Les appels du pied de la part des politiciens pour stimuler l’achat local semblent avoir disparu de l’espace public, déplorent des entrepreneurs d’ici, qui ont l’impression de vivre un véritable « lendemain de veille ». Après avoir connu une forte croissance, plusieurs font face à une diminution de leurs ventes, si bien que certains se résignent même à mettre la clé sous la porte.

Et la valse des fermetures a déjà commencé. « Avec la COVID, les gens se sont un peu défoulés dans l’achat de produits en ligne. C’était incroyable », se rappelle Marina Dubois, propriétaire de l’entreprise Inédit du Nord, dont les boutiques vendent notamment des accessoires pour la maison, des bijoux et des vêtements fabriqués au Québec.

« Quand on a vécu tout ça et qu’on revient dans la réalité, on tombe de haut. »

Et la réalité a eu l’effet d’une douche froide pour Mme Dubois qui a pris la dure décision de mettre fin à ses activités d’ici les prochaines semaines. « Je pense que l’engouement pour l’achat local s’est vraiment essoufflé. C’était rendu trop. Je pense que les gens se sont tannés. [Les politiciens] n’en parlent plus du tout », dit-elle, ajoutant dans la foulée qu’elle se sent maintenant « abandonnée ».

  • Les boutiques Inédit du Nord vendent notamment des accessoires pour la maison, des bijoux et des vêtements fabriqués au Québec.

    PHOTO HUGO-SÉBASTIEN AUBERT, LA PRESSE

    Les boutiques Inédit du Nord vendent notamment des accessoires pour la maison, des bijoux et des vêtements fabriqués au Québec.

  • Les boutiques Inédit du Nord vendent notamment des accessoires pour la maison, des bijoux et des vêtements fabriqués au Québec.

    PHOTO HUGO-SÉBASTIEN AUBERT, LA PRESSE

    Les boutiques Inédit du Nord vendent notamment des accessoires pour la maison, des bijoux et des vêtements fabriqués au Québec.

  • Les boutiques Inédit du Nord vendent notamment des accessoires pour la maison, des bijoux et des vêtements fabriqués au Québec.

    PHOTO HUGO-SÉBASTIEN AUBERT, LA PRESSE

    Les boutiques Inédit du Nord vendent notamment des accessoires pour la maison, des bijoux et des vêtements fabriqués au Québec.

  • Les boutiques Inédit du Nord vendent notamment des accessoires pour la maison, des bijoux et des vêtements fabriqués au Québec.

    PHOTO HUGO-SÉBASTIEN AUBERT, LA PRESSE

    Les boutiques Inédit du Nord vendent notamment des accessoires pour la maison, des bijoux et des vêtements fabriqués au Québec.

  • Les boutiques Inédit du Nord vendent notamment des accessoires pour la maison, des bijoux et des vêtements fabriqués au Québec.

    PHOTO HUGO-SÉBASTIEN AUBERT, LA PRESSE

    Les boutiques Inédit du Nord vendent notamment des accessoires pour la maison, des bijoux et des vêtements fabriqués au Québec.

  • Les boutiques Inédit du Nord vendent notamment des accessoires pour la maison, des bijoux et des vêtements fabriqués au Québec.

    PHOTO HUGO-SÉBASTIEN AUBERT, LA PRESSE

    Les boutiques Inédit du Nord vendent notamment des accessoires pour la maison, des bijoux et des vêtements fabriqués au Québec.

1/6
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  

Pour la petite histoire, Marina Dubois a ouvert sa première boutique à Sainte-Thérèse en 2018. Lorsque la pandémie a frappé le Québec au printemps 2020, les ventes d’Inédit du Nord ont connu une croissance fulgurante. En avril de cette année-là, Mme Dubois a enregistré le triple des ventes générées en décembre, sa période normalement la plus lucrative.

