Les chirurgiens en transplantation n'auront plus besoin d'assumer avec leur voiture personnelle le transport des organes provenant d'un donneur vivant au Québec. L'organisme Transplant Québec a conclu un partenariat avec l'Association canadienne des dons d'organes (ACDO) afin que ce type de transport soit désormais encadré par des policiers bénévoles au même titre que pour les organes d'un donneur cadavérique.

Dans un dossier publié samedi dernier sur le combat de deux fillettes pour obtenir un rein, La Presse a suivi le trajet du chirurgien en transplantation, le Dr Prosanto Chaudhury, de l'Hôpital général de Montréal à l'Hôpital de Montréal pour enfants, qui a acheminé lui-même, sans escorte policière, le rein du père de la petite Axelle au bloc opératoire (lapresse.ca/rein). Il a expliqué que c'était la procédure habituelle et que c'était le moyen le moins cher pour les établissements de santé.

Désormais, les spécialistes en transplantation comme le Dr Chaudhury n'auront qu'à prendre contact avec Transplant Québec qui s'occupera de coordonner les transports de reins ou de lobes de foie avec l'ACDO, a-t-on appris. Cette association, très présente dans les autres provinces, dispose d'un parc de 11 véhicules d'urgence médicale. L'organisme a même accès au tarmac de l'aéroport Montréal-Trudeau pour transporter des coeurs ou d'autres organes provenant de l'extérieur quand c'est urgent.

Transplant Québec, que La Presse a informé de l'absence d'escorte policière lors du transport du rein pour Axelle, précise que les transports d'organes de donneurs vivants sont plutôt rares, mais l'organisme a quand même désigné un coordonnateur qui fera le pont entre les hôpitaux et l'ACDO. «Toutes les directions des établissements de santé concernés ont été avisées du processus à suivre», a soutenu Brigitte Junius, porte-parole de Transplant Québec.

Hausse des demandes de transport

Cet organisme, mandaté par le gouvernement pour gérer les listes des donneurs en attente, prévoit une hausse des demandes de transport avec l'inscription récente de la province au Registre de donneurs vivants jumelés par échange de bénéficiaires. Ce registre géré par la Société canadienne du sang permet à des couples donneur-receveur incompatibles, ainsi qu'à des donneurs sans receveur désigné, de se jumeler à quelqu'un de compatible, prêt à donner. Jusqu'à maintenant, 75 greffes ont été réalisées grâce à ce registre, et un couplage a permis une transplantation de rein dans la région de Sherbrooke.

Malgré tous les efforts pour promouvoir le don d'organes, le Québec demeure bon dernier en la matière, surtout en ce qui concerne les organes d'un donneur vivant. Le président-fondateur de l'ACDO, Richard Tremblay, parle même d'une stagnation.

«Plusieurs facteurs expliquent le phénomène, estime M. Tremblay. Premièrement, on n'a pas 30 millions d'habitants au Québec, et ce n'est pas tout le monde qui peut être donneur. Mais au-delà de ça, il y a aussi les hôpitaux qui peinent à tenir le rythme. Ce n'est pas facile d'avoir du temps en bloc opératoire, et les donneurs - morts ou vivants - nécessitent autant de temps qu'une personne aux soins intensifs.»

L'an dernier, le ministère de la Santé a tenté un rattrapage sur les autres provinces en lançant un programme de compensations financières de certaines dépenses pour les donneurs vivants. Jusqu'à maintenant, Transplant Québec a géré 25 demandes. Le programme de dernier recours couvre certaines dépenses liées aux déplacements, à l'hébergement et aux repas. À Québec, Natasha Boudreau, attachée de presse du ministre de la Santé, Yves Bolduc, a indiqué qu'il n'est pas prévu de le bonifier. De même, on ne prévoit pas de modifier les règles pour inciter davantage les gens à signer et à apposer l'autocollant au verso de leur carte d'assurance maladie.

Au Québec, environ 10% des organes transplantés proviennent de donneurs vivants. Cette proportion est de 25% et plus pour l'ensemble du Canada. En 2010, cette proportion était de 6,3 DPMH (donneurs par million d'habitants), comparativement à une moyenne canadienne de 15,4 DPMH pour 2009. Source: Institut canadien d'information sur la santé