Ça pressait. BCE(T.BCE) cherchait coûte que coûte d'autres investisseurs capables de concurrencer l'offre hostile de Teachers. Pourtant, le grand patron du géant des télécoms a mis plus de deux semaines à contacter son rival, le patron de Telus. Et un mois avant de le rencontrer.

Ça pressait. BCE[[|ticker sym='T.BCE'|]] cherchait coûte que coûte d'autres investisseurs capables de concurrencer l'offre hostile de Teachers. Pourtant, le grand patron du géant des télécoms a mis plus de deux semaines à contacter son rival, le patron de Telus. Et un mois avant de le rencontrer.

Nous sommes le 16 avril 2007. Le conseil d'administration de BCE a pris connaissance, une semaine plus tôt, qu'un de ses actionnaires, la caisse de retraite des enseignants ontariens, a décidé de devenir un «investisseur actif». Autrement dit, Teachers a l'intention d'augmenter sa participation dans le géant montréalais dans le but, éventuellement, d'en faire l'acquisition.

Le C.A. de BCE a une crainte. Une grande crainte, apprend-on dans la circulaire de procuration de la direction déposée hier en vue de l'assemblée des actionnaires du 21 septembre prochain: que Teachers soit le seul groupe intéressé et qu'il puisse donc partir avec les téléphones de Bell sans que les actionnaires n'aient eu droit à la meilleure offre possible.

Deux jours plus tôt -le 14 avril-, le conseil d'administration avait même demandé à la direction de BCE de contacter la Caisse de dépôt et placement du Québec, le Régime de pensions du Canada (RPC) et la firme privée KKR, question de faire monter les enchères. «Le conseil demande à la direction et aux conseillers financiers de BCE d'entamer des discussions exploratoires avec ces parties pour les encourager à former un groupe concurrent, et de faire rapport à ce sujet au conseil le 16 avril 2007», peut-on lire dans le document déposé hier.

On sait aujourd'hui que Cerberus et le RPC ont finalement déposé une offre pour BCE. Mais le 16 avril 2007, le conseil n'en semble pas convaincu et il demande à la direction de l'entreprise de contacter Telus afin «d'étudier la faisabilité d'un regroupement».

Michael Sabia, président et chef de la direction de BCE, entre en contact avec Darren Entwistle, président et chef de la direction de Telus, plus de deux semaines plus tard, soit le 3 mai. Une rencontre a lieu entre les deux hommes le 15 mai 2007 à Vancouver, soit un mois après la résolution du conseil d'administration.

Mardi, chez BCE, personne ne voulait accorder d'entrevue sur les informations contenues dans la circulaire. Tout au plus, un haut dirigeant, qui ne voulait pas être cité, a indiqué que «il y avait des travaux préparatoires» à effectuer avant la rencontre.

À la fin juin, quand Telus a annoncé à la surprise générale qu'elle ne déposerait pas d'offre sur sa concurrente montréalaise, l'entreprise de Vancouver s'est plainte des «lacunes du processus de soumission», sans vouloir élaborer davantage. Mardi, Stacey Masson, porte-parole de Telus, ne voulait pas en dire plus : «On a dit vendredi dernier qu'on se retire de la course (pour acquérir BCE). Au-delà de ça, on ne veut pas vraiment commenter sur les procédures.»

Pris par la crise de l'endettement

La circulaire de la direction indique aussi clairement que la crise du crédit, qui se fait royalement sentir sur les marchés depuis deux semaines, a été un facteur important dans l'étude des offres faites par les trois derniers groupes en liste.

Le 28 juin, le comité de surveillance, chargé d'étudier les offres, «tient compte de l'importance de conclure le processus d'enchères rapidement, en raison principalement de la volatilité et de l'incertitude grandissantes des marchés de la dette».

Plus loin, on peut aussi lire que BCE voulait entamer des discussions finales «le plus rapidement possible dans le but de préserver ces offres, principalement en raison de la détérioration constante des marchés de la dette».

Le lendemain, pendant un conseil d'administration au cours duquel Goldman Sachs a passé en revue les trois différentes offres, les administrateurs apprennent que le consortium mené par Teachers a augmenté la valeur de son offre et l'a portée à 42,75$.

Cerberus présente aussi des modifications à son offre pendant la réunion du conseil. Une réunion qui s'éternise et à la fin de laquelle les administrateurs concluent que l'offre de Cerberus «présente des risques d'ordre réglementaire potentiellement plus élevés que les deux autres» en raison des règles sur la propriété canadienne des services de télécoms.

BCE n'a pas divulgué la valeur de l'offre de Cerberus ni celle du consortium mené par le RPC, indiquant simplement que l'offre de Teachers, «de concert avec ses modalités et conditions, s'avère nettement supérieure aux autres offres».