Pour adopter en vitesse la loi forçant le retour au travail des employés de Postes Canada, les députés fédéraux doivent s'attendre à siéger vendredi, le jour de la Fête nationale du Québec, et même au cours de la fin de semaine s'il n'en tient qu'au gouvernement.

Deux stratégies s'opposent à Ottawa: Stephen Harper veut faire adopter son projet de loi le plus rapidement possible, mais l'opposition officielle néo-démocrate veut retarder le processus législatif, pour permettre à Postes Canada et à ses employés de trouver eux-mêmes un terrain d'entente.

Une possibilité qui semble de plus en plus improbable, puisque la société d'État a annoncé, mercredi soir, qu'elle et le Syndicat des travailleurs et travailleuses des postes (STTP) n'étaient pas parvenus à conclure une entente. Les pourparlers entre les deux parties sont rompus, a indiqué Postes Canada.

Un peu plus tôt, mercredi, le gouvernement avait déposé une motion pour obliger les parlementaires à siéger de façon continue, sans arrêt, jusqu'à ce que leur loi de retour au travail soit adoptée. Le débat au Parlement va commencer jeudi. Selon le leader du gouvernement en Chambre, Peter Van Loan, le débat pourrait aussi se terminer jeudi, au pire vendredi le 24 juin, si les «partis d'opposition coopèrent» et ne tentent pas de faire obstruction.

Le hic est que le 24 juin est une journée fériée sur la colline parlementaire. Et le Parlement devait fermer pour l'été dès jeudi soir.

Le sénateur conservateur Claude Carignan, qui accompagnait M. Van Loan lors d'un point de presse mercredi, ne s'est pas ému de voir les députés québécois siéger le jour de leur fête nationale, le 24 juin.

Selon lui, il est possible de garder les députés à Ottawa plus longtemps. Il serait plus important d'adopter cette loi dès que possible, car l'arrêt des services postaux cause des dommages importants à l'économie canadienne et des inconvénients sérieux aux citoyens, a-t-il expliqué.

Il a souligné que de nombreuses autres personnes travaillent le jour de la Fête nationale du Québec, comme les infirmières et les policiers.

«Ce n'est pas notre premier choix, mais si c'est ce qu'il faut faire pour s'assurer que le service postal reprenne le plus rapidement possible, c'est ce qu'on fera», a ajouté le sénateur.

Interrogé en Chambre par le chef néo-démocrate Jack Layton, mercredi, à savoir s'il allait ordonner que soient suspendus les travaux le 24 juin pour respecter la Fête nationale, le premier ministre Stephen Harper ne s'est pas prononcé.

Il s'est contenté de souligner qu'il était toujours possible d'adopter le projet de loi avant cette date.

«Cette législation est présente pour protéger les intérêts supérieurs de l'économie canadienne, de notre société et de notre population. C'est un choix pour le NPD. Ce gouvernement est prêt à adopter ce projet rapidement avant la Fête nationale. J'encourage les députés du NPD à faire la même chose», a répliqué le premier ministre.

Jack Layton n'était pas impressionné.

«En plus d'attaquer les travailleurs, le gouvernement en rajoute en insultant les Québécois», a-t-il lancé en Chambre.

Le chef intérimaire du Parti libéral, Bob Rae, est du même avis. Il trouve inacceptable que les députés soient empêchés de fêter le Québec.

«On ne siège pas le 1er juillet, je ne vois pas pourquoi on devrait siéger le 24 juin», a-t-il expliqué, soulignant qu'il s'agit d'une journée de célébrations au Québec, mais aussi au Canada français.

Le Parti libéral croit d'ailleurs qu'un compromis est toujours possible. Il a proposé mercredi de modifier le projet de loi pour que les employés retournent au travail -sans menace de lock-out ni de grève- et qu'un arbitre règle les différends.

Cet arbitre n'aurait pas les mains liées comme c'est le cas avec le projet de loi du gouvernement, a avancé M. Rae.

Le projet de loi gouvernemental requiert de l'arbitre désigné de choisir entre la dernière offre patronale et la dernière du syndicat, mais impose certaines conditions de travail, comme des augmentations salariales. Elles seraient inférieures à ce que l'employer avait offert, selon le syndicat.

Mais pour le gouvernement, pas question de modifier le projet de loi pour plaire aux partis d'opposition. La mesure législative est juste pour les employés postaux, a indiqué M. Van Loan mercredi, comme son chef l'avait fait la veille.

«Ça ne me surprend pas», a laissé tomber Bob Rae.

«Avec ce gouvernement, cela a toujours été: «ma façon de faire ou rien du tout»».