(Toronto) Le Collège des médecins et chirurgiens de l’Ontario a révoqué le permis d’un spécialiste de la fertilité d’Ottawa qui avait utilisé son propre sperme ainsi que celui de mauvais donneurs pour inséminer artificiellement plusieurs femmes, sur une période de 30 ans.

Le comité de discipline du Collège a conclu mardi que le docteur Bernard Norman Barwin, aujourd’hui âgé de 80 ans, avait commis une faute professionnelle et qu’il n’avait pas respecté les normes de la profession. Les avocats du Collège ont alors demandé au comité de discipline de révoquer le permis du docteur Barwin, seule sanction appropriée selon eux pour un abus de confiance aussi révoltant. Le comité a ensuite révoqué effectivement le permis de pratique, ce qui signifie que les autres ordres professionnels au pays seraient alertés si M. Barwin tentait d’exercer la médecine ailleurs.

Un exposé non contesté des faits, lu devant le comité de discipline mardi matin, a relaté une quinzaine de cas de patientes qui affirment avoir subi un préjudice irréparable. L’octogénaire, qui n’assistait pas à l’audience, n’a pas contesté les allégations, par l’intermédiaire de son avocat.

Une procureure du Collège a plaidé devant le comité que cette affaire était sans précédent dans les annales de l’ordre professionnel. « Les patientes du docteur Barwin et leur famille ont été les victimes inconscientes de son incompréhensible tromperie », qui l’a vu contredire leurs directives spécifiques sans leur consentement, a déclaré Me Carolyn Silver.

Certaines patientes ont découvert que leurs enfants étaient demi-frères et demi-sœurs, alors que les parents avaient expressément demandé que le même donneur soit utilisé pour les deux inséminations, selon l’exposé des faits. Plusieurs pères ont aussi appris que l’enfant qu’ils avaient élevé n’était pas biologiquement le leur, alors qu’ils étaient eux-mêmes donneurs.

Déjà sanctionné par le Collège

Rebecca Dixon, qui a renoncé à la protection d’une ordonnance de non-publication, a découvert il y a trois ans que son père biologique est le docteur Barwin, et non l’homme qui l’a élevée. « À partir de ce jour-là, ma vie a changé pour toujours », a-t-elle déclaré au comité.

Une femme qui ne peut être identifiée a dit qu’elle avait appris récemment que sa fille, aujourd’hui adolescente, avait été conçue avec le sperme d’un donneur inconnu plutôt que celui de son propre mari. Elle n’a pas encore annoncé la nouvelle à sa fille, craignant le choc à cet âge aussi critique, a-t-elle déclaré devant le comité. « Je me sens sale, presque comme si j’avais été violée. »

Le docteur Barwin avait déjà été sanctionné pour avoir inséminé artificiellement plusieurs femmes avec le mauvais sperme, mais pas nécessairement le sien ; il avait reconnu sa faute professionnelle lors d’une comparution devant le Collège en 2013. À l’époque, M. Barwin avait reconnu que trois patientes avaient eu un enfant dont le père biologique n’était pas celui qu’elles avaient choisi. Le Collège avait alors suspendu son permis de pratique pour deux mois, et le docteur Barwin n’a pas souscrit à son permis l’année suivante.

M. Barwin devait maintenant faire face à de nouvelles allégations d’incompétence, de non-respect des normes d’exercice de la profession et de comportement déshonorant ou peu professionnel. L’ex-médecin pourrait aussi devoir faire face à une action collective : des patientes allèguent que plus de 50 enfants ont été conçus avec le mauvais sperme, dont 11 avec celui du médecin. L’action collective n’a pas encore été autorisée par un tribunal.