Le commissaire de l'Unité permanente anticorruption (UPAC), Robert Lafrenière, a sorti l'artillerie lourde mardi pour défendre son intégrité, l'unité de son organisation et assurer que personne ne sera épargné par ses enquêtes. De «beaux dossiers» devraient même aboutir prochainement, assure son équipe.

Robert Lafrenière a tenu une conférence de presse accompagné de son directeur des opérations, Gilles Martin, du responsable de l'escouade Marteau, Denis Morin, et des représentants de Revenu Québec, de la Régie du bâtiment et du ministère des Affaires municipales.

Cette sortie publique survient après des enquêtes de La Presse qui ont mis en lumière, au cours des dernières semaines, des malaises au sein de l'UPAC. Trois enquêteurs ont notamment démissionné. Ces reportages n'ont aucun intérêt public, croit le patron de l'UPAC.

«On nous distrait. Pendant ce temps, qui en profite? Eh bien, ce sont les corrupteurs et les fraudeurs», s'est offusqué Robert Lafrenière.

Celui-ci a invité les sources des médias qui sont frustrées à lui parler avant de se plaindre aux journalistes. Il attribue ces fuites à des «décisions de gestion qui n'ont pas été populaires» auprès de gens «qui se vengent» désormais alors qu'ils ont prêté un serment de confidentialité, a-t-il rappelé. Il croit aussi que, dans certains cas, il puisse s'agir de mauvais jugements de la part de «gars de terrain» qui ne peuvent pas «tout voir».

À l'interne, à l'UPAC, on va plus loin sous le couvert de l'anonymat. «C'est une game qui se joue pour discréditer Lafrenière. Est-ce que cela sert [Jacques] Duchesneau, qui voulait le job?», se demande une source qui indique aussi que Robert Lafrenière n'en peut plus de ces «guéguerres». On souligne également que l'un des démissionnaires, Régent Bélanger, était très proche de M. Duchesneau.

Chose certaine, la situation à l'UPAC n'inquiète pas le ministre de la Sécurité publique, Robert Dutil. Il estime que l'UPAC est «en période de rodage» et qu'il peut y avoir «des périodes plus difficiles» dans ce contexte.

«Aucun dossier n'est exclu»

Au cours du point de presse tenu mardi, Robert Lafrenière a aussi nié que des dossiers puissent être mis de côté ou que ses enquêteurs, surtout ceux de Marteau, soient orientés sur des pistes de moindre envergure, par exemple vers le municipal. «Aucun dossier n'est exclu, tassé ou discarté, a-t-il réagi. Personne n'est à l'abri.» Des accusations qualifiées de «très graves» et qui «mettent [son] intégrité en jeu». «C'est faux», a-t-il martelé.

Robert Lafrenière convient qu'il savait dès le départ que ce serait un immense «défi de gestion» de faire travailler ensemble près de 170 personnes provenant de différents milieux. «Nous cohabitons depuis le 3 octobre. On apprend à travailler ensemble, ce sont des cultures différentes. Ceux qui ont vécu les escouades régionales mixtes et les partenariats entre policiers savent que c'est déjà difficile de marier des gens issus de plusieurs corps policiers, alors vous imaginez ce que représente de mixer des organismes, des ministères, des policiers, des enquêteurs. Je ne dis pas que c'est parfait, mais ça va de mieux en mieux.»

Le commissaire a été encore plus piqué au vif et «fâché» par les questions sur son indépendance et sur ses liens familiaux avec le pouvoir. En particulier parce que son frère fait partie de l'équipe de sécurité du bureau du premier ministre, et que sa fille est la conjointe d'un sous-ministre de la Sécurité publique.

«J'ai 40 ans de sécurité publique, d'intégrité et de crédibilité sous différents gouvernements, et je ne les remettrai jamais en jeu pour un dossier. [...] Je suis capable de mettre un mur de Chine entre mes activités professionnelles et ma vie privée.»

Quant aux reproches concernant ses «amis» et ex-collègues de la Sûreté du Québec qui monopolisent les postes clés de son organisation, il a eu cette réponse: «Moi, c'est toujours le meilleur homme à la meilleure place.»

Quant à lui, l'inspecteur Denis Morin, chef de l'escouade Marteau, a affirmé que «l'ambiance est excellente» dans son unité et demandé au public d'être patient. «De beaux dossiers s'en viennent. Ce sont des dossiers très complexes, certains ont plus d'envergure que d'autres», a-t-il indiqué, en évoquant les cas des compteurs d'eau et du Faubourg Contrecoeur, à Montréal.