Les Hells Angels et d'autres acteurs du crime organisé ont ajouté le «pump and dump» à leur arsenal criminel: ils ont floué des petits investisseurs en inscrivant en Bourse des entreprises de façade et en gonflant artificiellement les titres.

Les Hells Angels et d'autres acteurs du crime organisé ont ajouté le «pump and dump» à leur arsenal criminel: ils ont floué des petits investisseurs en inscrivant en Bourse des entreprises de façade et en gonflant artificiellement les titres.

Deux enquêteurs de la Sûreté du Québec ont expliqué le stratagème, jeudi, devant la commission parlementaire qui étudie le projet de loi 36 sur la confiscation de produits d'activités illégales.

Depuis cinq ans, a indiqué le sergent Luc Landry, des enquêtes ont révélé "plusieurs investissements financiers importants par des têtes dirigeantes d'organisations criminelles dans le monde boursier".

À des fins de blanchiment d'argent, les Hells et d'autres organisations ont ainsi eu recours à des prête-noms et investi des sommes importantes dans des compagnies inscrites en Bourse mais inactives, des "coquilles".

"Par la suite, par le biais de lettres d'intention et d'une propagande, les dirigeants créent une activité économique de façade, dit M. Landry. Le titre boursier grimpe et lorsque le titre atteint une valeur appréciable, les actions des premiers investisseurs sont vendues. Après un certain temps, l'entreprise n'ayant pas de véritable produit ou service cesse ses activités."

Cette technique du "pump and dump" "engendre des pertes importantes pour le petit investisseur et compromet l'intégrité du système bancaire et de courtage de valeurs mobilières", précise le policier. La SQ s'est penchée jusqu'à maintenant sur deux ou trois cas, dont un impliquant une entreprise liée aux Hells.

Une relation des Hells s'est infiltrée dans le milieu du remorquage en acquérant un commerce de la région de Montréal. L'objectif était de prendre le monopole du marché local, en usant d'intimidation et en livrant une guerre des prix.

Des entreprises légales de services, comme des salons de bronzage et des lave-autos, ont aussi été acquises par des organisations criminelles à des fins de blanchiment.

Une présence qui peut "décourager l'investissement d'honnêtes citoyens" dans ce segment de marché, note le sergent Landry.

"Les organisations criminelles essaient d'aller partout où il est possible d'aller pour remettre de l'argent sale au niveau local. Les guichets, les industries de services, l'immobilier...", ajoute l'inspecteur Yves Trudel, responsable des enquêtes sur la criminalité fiscale à la SQ.

Dans ce contexte, les policiers voient d'un très bon oeil le projet de loi, qui leur donnera plus de latitude afin de confisquer les biens issus d'activités illégales.

Il faut dire que les efforts déployés à ce titre depuis 1997 n'ont permis de confisquer qu'une très mince partie des biens issus de la criminalité. La récolte de tous les corps policiers québécois totalise en neuf ans 52 millions $. Or, Revenu Québec évalue à 1 % du PIB, soit 2,5 milliards $, la valeur des activités illégales dans la province. Un "chiffre conservateur", juge la SQ.