteurs. Ce qui est énorme sur le plan marketing. En d'autres mots, cette conclusion signifie que si une entreprise arrive à cibler qui sont les relayeurs au sein de sa liste d'abonnés, non seulement elle s'assure de leur complicité pour diffuser ses messages mais ne sollicite que ceux qui en ont envie. Elle évite ainsi de harceler les 90 % qui n'aspirent aucunement à devenir émissaires.

" Notre étude a également démontré qu'en règle générale, un relayeur envoie le message à environ quatre autres personnes. Et ça ne s'arrête pas là car ces récipiendaires peuvent aussi essaimer à leur tour, poursuit Anik St-Onge. Ce qui s'avère plus efficace et surtout moins coûteux qu'une publicité à la télé ou encore dans les journaux qui nécessite au moins trois parutions avant que les consommateurs ne la remarquent. "

Et quelles sont les motivations qui poussent ces relayeurs à jouer ce rôle: aider les autres (altruisme), se faire du capital économique (entretenir ses contacts), être reconnu par ses pairs (se sentir valorisé), aider les entreprises en lesquelles ils y croient.

Se faire des amis

Mais attention, les connecteurs ne transmettent pas n'importe quoi. " Si le message ne comporte aucune valeur, ils ne le feront pas circuler, affirme catégoriquement Anik St-Onge. En clair: ils ne feront pas la promotion de publicités ou de concours. Les gens sont intéressés par une information pertinente et concise qui leur apporte quelque chose: sortie prochaine d'un nouveau produit, vulgarisation, banc d'essai, programmation, etc. Et surtout, ils ouvrent les courriels en provenance d'amis. "

" Ce qui est génial avec Internet, c'est que ça ne nous a pris que 48 heures pour repérer les relayeurs, précise la spécialiste en marketing. " L'entreprise n'a ensuite qu'à les contacter pour leur demander de devenir des ambassadeurs. En échange, elle peut leur offrir un spectacle gratuit, un cocktail VIP avec des comédiens, etc. Il suffit d'être créatif.

" Cette approche s'avère d'ailleurs bien plus efficace que la plupart des stratégies Web mises actuellement en oeuvre par les entreprises, poursuit la chercheuse. Elles lancent des concours, recueillent l'adresse courriel du participant et celle de quatre amis. Toutefois, l'information qu'elles accumulent n'a aucune valeur puisque la plupart des gens fournissent des adresses bidon. "

" Il semble d'ailleurs que cette façon de faire ait plus d'incidence sur les ventes des entreprises qu'une publicité traditionnelle. Ce que je me propose de vérifier dans ma prochaine étude ", dit la jeune chercheuse.

Liette D'Amours est directrice des communications au CEFRIO, un centre de recherche-action et de transfert spécialisé en appropriation des technologies de l'information.

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