Le président et chef de la direction de Rona (T.RON), Robert Dutton, a assuré jeudi qu'il ne modifierait pas radicalement sa stratégie d'affaires pour affronter l'arrivée du géant Lowe's au Canada, plus tard cette année, mais il a admis que l'expansion aux Etats-Unis devrait attendre.

Le président et chef de la direction de Rona [[|ticker sym='T.RON'|]], Robert Dutton, a assuré jeudi qu'il ne modifierait pas radicalement sa stratégie d'affaires pour affronter l'arrivée du géant Lowe's au Canada, plus tard cette année, mais il a admis que l'expansion aux Etats-Unis devrait attendre.

«Lorsque je serai confortable, lorsqu'on on aura une part de marché où je serai rassuré que le travail est fait dans la consolidation du marché canadien, on regardera lentement, prudemment, les opportunités aux Etats-Unis», a déclaré M. Dutton devant le Cercle finance et placement du Québec.

L'année dernière, en entrevue au Globe and Mail, il convoitait pourtant le troisième rang aux États-Unis, en commençant par la côte est.

Lowe's est le deuxième plus important détaillant de produits de quincaillerie au monde, après Home Depot. Il prévoit faire une percée au Canada en ouvrant de six à dix magasins en Ontario d'ici la fin de l'année.

À l'heure actuelle, Rona détient environ 16 % du marché de la quincaillerie au Canada, à peu près à égalité avec Home Depot. Canadian Tire (13 %) et Home Hardware (12 %) suivent. Les indépendants et les petites chaînes occupent encore quelque 40 % du marché.

Dans son discours, jeudi, Robert Dutton a rappelé comment Rona, qu'il préside depuis 1992, en est venu à se positionner comme le «consolidateur» du marché canadien, en 1999.

«Soit nous étions consolidateurs, soit nous étions consolidés (achetés)», a-t-il illustré, en faisant allusion à l'arrivée de Home Depot au Canada, dans les années 1990.

Les premiers pas ont été difficiles. «On ne s'est vraiment pas précipité chez nous pour financer notre projet de consolidation du marché canadien», a souligné le dirigeant.

La stratégie a pourtant été fructueuse. Les acquisitions représentent désormais plus de la moitié des ventes de Rona et ont permis à l'entreprise de générer des synergies annuelles de plus de 80 M$. Ces dernières équivalent à plus de 20 % du bénéfice d'exploitation dégagé en 2006.

Patience

Preuve de la santé du détaillant, il est en croissance depuis 16 ans et cette dernière a dépassé les 10 % au cours de huit des dix dernières années. Cotée en Bourse depuis 2002, Rona a rapidement accru l'appétit des actionnaires, que M. Dutton a diplomatiquement tenté de calmer, jeudi.

«Quand chaque trimestre apporte sa croissance, et une croissance substantielle, on tend à perdre de vue que ces progrès, rapides en apparence, sont le fruit de décisions prises des années auparavant, patiemment mises en oeuvre sur plusieurs années», a-t-il expliqué.

Lorsque Rona a décidé de suivre la tendance américaine des magasins-entrepôts («big boxes'), en 1993, les analystes s'étaient inquiétés du choix de maintenir aussi les petites surfaces de proximité.

«Il a fallu répéter le message pendant sept ou huit ans avant que les observateurs comprennent que l'univers ne se résumait pas aux magasins à grande surface», a relevé le président.

Robert Dutton prône donc une certaine forme de patience en affaires, notamment quand vient le temps de faire des acquisitions. Il a même cité un pionnier de l'imprimerie du quinzième siècle, Aldo Manuzio, dont la devise était «dépêchez-vous lentement».

«C'est précisément parce que nous savons qu'il faut du temps que nous sommes toujours animés d'un sentiment d'urgence, a-t-il affirmé. Lorsqu'une stratégie produit des effets sur un horizon qui se mesure en années, il faut commencer sans délai. Mais il ne faut jamais confondre urgence et précipitation.»

Pour 2007, Rona a un objectif ambitieux: des ventes de 7 G$, soit 1 milliard $ de plus qu'en 2006. On vise plus particulier le marché des entrepreneurs, sous-exploité alors qu'il est plus rentable que celui du grand public.

Et malgré le ralentissement de la construction résidentielle, le détaillant promet d'accroître la formation de ses employés et de ne pas réduire drastiquement le service à la clientèle.

«Quand nous avons préparé nos budgets de cette année, ça aurait été l'enfance de l'art de gonfler notre bénéfice de plusieurs cents par année, a prétendu Robert Dutton. Reporter la construction de quelques magasins, reporter quelques projets de rénovation, réduire le personnel dans nos magasins. (...) Mais le prix se serait exprimé en croissance sacrifiée dans chacune des années subséquentes.»

À la Bourse de Toronto, jeudi, le titre de Rona a clôturé à 23,34 $, en hausse de 19 cents.