(Québec) Le juge en chef de la Cour suprême du Canada, Richard Wagner, fait de la politique lorsqu’il laisse entendre que des élus québécois ont sombré dans la désinformation, estime Paul St-Pierre Plamondon.

En point de presse mardi, le chef du Parti québécois (PQ) a dit trouver « inquiétante » la sortie du juge Wagner, qui ne respecte pas son « devoir de réserve » et fait preuve de « partialité […] contre les positions du Québec », selon lui.

Lundi, le juge Wagner a suggéré que la motion adoptée à l’Assemblée nationale dénonçant l’emploi de l’expression « personne ayant un vagin » dans un jugement de la Cour suprême était « un exemple clair de désinformation ».

Il a reproché aux élus québécois de ne pas avoir lu le jugement en question.

« Je l’avais lu, on l’a lu, on en a discuté, on a fait nos devoirs, et au paragraphe 109, il y a bel et bien l’utilisation de l’expression “personne ayant un vagin”, au lieu de parler d’une femme, et ça ouvre la porte à tout un corpus idéologique », a réagi M. St-Pierre Plamondon.

« Ces affirmations ne sont pas normales de la part du pouvoir judiciaire, qui, en principe, devrait garder un devoir de réserve et ne pas faire de la politique comme il en fait, ce n’est pas son rôle », s’est-il insurgé.

La ministre responsable de la Condition féminine, Martine Biron, qui a fait adopter la motion en mars dernier, acquiesce. « Généralement, chaque pouvoir reste dans son carré », a-t-elle déclaré en mêlée de presse, assurant avoir bien lu le jugement.

« Je voulais émettre une mise en garde sur la façon dont on définit les femmes, a-t-elle expliqué. Moi, j’ai fait mon point là-dessus. Je me rends compte que j’ai été entendue par la Cour suprême, je trouve ça très bien. »

Piège

Pour leur part, le Parti libéral du Québec (PLQ) et Québec solidaire (QS) ont dit regretter d’avoir voté, de manière précipitée, en faveur de la motion de Mme Biron, qui faisait une mauvaise lecture de la situation, selon eux.

La motion demandait notamment que l’Assemblée nationale « réitère l’importance de conserver le mot “femme” et se dissocie de l’utilisation de termes ou de concepts contribuant à invisibiliser les femmes ».

Or, dès le lendemain, des experts ont suggéré que l’Assemblée nationale avait tout faux : la décision de 249 pages de la Cour suprême réaffirme les droits des plaignantes dans les affaires d’agression sexuelle.

Par ailleurs, la formulation « personne ayant un vagin » n’y apparaît qu’une seule fois, au paragraphe 109 très précisément. Le mot « femme », quant à lui, apparaît 67 fois. Il est clair que l’Assemblée nationale a « erré », selon la co-porte-parole de QS par intérim, Christine Labrie.

« La ministre, elle est tombée dans un piège ce jour-là en n’allant pas lire le jugement. Elle a entraîné l’Assemblée nationale dans ce piège », a-t-elle dénoncé. « Si c’était à refaire, on ne voterait pas dans le même sens », a également déclaré le chef intérimaire du PLQ, Marc Tanguay.