(Québec) L’encre n’est pas encore sèche sur leur nouveau contrat de travail que François Legault ouvre la porte à une nouvelle bonification de la rémunération des infirmières. Le premier ministre s’est même dit prêt à offrir les mêmes conditions qu’au privé. Une visée qui doit passer par la fin du temps supplémentaire obligatoire, selon les syndicats.

Le premier ministre a dit travailler « jour et nuit » pour trouver des solutions afin de recruter des infirmières dans le réseau de la santé, fragilisée par une pénurie de main-d’œuvre. Il manque au moins 4000 infirmières dans le réseau actuellement, selon le gouvernement. Quelque 2887 travailleurs de la santé sont aussi absents du réseau pour des raisons liées à la COVID-19.

Le gouvernement a dans sa ligne de mire de ramener les travailleurs qui ont quitté le réseau public pour le privé afin de profiter de conditions de travail plus intéressantes.

« Toutes les infirmières qui travaillent au privé sont les bienvenues. S’il faut être capable d’offrir les mêmes conditions, je suis prêt à offrir les mêmes conditions », a lancé M. Legault en mêlée de presse.

« Évidemment, ça suppose de payer tout le monde à ces salaires-là. Donc, ce qu’on regarde actuellement, ce n’est pas seulement pour bonifier la rémunération des infirmières qui viendraient s’ajouter au réseau public, mais s’assurer aussi de payer mieux celles qui sont déjà dans le public, au moins d’une façon temporaire, pour arrêter l’exode », a-t-il expliqué.

Québec et la Fédération interprofessionnelle de la santé du Québec (FIQ) viennent pourtant de s’entendre sur un nouveau contrat de travail d’une durée de trois ans qui sera en vigueur jusqu’au 31 mars 2023 ; il a été entériné au terme de plus de 18 mois de négociations.

« Nous, on pensait, avec les négociations qu’on a faites et la nouvelle convention avec la FIQ, que ça règlerait le problème, mais ç’a réglé seulement une partie du problème », a admis M. Legault.

Le ministre du Travail, Jean Boulet, a indiqué mercredi qu’il est toujours possible de négocier des ententes avec les syndicats malgré la signature d’un contrat de travail. Ce à quoi la présidente de la FIQ, Nancy Bédard, s’est dite ouverte lors d’une entrevue.

« S’il est sérieux et qu’il connaît bien [les raisons] pourquoi les gens sont partis, bien la raison première c’est le temps supplémentaire obligatoire (TSO) et la non-capacité de savoir que tu peux quitter après ton quart de travail […] Je me serais attendue qu’il les nomme aujourd’hui », a-t-elle expliqué. Mme Bédard salue néanmoins l’ouverture du premier ministre à trouver des solutions pour freiner l’exode.

« Le premier ministre vient d’avoir un éveil, ç’a été beaucoup trop long […], mais je me dis qu’il faut tout prendre. Mais, de son pouvoir il peut dire à son ministère et ses [établissements] de bâtir des conditions de travail qui soient les mêmes que dans le privé. Ça va prendre une demi-journée, on a notre liste ça fait longtemps. On sait c’est quoi les conditions dans le privé », a-t-elle ajouté.

La Fédération de la santé et des services sociaux (FSSS-CSN) et la Fédération de la Santé du Québec (FSQ-CSQ) demandent aussi au gouvernement d’agir « pour une meilleure conciliation travail-famille, pour mettre fin au TSO, pour contrer la surcharge de travail et pour agir sur l’instabilité des postes et des horaires ».

Au Salon bleu, le ministre de la Santé, Christian Dubé, a affirmé qu’avec l’entente conclue avec la FIQ, « on va avoir une diminution du TSO, on va avoir une diminution des agences de placement. »

Des incitatifs à venir

Le gouvernement présentera au cours des prochains jours une série d’incitatifs pour recruter et attirer des infirmières dans le réseau. M. Legault a évoqué des bonis à l’entrée pour quelqu’un qui reviendrait dans le réseau et le maintien de la pension d’une infirmière à la retraite malgré un retour un travail. « Certains vont dire, c’est comme deux salaires, mais en même temps, c’est tellement urgent », a-t-il dit.

Le premier ministre a aussi mentionné la possibilité d’augmenter les primes COVID en place. Selon lui, la solution passe aussi par une réorganisation des services. Au sujet des projets ratios, M. Legault a affirmé qu’il avait accepté, dans sa négociation avec la FIQ, d’ajouter des projets de la sorte, mais que plusieurs postes ne sont toujours pas comblés.

La situation dans les hôpitaux du Québec, après 18 mois de pandémie, est « trop urgente », selon M. Legault. Mardi, le ministre Dubé a affirmé que des ruptures de services et des activités de délestage sont en vue pour l’automne devant l’ampleur du problème.