Le laisser-faire du gouvernement fédéral quant aux retombées des contrats militaires pourrait finir par lui coûter très cher.

Le laisser-faire du gouvernement fédéral quant aux retombées des contrats militaires pourrait finir par lui coûter très cher.

«Les conséquences d'une perte de vitesse de l'industrie aéronautique sont beaucoup plus lourdes pour le gouvernement que l'aide qu'il pourrait apporter pour la maintenir et la propulser», affirme l'ancien ministre fédéral du Développement économique Jacques Saada, dans sa première entrevue en tant que président et directeur général de l'Association québécoise de l'aérospatiale (AQA).

M.Saada, qui n'est en poste que depuis quelques jours, souligne qu'il y a des entreprises liées au secteur de l'aéronautique dans 13 des 14 régions du Québec.

«Il est évident que, si les difficultés s'amoncellent et que les entreprises sont menacées, de nombreuses vies professionnelles sont menacées, indique-t-il. Les coûts sociaux que ça entraîne sont extrêmement lourds à porter. Je voudrais démontrer au gouvernement fédéral que ça coûterait moins cher d'aider l'industrie que de subir les conséquences de ne pas le faire.»

Le gouvernement de Stephen Harper a choisi de ne pas forcer Boeing, à qui il a confié un premier grand contrat militaire, à allouer un pourcentage minimum des retombées au Québec, une province qui accueille plus de 50% de l'industrie aéronautique canadienne.

Le gouvernement conservateur est généralement peu enclin à aider financièrement les entreprises, mais il a quand même renouvelé, avec des modifications et un nouveau nom, le programme d'aide à la recherche et au développement Partenariat technologique Canada.

M.Saada rappelle que l'industrie canadienne fait face à une concurrence de plus en plus féroce. Les pays qui ne sont pas des puissances traditionnelles dans le domaine de l'aéronautique, comme la Chine et l'Inde, viennent en aide à leur industrie naissante.

En outre, les entreprises américaines et européennes continuent de bénéficier de l'aide directe de leurs gouvernements grâce à des contrats militaires.

«Bien sûr, le libre-échange est extrêmement important, mais il faudrait que les règles du jeu soient équitables, soutient le nouveau patron de l'AQA. Il faut faire comprendre au gouvernement à quel point c'est important.»

M.Saada déclare toutefois que les entreprises québécoises elles-mêmes ont un rôle à jouer pour faire face aux Boeing, Lockheed Martin et autres grands donneurs d'ordres de ce monde.

«Les grands donneurs d'ordres souhaitent réduire le nombre de fournisseurs, rappelle-t-il. Il est important que les petites entreprises se regroupent, de façon formelle ou informelle, pour offrir des systèmes intégrés, ce qui augmenterait leur caractère concurrentiel par rapport aux autres.»

M.Saada a déjà été président d'un comité des Communes qui traitait de la défense et des relations entre le Canada et les États-Unis.

Il est donc bien au courant de l'ITAR (International Traffic in Arms Regulation), cette réglementation américaine qui impose de sérieuses restrictions aux entreprises canadiennes de la défense, notamment en ce qui touche l'emploi de personnes ayant une double citoyenneté. Il s'agira d'une autre de ses priorités.

M.Saada, qui était ministre dans le gouvernement de Paul Martin, a annoncé son retrait de la politique en décembre dernier, après sa défaite aux élections.

Il a été nommé à la tête de l'AQA en remplacement de Sue Dabrowski, qui conteste toujours son congédiement devant les tribunaux.