(Québec) L’intelligence artificielle (IA) sera de plus en plus utilisée dans les ministères, où plusieurs postes pourraient d’ailleurs disparaître.

C’est ce qu’a déclaré jeudi le ministre de la Cybersécurité et du Numérique, Éric Caire, en conférence de presse à Québec. Il donnait suite au rapport du Conseil de l’innovation déposé le 5 février dernier.

Le rapport « Prêt pour l’IA » recommande de lancer « sans tarder » les travaux qui mèneront à l’adoption d’une loi-cadre dédiée à encadrer le développement et le déploiement de l’IA dans la société.

Même si le gouvernement réfléchit toujours à la façon d’encadrer ce secteur, il déploiera d’ici la fin du printemps trois projets pilotes d’intégration de l’IA, a annoncé M. Caire.

« On va commencer par des projets plus petits qui ne touchent pas des services essentiels, et qui sont à faible risque, jusqu’à ce qu’on ait un encadrement plus formel et surtout, un niveau d’expertise plus important », a-t-il déclaré.

Québec souhaite automatiser le traitement des formulaires d’assurances des fonctionnaires, ainsi que le processus de facturation, en plus de créer un agent conversationnel (chatbot) sur le portail « Données Québec ».

Si le projet pilote est concluant, ce chatbot pourrait apparaître sur d’autres sites gouvernementaux.

C’est que les processus « répétitifs, à faible valeur ajoutée » peuvent être automatisés pour « libérer les employés » qui se consacreront à des tâches « de plus grande valeur », a expliqué Sarah Gagnon-Turcotte, directrice du Centre d’expertise en intelligence artificielle du gouvernement.

PHOTO JACQUES BOISSINOT, LA PRESSE CANADIENNE

Le ministre Caire est intimement lié à ce qu’il qualifiait lui-même l’an dernier de « fiasco » du lancement de SAAQclic.

Par exemple, l’automatisation du processus de facturation pourrait permettre d’économiser 85 jours de travail dans une unité administrative. « Vous pouvez imaginer le potentiel de mise à l’échelle », a-t-elle illustré.

« Moi, j’appelle ça le grand chantier de l’efficience gouvernementale », a déclaré le ministre Caire, qui avait été critiqué l’an dernier pour ce qu’il qualifiait lui-même de « fiasco » à la Société de l’assurance automobile du Québec (SAAQ).

Au plus fort de la crise, les files d’attente s’allongeaient dans plusieurs points de services de la SAAQ en raison de la transition vers le système informatique SAAQclic, qui a connu des difficultés techniques.

« Je comprends que SAAQclic a frappé l’imaginaire, s’est défendu M. Caire, jeudi. Je suis tout à fait conscient du dommage réputationnel que cette histoire-là a causé au gouvernement du Québec.

« Mais, ce que je veux dire aux citoyens, c’est que le gouvernement du Québec, quand on regarde l’ensemble de ce qui s’y fait, a fait la démonstration qu’il est tout à fait capable de livrer des projets d’envergure », a-t-il ajouté.

Selon lui, 315 projets en ressources informationnelles ont été livrés en 2023-2024, contre 218 l’année précédente.

5000 postes

Le recours à l’IA risque d’entraîner une « diminution des postes », reconnaît Éric Caire, qui y voit même une façon pour la Coalition avenir Québec (CAQ) de remplir sa promesse électorale de 2018 de couper 5000 postes dans la fonction publique.

Six ans plus tard, le gouvernement de la CAQ n’a toujours pas atteint cet objectif.

« C’est certain que l’intégration de l’IA, ça va bouleverser le portrait du travail au Québec et au gouvernement du Québec », a prévenu M. Caire, jeudi.

« Vous le savez, c’est une promesse de notre gouvernement de réduire la taille de l’État de 5000 postes. On pense que dans les prochaines années, c’est 20 000 départs à la retraite qu’il va y avoir.

« On est tout à fait capable de concilier l’intégration de l’IA, notre capacité à accompagner nos employés dans cette transition-là de façon respectueuse […] et, par l’attrition, diminuer le nombre de postes selon la promesse que nous avons faite », a-t-il soutenu.

Si la réduction du nombre de postes de fonctionnaires « peut faire partie des conséquences » du chantier de l’IA, « ce n’est pas l’objectif principal », a nuancé M. Caire.

Il est par ailleurs possible, selon lui, de réduire la taille de l’État grâce à l’IA sans nuire à la prestation des services publics.