Québec met la hache dans une série de mesures prises dans les derniers mois pour faire face à l’absentéisme et la pression dans le réseau de la santé, dont la « prime COVID ». Plusieurs autres incitatifs seront également abandonnés dès le 16 avril prochain.

Dans un communiqué, le ministère de la Santé et des Services sociaux (MSSS) affirme que cette décision va « en continuité » avec la levée graduelle des mesures sanitaires, qui doivent en effet prendre fin en bonne partie ce samedi. Le port du masque devrait toutefois demeurer obligatoire jusqu’à la fin du mois de mars au minimum, voire jusqu’à la mi-avril, dans les lieux publics.

Ainsi, dès le 16 avril, la « prime COVID » de 4 % et 8 % prendra fin pour tous les employés du réseau de la santé. Le même jour, les autorités lèveront aussi plusieurs mesures prises dans la foulée de la cinquième vague de la pandémie, dont la rémunération à taux double pour les employés effectuant une prestation de travail en temps supplémentaire et l’octroi d’une somme de 100 $ supplémentaire pour les travailleurs à temps partiel effectuant plus de 30 heures par semaine.

Bon nombre d’incitatifs directs, comme le remboursement des frais de taxi ou le repas gratuit en temps supplémentaire, la rémunération à 150 % pour les cadres en remplacement ou le remboursement des frais de stationnement, seront aussi abandonnés dès la mi-avril.

Le gouvernement Legault mettra aussi fin au versement de 1000 $ qui était offert sur quatre semaines à certains employés, afin de favoriser leur présence au travail. Idem pour la « prime d’assiduité » dans les centres de vaccination et de dépistage, qui était d’environ 1800 $ par mois pour une prestation d’une journée minimale par semaine.

Plusieurs appuis financiers prendront aussi fin le 16 avril dans les ressources intermédiaires ou de type familial (RI-RTF). Dans les résidences privées pour aînés (RPA), un « programme de transition salariale » entrera en vigueur « à la fin de l’état d’urgence sanitaire » pour les établissements comptant moins de 250 unités de logement, afin de maintenir des salaires « compétitifs » pour les infirmières.

Qu’est-ce qui reste en place ?

Certaines mesures demeureront tout de même en place, dont les primes pour récompenser les infirmières qui n’ont pas quitté le réseau, allant de 12 000 $ à 18 000 $ selon la situation, ainsi que des incitatifs pour s’établir en région ou encore l’allocation temporaire pour les cadres œuvrant auprès du personnel infirmier.

La plateforme Je Contribue poursuivra par ailleurs ses activités, dans le but de recruter plus de « bras » dans le réseau de la santé. Les primes pour l’ajout d’un quart de fin de semaine, ou pour un changement de quart de jour vers le soir ou la nuit, seront aussi maintenues « pour le moment », mais devraient être retirées « lorsque la situation le permettra ».

Selon des chiffres fournis vendredi par le MSSS, plus de 5,3 milliards ont été versés en différentes primes et mesures financières prises dans le cadre de l’état d’urgence sanitaire. Les autorités rappellent aussi que plusieurs mesures qui avaient été implantées en janvier, dans la foulée de la cinquième vague, étaient déjà « prévues pour une période de 12 semaines, soit jusqu’au 9 avril 2022 ».

Des syndicats inquiets

Plusieurs syndicats nationaux représentant des employés de la santé ont dit craindre vendredi qu’en agissant trop vite, « le gouvernement accentue une vague de départ dans le réseau et cause une nouvelle multiplication de bris de services ».

« Avant d’aller de l’avant et de mettre fin aux mesures incitatives, le gouvernement doit réfléchir à l’effet que cela aura sur le personnel. Les travailleuses et travailleurs sont à bout de souffle après avoir lutté pendant deux ans contre la pandémie. On a déjà bien du mal à attirer et retenir le personnel dans le réseau », ont fustigé la Fédération de la santé et des services sociaux (FSSS-CSN), la Fédération de la Santé du Québec (FSQ-CSQ), la Fédération interprofessionnelle de la santé du Québec (FIQ), le Syndicat canadien de la fonction publique (SCFP) et plusieurs autres.

La présidente de la FIQ, Julie Bouchard, a aussi déploré l’absence de « mesures transitoires ou pérennes négociées permettant de retenir le personnel soignant et d’attirer la relève dans le réseau ».

« Il est impératif que les sommes investies pendant la pandémie demeurent dans le réseau et soient réinvesties dans les conditions de travail et l’implantation de mesures structurantes, dont l’implantation des ratios sécuritaires. Si le gouvernement souhaite réellement reconstruire le réseau de la santé, il a une opportunité de faire les choses autrement en nous écoutant », a-t-elle ajouté.