« On a eu une croissance incroyable », souligne-t-elle. Résultat : la femme d’affaires a pris ce qu’elle qualifie aujourd’hui de « décisions de grandeur ». « J’avais l’idée d’ouvrir plusieurs boutiques au Québec. On se dit que, dans le pire des cas, les ventes vont se stabiliser. Il pourrait y avoir une petite diminution, mais on va être correct. »

Elle a donc ouvert une deuxième boutique à Saint-Sauveur, puis une troisième d’une superficie de 4000 pieds carrés à Blainville, qui deviendra également son siège social. De son propre aveu, avec cette troisième ouverture, elle a signé son arrêt de mort.

PHOTO HUGO-SÉBASTIEN AUBERT, LA PRESSE

Marina Dubois, propriétaire de l’entreprise Inédit du Nord

L’engouement pour l’achat local a fait en sorte que beaucoup de petites boutiques ont ouvert. Donc, celles qui étaient là avant ont dû faire face à beaucoup plus de compétition. Les produits de plusieurs entreprises locales se sont aussi retrouvés dans les grandes surfaces, ce qui a dilué le marché.

Marina Dubois, propriétaire de l’entreprise Inédit du Nord

Ainsi, il y a un an, elle a fermé sa boutique de Sainte-Thérèse. Maintenant, elle doit se résoudre à mettre totalement fin à ses activités.

Et elle n’est pas la seule. Juliette & Chocolat, CRémy et plus récemment La Boîte à vins, spécialisée dans la vente de produits québécois, ont également annoncé leur fermeture totale ou partielle. « On a explosé pendant la pandémie. C’est maintenant le temps de faire les comptes et on se rend compte qu’on n’est plus viables », a expliqué le propriétaire de La Boîte à vins, Louis-Philippe Mercier, dans un article publié dans La Presse il y a quelques jours.

Lisez l'article « De l’eau dans sa Boîte à vins »

PHOTO DOMINICK GRAVEL, LA PRESSE

La boutique des Mauvaises Herbes se situe sur la Plaza Saint-Hubert à Montréal

La fin de la récréation

Cet essoufflement pour l’achat local, Marie Beaupré, cofondatrice des Mauvaises Herbes, ainsi que quelque 300 entrepreneurs d’ici l’avaient vu venir. En mai 2022, ils ont d’ailleurs signé une lettre ouverte dans laquelle ils affirmaient que l’achat local était en péril. « Au début de la pandémie, les PME se sont réjouies de la mobilisation pour favoriser l’achat local, notamment par des campagnes comme celle du tristement célèbre Panier bleu, écrivaient-ils. Toutefois, cette volonté de promouvoir le locavorisme s’éteint lentement en cette fin de pandémie et ce début de crise économique. »

« Ça fait un bout de temps qu’on martèle qu’il se passe quelque chose post-pandémie, ajoute Mme Beaupré, au bout du fil. On a plein de collègues entrepreneurs qui mettent fin à leurs activités ou qui ferment une succursale. »

  • L'entreprise Les Mauvaises Herbes se spécialise notamment dans la préparation et la mise en vente de produits naturels de soins corporels et ménagers.

    PHOTO DOMINICK GRAVEL, LA PRESSE

    L'entreprise Les Mauvaises Herbes se spécialise notamment dans la préparation et la mise en vente de produits naturels de soins corporels et ménagers.

  • L'entreprise Les Mauvaises Herbes se spécialise notamment dans la préparation et la mise en vente de produits naturels de soins corporels et ménagers.

    PHOTO DOMINICK GRAVEL, LA PRESSE

    L'entreprise Les Mauvaises Herbes se spécialise notamment dans la préparation et la mise en vente de produits naturels de soins corporels et ménagers.

  • L'entreprise Les Mauvaises Herbes se spécialise notamment dans la préparation et la mise en vente de produits naturels de soins corporels et ménagers.

    PHOTO DOMINICK GRAVEL, LA PRESSE

    L'entreprise Les Mauvaises Herbes se spécialise notamment dans la préparation et la mise en vente de produits naturels de soins corporels et ménagers.

  • L'entreprise Les Mauvaises Herbes se spécialise notamment dans la préparation et la mise en vente de produits naturels de soins corporels et ménagers.

    PHOTO DOMINICK GRAVEL, LA PRESSE

    L'entreprise Les Mauvaises Herbes se spécialise notamment dans la préparation et la mise en vente de produits naturels de soins corporels et ménagers.

