(Ottawa) La Société canadienne du sang dit avoir présenté ses excuses à la communauté 2SLGBTQIA+ « pour les préjudices qu’ont causés d’anciens critères d’admissibilité des donneurs ».

Jusqu’en 2022, les anciens critères interdisaient aux hommes sexuellement actifs ayant des relations sexuelles avec d’autres hommes, ainsi que certaines personnes trans, de donner du sang ou du plasma.

Depuis la fin de cet interdit, la Société canadienne du sang pose à tous les donneurs des questions sur leur comportement sexuel.

L’organisme mentionne que Graham Sher, chef de la direction de la Société canadienne du sang, a présenté les excuses en personne aux membres de la communauté 2SLGBTQIA+ lors d’un évènement qui s’est déroulé vendredi à son siège social, à Ottawa.

Le docteur Sher a indiqué que l’organisme regrettait « que cette politique ait contribué à la discrimination, à l’homophobie, à la transphobie et à la stigmatisation liée au VIH ».

Lors d’une conférence de presse l’après-midi, M. Sher a déclaré que les excuses s’adressaient à ceux qui n’avaient pas été autorisés à faire un don, à la communauté LGBTQ+ au sens large et aux employés de la Société canadienne du sang, y compris ceux qui ont été mis dans la position de devoir défendre la politique auprès de leur propre communauté.

« C’est un objectif sur lequel nous, à la Société canadienne du sang, travaillons depuis de nombreuses années maintenant, et que de nombreux membres de la communauté [LGBTQ “] attendent depuis longtemps », a-t-il affirmé.

Egale Canada, qui faisait partie du comité consultatif LGBTQ+ de la Société canadienne du sang, a dit vendredi que les excuses constituaient un moment historique, mais attendu depuis longtemps. Le groupe a indiqué dans un communiqué de presse que cette politique « est née de la peur et de l’ignorance scientifique qui ont prédominé lors de la tragique épidémie de sida et de la crise du sang contaminé des années 1980 ».

« Egale déclare depuis longtemps que c’est faux et plaide pour la reconnaissance du fait que l’identité d’une personne ne l’expose pas à un plus grand risque d’infection sexuellement transmissible, mais que c’est plutôt son comportement qui détermine son risque. »

Graham Sher a fait savoir qu’environ 100 personnes étaient présentes à l’évènement pour assister aux excuses en personne, y compris des membres du comité consultatif LGBTQ+ de l’organisation.

Un porte-parole a indiqué que parmi les participants figuraient des représentants des organisations municipales de la Fierté, des réseaux nationaux d’emploi LGBTQ+, des organisations axées sur le VIH et le sida et des centres de santé pour les personnes trans et non binaires.

Le gouvernement libéral fédéral a promis pour la première fois de lever l’interdiction lors de la campagne électorale de 2015, mais il a fallu des années et des recherches d’une valeur de 5 millions avant que la nouvelle politique ne soit recommandée à Santé Canada.

Un pas en avant pas encore suffisant pour certains

Les premiers changements apportés à la politique permettaient aux hommes ayant des rapports sexuels avec d’autres hommes de donner du sang s’ils n’avaient pas été sexuellement actifs pendant un certain temps – en commençant par cinq ans, puis en réduisant progressivement jusqu’à trois mois.

La politique a été entièrement abandonnée en 2022. Dans le cadre de sa politique actuelle, l’organisation demande à tous les donneurs s’ils ont eu de nouveaux ou plusieurs partenaires sexuels au cours des trois derniers mois. Ceux qui déclarent avoir eu des relations sexuelles anales avec un nouveau partenaire ou plusieurs partenaires sexuels doivent attendre trois mois avant de faire un don.

Les défenseurs affirment que les nouvelles règles sont toujours discriminatoires. Christopher Karas, qui conteste la politique actuelle devant le Tribunal canadien des droits de la personne, a affirmé que même si elle est désormais « quelque peu neutre en matière de genre », elle a toujours un effet négatif sur les hommes qui ont des rapports sexuels avec des hommes.

Egale a reconnu que la politique a « un impact disproportionné et continu sur les hommes queers ». Au moment des excuses vendredi, M. Karas a fait savoir qu’il participait à une conférence téléphonique avec Santé Canada concernant sa contestation de la politique. C’est une expérience qu’il a qualifiée de « douce-amère ».

Il a stipulé que les règles devraient s’appliquer à tous les donneurs de la même manière, ce qui signifie que toute personne ayant eu des relations sexuelles avec deux partenaires ou plus ne pourra pas faire de don pendant trois mois. « Et bien sûr que cela évolue en fonction de la science. » Egale a déclaré qu’il existe également d’autres domaines à améliorer, notamment les politiques exigeant que les donneurs non binaires s’inscrivent en tant qu’homme ou femme.

L’organisme exige aussi que les personnes qui utilisent le médicament PrEP attendent quatre mois avant de faire un don. La PrEP réduit le risque d’infection par le VIH.

M. Sher a déclaré que des recherches sont en cours pour tenter de comprendre la pharmacologie de la PrEP et la capacité des tests à détecter le VIH chez les donneurs qui prennent le médicament. Il a enchaîné en disant que l’organisation travaille sur un certain nombre d’initiatives pour surmonter les obstacles rencontrés par « certaines personnes trans qui ne peuvent actuellement pas donner parce que nos systèmes ne sont pas encore optimisés ».