Devant l’incapacité de certaines PME à rembourser à temps le prêt reçu dans le cadre du Compte d’urgence pour les entreprises canadiennes (CUEC), le gouvernement fédéral doit reporter la date butoir d’un an, demandent notamment la Fédération canadienne de l’entreprise indépendante (FCEI) et le Bloc québécois.

« L’analyse du gouvernement est mauvaise, lance d’entrée de jeu le chef bloquiste, Yves-François Blanchet, au cours d’un entretien téléphonique avec La Presse. Je pense qu’il commence à en prendre conscience. »

« Ils ont mis en place un programme d’urgence pendant la pandémie. Ils n’ont pas anticipé que la pandémie allait être suivie d’une poussée inflationniste qui évidemment mettrait de la pression sur les petites entreprises, que la crise de pénurie de main-d’œuvre allait se maintenir à des niveaux élevés, et pour ajouter à ça, un certain nombre d’entreprises ont d’autres créances et des taux d’intérêt plus élevés. Tout ça cumulé met en péril un nombre très important d’entreprises », ajoute-t-il.

Le Bloc demande donc – tout comme la FCEI – un report de la date limite donnant accès à la subvention au 31 décembre 2024. Les entreprises qui ont reçu 60 000 $ auraient donc jusqu’à ce moment pour rembourser la somme de 40 000 $ et conserver 20 000 $. Les troupes bloquistes veulent également que les PME aient la possibilité de négocier d’autres modalités de remboursement sans perdre la subvention. « On demande aussi que le gouvernement offre un guichet unique d’intervention et de réponse pour les entreprises », indique M. Blanchet.

« On dit : donnez plus de temps aux entrepreneurs qui sont pris avec des taux d’endettement pandémique très élevés. Plusieurs ont des revenus sous la normale. Il y a des pressions sur les coûts des entreprises qui sont à la hausse en raison notamment de l’inflation », ajoute pour sa part Jasmin Guénette, vice-président aux affaires nationales de la FCEI.

PHOTO ADRIAN WYLD, ARCHIVES LA PRESSE CANADIENNE

Jasmin Guénette, vice-président aux affaires nationales de la FCEI

Selon nos plus récentes données, il y a seulement 17 % des PME qui ont remboursé intégralement le CUEC et 83 % ont un solde impayé.

Jasmin Guénette, vice-président aux affaires nationales de la FCEI

Parmi celles dont la somme n’est toujours pas remboursée, 34 % disent avoir les fonds suffisants pour rembourser le prêt à temps, alors que 30 % veulent emprunter des fonds pour honorer leur engagement. Près de 29 % n’ont ni les fonds nécessaires ni la possibilité d’obtenir un prêt.

Les entreprises qui n’arriveront pas à payer 40 000 $ au 18 janvier perdront leur subvention de 20 000 $ et auront jusqu’au 31 décembre 2026 pour rembourser 60 000 $ à un taux d’intérêt de 5 %.

Au cabinet de la ministre des Finances, Chrystia Freeland, responsable du programme, on estime qu’avec le report des échéances annoncé en septembre, les entreprises bénéficient maintenant d’une plus grande « flexibilité ». « Si vous êtes une petite entreprise et que vous ne disposez pas en ce moment des fonds nécessaires pour rembourser votre prêt CUEC, vous avez maintenant trois ans pour le faire en entier », a rappelé la porte-parole, Katherine Cuplinskas, dans un courriel envoyé à La Presse. « Le programme CUEC, qui a distribué plus de 49 milliards de dollars à près de 900 000 petites entreprises et organismes à but non lucratif partout au pays, y compris au Québec, a été un élément essentiel de la réponse rapide du gouvernement fédéral à la pandémie de COVID-19. La flexibilité supplémentaire que nous avons annoncée est un soutien important pour les petites entreprises qui pourraient encore avoir du mal à joindre les deux bouts. »

Forte d’une pétition comptant plus de 50 000 noms, la FCEI maintient toujours la pression pour que le gouvernement annonce une nouvelle date butoir. « Il va y avoir une mise à jour économique au fédéral, ça serait le temps d’annoncer que le CUEC est prolongé d’un an », souligne M. Guénette. Mais d’ici là, les entreprises doivent « évaluer toutes leurs options », rappelle-t-il.

« Il faut qu’elles s’assoient avec leur comptable, avec leur fiscaliste si elles en ont un. Il faut qu’elles regardent la situation froidement. On ne peut pas présumer que le gouvernement, s’il a repoussé la date deux fois, va le faire trois fois, malgré le proverbe jamais deux sans trois. »