  • L'entreprise Les Mauvaises Herbes se spécialise notamment dans la préparation et la mise en vente de produits naturels de soins corporels et ménagers.

    PHOTO DOMINICK GRAVEL, LA PRESSE

    L'entreprise Les Mauvaises Herbes se spécialise notamment dans la préparation et la mise en vente de produits naturels de soins corporels et ménagers.

  • L'entreprise Les Mauvaises Herbes se spécialise notamment dans la préparation et la mise en vente de produits naturels de soins corporels et ménagers.

    PHOTO DOMINICK GRAVEL, LA PRESSE

    L'entreprise Les Mauvaises Herbes se spécialise notamment dans la préparation et la mise en vente de produits naturels de soins corporels et ménagers.

  • L'entreprise Les Mauvaises Herbes se spécialise notamment dans la préparation et la mise en vente de produits naturels de soins corporels et ménagers.

    PHOTO DOMINICK GRAVEL, LA PRESSE

    L'entreprise Les Mauvaises Herbes se spécialise notamment dans la préparation et la mise en vente de produits naturels de soins corporels et ménagers.

1/7
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  

L’entreprise de Mme Beaupré, qui se spécialise notamment dans la préparation et la mise en vente de produits naturels de soins corporels et ménagers, est toujours en vie. Mais son équipe et elle ont été contraintes de prendre des décisions difficiles.

Elles ont dû mettre de côté certaines valeurs écoresponsables pour survivre. « Certains de nos ingrédients étaient dans des bouteilles de verre, là on a changé pour du plastique. On a abandonné certains de nos sacs compostables pour des sacs recyclables. »

L’entreprise, dont la boutique se situe sur la Plaza Saint-Hubert à Montréal, a également procédé à des suppressions de postes. On a même songé à se défaire de l’atelier qui semblait devenu trop grand.

Et comme plusieurs autres PME, Les Mauvaises Herbes a reçu de l’aide du gouvernement fédéral dans le cadre du compte d’urgence pour les entreprises canadiennes (CUEC). Elles ont toutes jusqu’au 31 décembre pour payer les deux tiers du prêt, si elles veulent conserver l’aide financière du dernier tiers. Au-delà de cette date, elles auront deux ans pour rembourser la totalité de la somme, avec intérêts.

Selon un rapport publié en juin par la Fédération canadienne de l’entreprise indépendante (FCEI), 4 entreprises sur 10 « risquent de ne pas pouvoir rembourser leur prêt du CUEC avant la fin de 2023 et de perdre la portion subvention. Selon les projections de la FCEI, la situation pourrait entraîner la fermeture d’un quart de million d’entreprises en 2024 ».

PHOTO MARCO CAMPANOZZI, ARCHIVES LA PRESSE

Marie Beaupré, cofondatrice des Mauvaises Herbes

Tous les investissements qu’on a faits, les prêts qu’on a eus…. Et là les ventes ne sont plus au rendez-vous, le message n’est plus au rendez-vous et il n’y a plus aucune mesure de soutien.

Marie Beaupré, cofondatrice des Mauvaises Herbes

« Au final, ce n’était peut-être pas si aidant que ça, tous les messages sur le commerce local. Ça a généré une croissance artificielle. Ça nous a forcés à avoir une croissance beaucoup trop rapide. »

« On comprend qu’en ce moment, le contexte est difficile pour les consommateurs, reconnaît-elle. Mais ça va prendre quoi ? J’ai l’impression que personne ne voit l’urgence. C’est le paysage entrepreneurial québécois qui est en jeu en ce moment. »

Avec la collaboration de Karyne Duplessis Piché, collaboration spéciale

En savoir plus
  • 50 %
    Parmi les entreprises qui ont l’intention de rembourser le prêt accordé dans le cadre du compte d’urgence pour les entreprises canadiennes (CUEC), près de la moitié affirme que l’exercice sera difficile.
    Source : Fédération canadienne de l’entreprise indépendante
    72 %
    Proportion des entreprises qui souhaitent que l’échéance du remboursement soit repoussée d’un an.
    Source : Fédération canadienne de l’entreprise indépendante