La conversion prochaine de près d’une vingtaine de Provigo en Maxi inquiète certains franchisés qui craignent d’être les prochains sur la liste des magasins transformés en enseigne au rabais bleu et jaune, a appris La Presse.

D’autres changements d’enseigne sont à venir. D’ici la fin de l’année, un total de 30 Provigo auront été converti. Au moment où les consommateurs sont à la chasse aux aubaines, l’inflation aura-t-elle raison de Provigo ? Avec la popularité croissante des enseignes au rabais comme Maxi, Provigo pourrait bien devenir chose du passé, selon Jacques Nantel, professeur et spécialiste du commerce de détail à HEC Montréal.

Actuellement, au Québec, on compte 66 magasins Provigo et 128 Maxi. « Avec moins de 100 magasins à la grandeur du Québec, malheureusement, je dirais que c’est une bannière qui risque fortement de disparaître », avance M. Nantel, qui se rappelle l’époque où l’enseigne comptait près de 400 magasins.

« Loblaw – qui gère les deux enseignes – a déjà eu raison de Provigo, lance-t-il sans détour. C’est une bannière avec laquelle l’entreprise a tellement eu de difficultés. Il n’y a pas grand-chose qu’elle n’a pas fait avec cette bannière-là depuis qu’elle l’a acquise. Provigo, c’est un réseau de détaillants affiliés, et Loblaw n’a pas vraiment l’habitude de composer avec ça, ajoute-t-il. Ce n’est pas dans ses habitudes. » Les supermarchés Maxi sont en effet gérés par l’entreprise.

Ainsi, selon M. Nantel, les franchisés qui arborent toujours le nom de Provigo sur leur façade ont raison de s’inquiéter. Certains craignent en effet de grossir les rangs des magasins Maxi, ont confirmé à La Presse des sources bien au fait du dossier. Comme elles ne sont pas autorisées à parler publiquement, elles préfèrent taire leur identité.

« C’est sûr que les marchands sont stressés. Loblaw s’aligne sur un concept de ‟Provigo plus", un marché très haut de gamme comme à L’Île-des-Sœurs et à Kirkland. »

Une autre source avance que des marchands Provigo encore en vie ont une idée du nombre d’épiceries qui passeront dans le giron de l’enseigne bleu et jaune, mais qu’ils n’ont pas encore une idée de la liste complète de celles qui seront converties, ce qui contribue au sentiment d’insécurité.

Récemment, Loblaw a annoncé que les magasins de Rivière-du-Loup, Saint-Pascal, Baie-Comeau et Saguenay, notamment, deviendront des Maxi. Dans certaines de ces villes, l’enseigne au rabais compte déjà un, voire deux supermarchés.

La Presse a tenté en vain de joindre des propriétaires dont le magasin Provigo sera transformé en Maxi. Certains nous ont suggéré de contacter le service des communications de la maison mère. Du côté des Provigo toujours existants, les propriétaires que nous avons appelés se sont également enfermés dans le mutisme.

De propriétaire à salarié

Ainsi, ceux dont le magasin est converti changent également de casquette : ils passent de propriétaire à salarié, puisque Maxi est entièrement sous la responsabilité de Loblaw. Mais ces marchands n’ont pas à s’inquiéter pour leur avenir, assure Johanne Héroux, directrice principale, affaires corporatives et communication de l’entreprise.

« Ils ont tous la possibilité de demeurer au sein de l’entreprise, même chose pour leurs employés, précise-t-elle. Il n’y a pas d’inquiétude à avoir pour leur avenir. Jusqu’à maintenant, ça se passe très bien. »

Provigo n’est pas rayé de la carte

Mme Héroux assure dans la foulée que l’enseigne ne disparaîtra pas du paysage et « qu’elle demeure très en vie ». La preuve, avance-t-elle, trois magasins feront l’objet de plusieurs millions d’investissements et adopteront le tout nouveau concept de Provigo Le Marché – à l’image des épiceries de Kirkland et de L’Île-des-Sœurs. Des produits de niche et une offre variée de prêt-à-manger caractérisent ces supermarchés.

Malgré tout, Loblaw ne cache pas ses intentions de convertir éventuellement d’autres Provigo en Maxi. « Dans l’immédiat, il ne devrait pas y en avoir plusieurs autres. Dans un futur plus lointain, l’exercice n’est pas terminé », reconnaît toutefois Mme Héroux.

Dans un contexte inflationniste où les consommateurs sont à la recherche d’aubaines, Loblaw note que la popularité de Maxi est grandissante. « Depuis les 20 dernières années, ce n’est jamais arrivé qu’on ouvre autant de magasins », affirmait Patrick Blanchette, vice-président, exploitation, de Maxi, au cours d’un entretien téléphonique en décembre.

Vente de magasins Provigo suspendue

Par ailleurs, alors que Loblaw avait annoncé à l’automne 2020 qu’elle mettait en vente 25 Provigo lui appartenant au prix de 50 000 $, voilà que l’entreprise a décidé de « suspendre son programme ». L’objectif était de franchiser l’ensemble du réseau. Plus de 1000 candidatures ont été reçues.

Sans révéler le nombre exact, Mme Héroux indique qu’une « bonne partie » a été vendue. « On a suspendu le programme à cause de cette analyse que l’on fait d’optimisation du réseau », explique-t-elle.

Provigo

Année de fondation : 1969

Achat de Provigo par Loblaw : 1998

Nombre de magasins actuellement : 66

Source : Loblaw