Un placement boursier de la Caisse de dépôt qui valait approximativement 1 milliard de dollars le printemps dernier a perdu les deux tiers de sa valeur en trois jours cette semaine

La chute boursière d’un producteur indien d’énergie renouvelable dont la Caisse de dépôt et placement du Québec est l’actionnaire majoritaire s’est poursuivie mercredi en dépit d’une sortie publique des dirigeants d’Azure Power Global visant à rassurer les marchés et à faire le point sur des allégations formulées par un lanceur d’alerte.

Azure a annoncé en début de semaine le départ surprise de son PDG et indiqué avoir reçu en mai une plainte d’un lanceur d’alerte concernant de potentielles irrégularités et inconduites de la part d’employés. Azure affirme détenir des preuves de manipulation de données et d’informations.

« On va s’en sortir », a lancé mercredi le président du conseil d’administration d’Azure Power Global, Alan Rosling, pour conclure une conférence téléphonique d’une durée de 60 minutes organisée en début de journée.

Alan Rosling dit comprendre l'inquiétude des investisseurs et leur frustration. Il affiche sa confiance envers la solidité des activités d’Azure et se dit emballé par l’« opportunité convaincante » offerte par l’énergie renouvelable et la transition énergétique.

En réponse aux questions concernant les allégations de manipulation de données, M. Rosling soutient qu’elles concernent une seule installation de l’entreprise et un « très petit nombre » d’employés.

Alan Rosling n’a pas voulu dire si les informations manipulées touchaient des données de production d’énergie, les revenus, les coûts ou autre chose.

Il dit toutefois ne pas s’attendre à ce que la situation exige des ajustements aux états financiers passés et refuse d’offrir plus de précisions en indiquant que l’entreprise ne peut se montrer aussi transparente qu’elle le souhaite étant donné que des « mesures » pourraient être prises éventuellement.

Des participants à la conférence téléphonique cherchaient notamment à savoir comment les coûts de financement pourraient être touchés par la situation actuelle.

Les états financiers de l’exercice terminé en mars ne sont toujours pas disponibles, on ne sait pas quand ils le seront, et Alan Rosling convient qu’il s’agit d’une situation « préoccupante ».

« Visibilité limitée »

Alan Rosling n’a pas non plus éclairci les circonstances entourant le départ du PDG Harsh Shah, qui n’était en poste que depuis deux mois. Il a simplement indiqué qu’une entente de confidentialité avec le principal intéressé l’empêchait de divulguer les raisons expliquant la démission.

Alan Rosling a par contre profité de l’occasion pour présenter formellement le PDG intérimaire, Rupesh Agarwal. Ce dernier était responsable de la stratégie commerciale chez Azure et s’est officiellement joint à l’entreprise il y a exactement un mois.

L’analyste Maheep Mandloi, de la firme Credit Suisse, n’a pas attendu la conférence téléphonique pour suggérer à ses clients de larguer le titre.

Il a publié un rapport mardi dans lequel il retire sa recommandation d’achat pour la remplacer par une proposition de vente en soulignant la « visibilité limitée » entourant les perspectives de l’entreprise et ses états financiers, mais en soulignant aussi la faiblesse de la performance des actifs en portefeuille.

Chute libre

Les investisseurs ont fait reculer l’action d’Azure à un nouveau plancher des 52 dernières semaines durant la séance de mercredi à la Bourse de New York.

Après avoir cédé 44 % de sa valeur lundi et 26 % de plus mardi, le titre d’Azure a perdu près de 17 % mercredi pour clôturer à 3,59 $ US.

L’action valait environ 10,50 $ US au début de la semaine et avait dépassé la barre des 50 $ US en janvier 2021. La capitalisation boursière d’Azure est maintenant de 230 millions US.

La Caisse est devenue actionnaire majoritaire d’Azure il y a deux ans et détient aujourd’hui une participation de 53 %, un investissement bonifié avec l’achat de 10 millions d’actions au premier trimestre.

La valeur de la participation de la Caisse dans Azure s’élevait à approximativement 1 milliard de dollars canadiens au début d’avril.

Le Régime de retraite des employés municipaux de l’Ontario (Omers) est le deuxième actionnaire d’Azure après la Caisse. Les deux entités contrôlent ensemble près de 75 % des actions d’Azure et ont chacune un représentant au conseil d’administration.

La Caisse se défend

Appelée à réagir aux récents développements, la Caisse répond n’avoir rien à ajouter.

Lundi, la Caisse avait indiqué à La Presse que l’organisation avait une conviction « forte à long terme » dans le secteur de l’énergie renouvelable, qui « joue un rôle essentiel par rapport au défi climatique ».

La Caisse avait ajouté qu’en tant qu’actionnaire, elle s’attendait à ce que ses entreprises en portefeuille maintiennent les plus hauts standards en matière de gouvernance et de conformité et à ce qu’elles traitent rapidement et efficacement toute question ou tout enjeu pouvant survenir à ce sujet.

Azure est le type d’investissement qui cadre dans les objectifs de la stratégie climatique de la Caisse, notamment de détenir 54 milliards de dollars en actifs verts d’ici 2025 pour contribuer activement à une économie plus durable.

Fondée il y a 14 ans, Azure Power Global a fait le saut à la Bourse de New York en 2016. L’entreprise exploite notamment une plateforme d’énergie solaire en Inde.