Les militants adéquistes ont devancé au 18 octobre l'élection de leur prochain chef même si des membres de l'état-major les ont prévenus que le parti n'a pas les moyens de précipiter sa campagne à la direction.

Lors d'un débat en plénière au conseil général de l'ADQ, hier, l'ex-leader parlementaire Sébastien Proulx a lancé un sévère avertissement aux 400 militants qui devaient entériner les règles de l'élection proposées par le conseil de direction: «Notre parti n'a pas le membership nécessaire, n'a pas l'argent nécessaire, n'attire pas suffisamment de nouvelles personnes pour faire une course nationale», a-t-il dit en substance. Il faisait partie du comité qui avait recommandé au conseil de direction de tenir l'élection du chef en février 2010. Le conseil avait accepté cette proposition en mars dernier.M. Proulx croit que l'ADQ doit offrir à son prochain chef un parti «équipé pour aller à la guerre» après son élection, ce qui sera difficile, selon lui, si le scrutin est devancé. Comme une bonne partie de la campagne aurait lieu en plein été, les candidats auront du mal à se faire connaître et à séduire l'électorat, a-t-il dit.

Janvier Grondin, député de Beauce-Nord, a souligné pour sa part que le conseil de direction, dont il fait partie, a mûrement réfléchi sa décision. Les élections municipales, début novembre, risquent de porter ombrage à la campagne adéquiste si elle est devancée, a-t-il ajouté.

Patrick Robitaille, organisateur et ancien directeur général de l'ADQ, a dit craindre qu'«on n'ait pas le temps de faire le tour du Québec, d'aller rencontrer les gens, de faire une campagne convenablement». Marc-André Gravel, membre du comité qui a recommandé l'élection en février 2010, a prévenu les militants qu'ils ne devaient pas voter «en fonction des intérêts des candidats» - tous en faveur d'un scrutin automnal - «mais en fonction de l'intérêt unique du parti».

Le chef fondateur de l'ADQ, Jean Allaire, a toutefois servi des arguments qui ont convaincu les militants d'opter pour une élection le 18 octobre: «Lorsqu'il n'y a pas de chef permanent, il y a un flottement, une attente dans la population et dans le parti. Je trouve que ce serait mauvais pour le parti, et pour le Québec également, d'avoir un chef qui est nommé seulement en février.»

Après le vote en faveur d'un scrutin le 18 octobre, Sébastien Proulx a indiqué que les militants devraient «travailler plus fort» pour faire de la campagne une réussite. «Est-ce que ça donnera les résultats? On verra. (La décision des militants) rend l'exercice beaucoup plus difficile.»

En conférence de presse, le président de l'ADQ, Mario Charpentier, a cherché à se faire rassurant sur la capacité du parti de mener à bien la campagne à la direction, bien qu'il ne compte plus que 12 000 membres, a-t-il toutefois reconnu.

Selon les nouvelles règles, les personnes intéressées à briguer la succession de Mario Dumont ont jusqu'au 18 août pour déposer un bulletin de candidature. Le scrutin aura lieu par téléphone du 16 au 18 octobre.

Hier, les trois candidats en lice jusqu'à maintenant - Gilles Taillon, Éric Caire et Christian Lévesque - ont fait leur premier discours officiel devant les militants. Gérard Deltell, député de Chauveau et ex-reporter de TQS, annoncera cette semaine s'il se porte candidat. Le nouveau sénateur conservateur Leo Housakos, spécialiste du financement à l'ADQ, l'a assuré de son soutien. Questionné par les journalistes à ce sujet, M. Deltell a répondu: «Je ne ferai pas état de mes conversations privées.»

Gilles Taillon soupçonne les conservateurs d'Ottawa de vouloir «prendre le contrôle» de la course à la direction. «Je suis inquiet. On entend des bruits à ce sujet. On espère bien que nos amis les conservateurs vont comprendre que l'ADQ est un parti autonomiste et veut travailler dans le respect de ses idées», a affirmé l'ancien numéro 2 de l'ADQ.

Comme plusieurs militants, M. Taillon estime que le parti joue son avenir avec cette campagne à la direction. «C'est une question de vie ou de mort pour l'ADQ.»