L’envie de prendre une photo durant l’éclipse sera assurément irrésistible pour beaucoup de spectateurs… Mais est-ce une si bonne idée ?

Une éclipse totale ! Il faut absolument immortaliser ce moment avec ma caméra. À quelle heure dois-je appuyer sur le déclencheur ?

Ça dépend de ce que vous voulez immortaliser, exactement. Parce qu’à moins d’être équipé d’un bon téléobjectif, de toute la quincaillerie mécanique et informatique et de la passion qui anime les astronomes amateurs, vous devriez peut-être braquer votre lentille ailleurs que vers le Soleil.

« Le premier conseil que je pourrais donner, même si ça semble contre-intuitif, c’est de résister à l’idée d’essayer de prendre des photos, dit le cinéaste et astronome Sébastien Gauthier. Pas tant parce que c’est dangereux pour soi ou pour l’appareil, mais surtout parce que c’est très difficile de faire une photographie d’éclipse qui rivalisera avec les photographies des spécialistes, ou qui témoignera de ce qu’on a véritablement vu. » Et comme ça ne durera pas plus d’une à trois minutes, selon où on se trouve, ce serait dommage de gaspiller ce temps précieux derrière une lentille de caméra... « Ça passe tellement vite que moi, mon conseil, ce serait plutôt de se concentrer sur l’observation de l’éclipse plutôt que d’essayer de la prendre en photo », dit Sébastien Gauthier.

Mais ce sera une image spectaculaire ! Une bille noire cerclée de feu !

Une bille noire, oui, qu’on pourra même admirer à l’œil nu pendant la phase d’éclipse totale. Mais comme elle ne sera pas très grosse dans le ciel d’après-midi, elle le sera encore moins sur l’écran du téléphone. « Vous avez déjà utilisé votre téléphone cellulaire pour photographier la Lune ? Et vous vous êtes rendu compte qu’elle apparaît comme un petit point blanc sur l’écran ? Eh bien, ça va faire la même chose durant l’éclipse », dit Sébastien Gauthier. D’où l’utilité d’avoir un téléobjectif assez puissant pour aller capter tous les détails de cette superposition d’astres lointains.

Donc, ce que les experts conseillent, c’est de ne pas prendre de photo du tout.

Non, pas nécessairement ! Mais il y a d’autres choses que le Soleil à immortaliser autour de soi.

Vidéo accélérée : en posant son appareil sur une surface stable, comme sur un trépied, on peut filmer une vidéo accélérée (time-lapse) qui témoignera de la baisse de la luminosité autour de soi (dans son jardin, devant la maison, sur le paysage...) quand la Lune cachera le Soleil. « Si on démarre la vidéo accélérée 5 minutes avant la totalité de l’éclipse, et qu’on tourne pendant 10-15 minutes, ça donnera une courte vidéo spectaculaire », dit Sébastien Gauthier.

Le Soleil à travers les trous : en observant la lumière du Soleil qui filtre à travers un trou, on verra le cercle être obscurci à mesure que la Lune s’avancera dans l’axe du Soleil. « Un truc que les gens font, c’est de prendre une passoire de métal et de faire réfléchir la lumière sur le sol, ou sur un mur. Ça projette ainsi une multitude de petites éclipses. »

D’accord. Mais si je tiens à prendre le Soleil en photo, est-ce dangereux pour mon équipement ou pour mes yeux ?

Dans ce cas, il y a en effet deux éléments de sécurité à prendre en compte quand le Soleil n’est pas complètement obscurci par la Lune.

Yeux : Regarder directement le Soleil partiellement obscurci, sans lunettes de protection adéquates, peut causer des dommages irrémédiables à la rétine. C’est également vrai si on regarde le Soleil à travers la lentille d’un appareil, comme une caméra, un télescope ou des jumelles, qui ne dispose pas d’un filtre approprié.

Équipement : « Généralement, les fabricants d’appareils photo ne recommandent pas de pointer l’appareil très longtemps vers le Soleil », dit Sébastien Gauthier. Prendre une photo dans laquelle apparaît le Soleil ne bousille pas automatiquement l’appareil (heureusement !), mais braquer l’objectif vers le ciel pendant trois heures, sans filtre de protection, n’est certainement pas une idée judicieuse pour préserver son capteur... « Pour photographier les phases partielles de l’éclipse, il faut mettre un filtre solaire sur son objectif », rappelle Sébastien Gauthier. Ce filtre, semblable à celui des lunettes solaires certifiées, s’achète en feuilles dans les boutiques spécialisées et doit être découpé pour couvrir l’objectif de la caméra (voir autre écran sur la préparation de notre photographe Martin Chamberland). Pour les petites caméras, comme celles des téléphones, un filtre de la taille d’une lunette d’éclipse peut suffire s’il couvre la surface de l’objectif.

Pour en savoir plus

L’astronome et photographe Alan Dyer, chasseur d’éclipses expérimenté, présente ses conseils sur son site web et dans un livre numérique très instructif :

Consultez le site de The Amazing Sky (en anglais)