(Ottawa) Santé Canada a constaté les premiers signes d’une pénurie de médicaments pour enfants dès le mois d’avril dans certaines provinces, notamment en Ontario et à Terre-Neuve-et-Labrador. Des démarches ont alors été entreprises auprès des fabricants pour qu’ils augmentent la production.

Mais la forte demande à compter d’août dans l’ensemble du pays pour ces médicaments contre la douleur et la fièvre chez les enfants, au moment où les virus respiratoires faisaient des ravages, a tout simplement aggravé la situation, ont admis de hauts fonctionnaires du ministère de la Santé devant un comité parlementaire mardi.

Un groupe de travail a été créé au sein du ministère afin d’examiner toutes les options permettant de résoudre cette pénurie, dont une augmentation de la production au pays de ces produits à base d’acétaminophène et d’ibuprofène et l’importation de médicaments en provenance de pays alliés comme les États-Unis et l’Australie, a indiqué le sous-ministre de la Santé, Stephen Lucas.

Le Canada a d’ailleurs reçu au cours des derniers jours une importante livraison d’analgésiques des États-Unis, a confirmé Linsey Hollett, directrice générale de la section conformité des produits de santé, devant le même comité parlementaire. Elle a toutefois refusé de confirmer la quantité précise qui a été reçue, affirmant plus tard que cette information sera éventuellement diffusée sur le site internet du ministère.

On attend aussi une livraison en provenance de l’Australie d’ici la fin du mois, a-t-elle aussi indiqué. Ces produits devraient se retrouver sur les tablettes des pharmacies au cours des prochaines semaines.

La pénurie d’analgésiques pédiatriques est une priorité absolue pour Santé Canada et tous les efforts sont déployés pour résoudre cette pénurie. Nous partageons les inquiétudes de tous les Canadiens qui sont affectés par cette pénurie.

Stephen Lucas, sous-ministre de la Santé

Il a indiqué que la production a augmenté d’une manière importante au pays, mais que la demande continue de dépasser l’offre. En tout temps, Santé Canada s’assure que les directives touchant les médicaments importés soient offertes dans les deux langues officielles en ajoutant un dépliant au moment de la vente dans les pharmacies ou dans les commerces ou en mettant l’information pertinente dans un code QR qui peut être balayé à l’aide d’un téléphone intelligent.

Mais ces propos n’ont guère rassuré les députés du comité de la santé. D’autant plus que la pénurie de ces médicaments fait les manchettes à travers le pays depuis quelques mois.

« J’ai un bambin qui perçait des dents en avril et je ne pouvais pas avoir accès à des médicaments pour enfants. Je croyais que c’était une question liée à la chaîne d’approvisionnement. […] La dernière fois que j’ai vu ces produits sur les tablettes dans ma communauté, ça remonte au mois de mai. C’est terrifiant pour une communauté, surtout quand l’hôpital pour enfants le plus proche se trouve à cinq heures de route », a lancé Laila Goodridge, députée conservatrice de Fort McMurray–Cold Lake, en Alberta.

Un problème qui date

Le député libéral de Thunder Bay-Rainy River, en Ontario, Marcus Powlowski, un ancien médecin, a pour sa part affirmé que des pénuries de médicaments sont monnaie courante au pays depuis plusieurs années. Selon lui, il appert que Santé Canada tarde à se doter d’une stratégie adéquate pour s’attaquer à ces pénuries.

La sous-ministre adjointe au ministère de la Santé, Stefania Trombetti, a donné raison au député libéral en disant que les autorités canadiennes ont répertorié 800 médicaments qui ne sont pas offerts en quantité suffisante pour répondre à la demande à travers le pays.

Nous gérons fréquemment des pénuries d’une manière satisfaisante en demandant aux manufacturiers d’augmenter la production ou d’en importer d’autres pays. Cela se fait sans que la pénurie atteigne un niveau critique.

Stefania Trombetti, sous-ministre adjointe au ministère de la Santé

Elle a souligné que d’autres pays comme l’Allemagne, le Royaume-Uni et même la France ont connu des pénuries comparables au cours des derniers mois.

« On aurait dû prévoir qu’il y aurait une forte demande à l’automne pour ces médicaments. On aurait dû prendre cela beaucoup plus au sérieux dès le mois d’avril. C’est honteux », a pesté le député conservateur de la Nouvelle-Écosse Stephen Ellis, également un ancien médecin.

Le député néo-démocrate Dan Davies a par la suite demandé pourquoi le Canada ne suivait pas l’exemple de l’Australie, qui exige des fabricants de médicaments fortement demandés de maintenir une réserve de quatre à six mois.

Le sous-ministre Stephen Lucas a indiqué que Santé Canada n’avait pas une telle politique. « Nous avons un éventail de stratégies pour limiter les risques de pénurie. Nous continuons d’examiner d’autres stratégies », a-t-il dit.