Au fil des enquêtes, on comprend mieux le rôle que jouait Martin Tremblay dans le secteur financier du Québec.

Au fil des enquêtes, on comprend mieux le rôle que jouait Martin Tremblay dans le secteur financier du Québec.

Cette semaine, un autre conseiller en placements de Montréal a été accusé d'avoir contrevenu aux règles de l'industrie avec l'un des comptes de Martin Tremblay.

Cette fois, le conseiller dans l'embarras s'appelle Karl Mansour, de la firme Jones Gable. À la suite d'une enquête, M. Mansour a été convié à une audience disciplinaire de l'Association canadienne des courtiers en valeurs mobilières (ACCOVAM), le 29 juin.

Dans cette affaire, il appert que Martin Tremblay, des Bahamas, n'avait aucune idée des transactions faites en son nom. Il n'agissait que comme prête-nom pour un compte de courtage, un procédé qui permet aux véritables propriétaires du compte de négocier en Bourse incognito.

L'entreprise déclarée être propriété à 100% de Martin Tremblay s'appelle Kenneth W. Salomon Investment Fund, des Bahamas. Le 24 janvier, Karl Mansour a vendu des actions d'une société minière en Bourse que détenait le fonds Kenneth sans en avoir parlé à Tremblay, indique l'ACCOVAM. Cette pratique est interdite puisque le compte n'était pas de type «carte blanche».

Au fait, Martin Tremblay ne pouvait donner à M. Mansour l'autorisation de faire des transactions, puisqu'il était en prison au moment des transactions, en janvier 2006, sans possibilité de téléphoner.

Autre surprise: Karl Mansour a modifié les objectifs d'investissement du compte Kenneth, au début de janvier 2006, alors qu'il n'avait pas parlé à Martin Tremblay depuis plusieurs années.

Mais alors, de qui donc Karl Mansour recevait-il ses instructions? «L'intimé a donné deux versions différentes () Une version consistait en ce que les instructions avaient été données par l'assistante de M.T. (Martin Tremblay). L'autre version était à l'effet que les instructions avaient été reçues de L.P.S. (Louis-Philippe Séguin), qui aurait parlé à l'assistante de M.T.», est-il écrit dans l'avis d'audience de l'ACCOVAM.

Voilà donc que ressort le nom de Louis-Philippe Séguin. Ce financier a maille à partir avec les autorités réglementaires depuis un bon moment. Actuellement, il subit un procès au palais de justice de Montréal.

L'Autorité des marchés financiers (AMF) lui reproche d'avoir fait un délit d'initié sur le titre de Corporation Garda World, alors qu'il en était un des administrateurs.

M. Séguin aurait également aidé sa compagnie Corporation stratégique SPJ à lever des fonds sans prospectus, selon l'AMF. Pour les 28 chefs d'accusation contre M. Séguin et SPJ, l'AMF réclame une amende de 186 000$.

L'ACCOVAM enquête aussi sur Louis-Philippe Séguin, mais ce dernier refuse de répondre aux questions. L'ACCOVAM veut l'interroger sur le fonds Kenneth, un compte qu'il a géré de 2003 à décembre 2005 avant sa démission de la firme Jones Gable. C'est après son départ que le compte a été transféré à Karl Mansour, en janvier 2006.

Depuis l'arrestation de Martin Tremblay, le fonds Kenneth est bloqué par l'AMF. Le portefeuille d'actions de Kenneth vaut environ 1,3 million de dollars.

En plus de Kenneth, l'ACCOVAM veut poser des questions à M. Séguin sur des transactions avec le courtier CIBC Wood Gundy, de même que sur ses activités avec la firme Investissements Blue Ship. Les relations de M. Séguin avec Garda World font également partie de la liste des sujets de l'ACCOVAM.

Par ailleurs, l'ACCOVAM a d'autres reproches à faire à Karl Mansour. Après enquête, elle a constaté que M. Mansour faisait des transactions pour le compte de trois clients du Liban sans les avoir déclarées, comme sa pratique l'exige.

À l'audience du 29 juin, Karl Mansour risque de se voir imposer un blâme, une amende de plusieurs milliers de dollars ou une révocation de son inscription, entre autres. Au moment de mettre sous presse, Karl Mansour n'avait pas rappelé La Presse Affaires.