Il y a quelques semaines, j’ai cassé en l’espace de deux heures la vitre arrière de ma voiture ainsi que la porte en vitre de mon foyer… un bon moment pour tester les écrits de Lucien Auger sur la gestion des émotions.

La mauvaise humeur consomme notre énergie, altère notre jugement, rend l’esprit tendu et nuit à la relation avec autrui en nous rendant inconscient de notre impact sur eux. C’est justement pour cette dernière raison que je me suis intéressé aux émotions quand j’ai accédé à mon premier poste de gestion.

On peut évidemment faire appel à une affirmation catégorique pour mieux cadrer notre état d’esprit, par exemple : j’utilise mon aspirateur d’émotion, ou : je ne donne à personne le pouvoir sur mon humeur, ou encore : lorsque survient un coup dur, j’ai la patience et la confiance de croire que c’est passager.

C’est un bon début, mais il existe une méthode nettement supérieure.

Ma conviction personnelle est qu’il faut s’attaquer aux sources de mauvaise humeur plutôt que se répéter inlassablement que tout va bien même si ce n’est pas le cas.

Si on devient capable d’éviter les souffrances, d’étouffer notre colère, d’enterrer notre envie, d’adoucir notre tempérament et de nous débarrasser de notre tristesse, la crème de notre personnalité va faire surface pour le plaisir et le bonheur de tous.

La clé réside dans la fameuse demi-seconde entre un évènement et notre émotion, cette demi-seconde où se mélangent pensées, phrases intérieures, perception et jugement, ce qui fait naître notre émotion.

On accuse à tort l’évènement d’avoir créé l’émotion alors que les évènements sont neutres ; c’est notre jugement qui en fait des évènements heureux ou malheureux.

Il faut donc affronter nos pensées spontanées à la suite d’un évènement fâcheux. Y a-t-il évidence ? Est-ce que mes pensées décrivent bien la réalité ? L’évènement est-il si important et les conséquences si fâcheuses ? Que suis-je prêt à faire pour que les choses tournent comme je le veux ?

Il faut éviter certains pièges en commençant par celui de la rumination. Ruminer pendant toute la semaine en raison d’un mauvais lundi matin mène à une fin de semaine maussade et nourrit une dépression.

La meilleure recette est de dire qu’il faut la différer, ce qui amène naturellement à l’oublier.

Le deuxième piège est l’imagination. Quand un malheur frappe, l’imagination a tendance à le voir plus gros, plus proche et plus effrayant. La meilleure recette est de se demander ce qu’il adviendra de ce malheur dans six mois.

Voici comment j’avais réagi à la suite du bris des deux vitres : je me suis dit que c’était moins pire que la fois où, rentrant en soirée après un long et fatigant voyage, j’ai renversé la moitié d’une bouteille de porto sur un tapis de laine !

Cela m’amène sur le terrain fascinant de la conception du monde : hostile ou optimiste ? Un jardin à cultiver ou un terrain semé d’embûches ? Quand une porte grince, est-ce qu’elle se ferme ou s’ouvre ? En essayant de vendre une idée, se sent-on rejeté ou avons-nous simplement été mal compris ? Ce qui est fascinant, c’est de voir l’écart majeur de réaction de gens qui ont vécu dans un même environnement.

La meilleure recette, quand on est dans le doute, est d’avoir un penchant pour un discours intérieur positif.

Le dernier piège est de blâmer autrui dans un différend plutôt que d’analyser la situation selon le point de vue de l’autre partie. Blâmer autrui nous exempte du dur labeur de prendre en main notre destinée, de faire face lucidement à la réalité et de nous mettre courageusement au travail pour changer nos émotions désagréables. Des émotions non gérées peuvent se transformer en un sentiment plus profond comme l’accumulation de colère, qui mène à l’antipathie.

À bien y penser, l’affirmation suivante peut servir de guide : je ne suis pas une marionnette dont les fils sont contrôlés par mes émotions.

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