(Longueuil) Reconnaissant que les embûches bureaucratiques retardent la construction d’habitations alors que les besoins sont criants, Québec et Ottawa assurent qu’ils vont trouver des façons d’accélérer les démarches des constructeurs et des organismes qui font du logement social.

« On veut permettre aux municipalités, quand il y a un projet d’habitation, de sauter plusieurs étapes », a expliqué jeudi la ministre québécoise de l’Habitation, France-Élaine Duranceau, en parlant des amendements déposés à son projet de loi 31, actuellement à l’étude.

PHOTO JACQUES BOISSINOT, ARCHIVES LA PRESSE CANADIENNE

France-Élaine Duranceau

Bien sûr, des consultations publiques seront toujours requises, mais après, tout le processus de comités à l’intérieur de la ville peut être écourté. On pense que c’est une mesure très efficace qui va permettre dans certaines villes de [gagner] jusqu’à un mois, en sautant par-dessus des étapes comme le CCU [comité consultatif d’urbanisme] ou les comités de démolition.

France-Élaine Duranceau, ministre québécoise de l’Habitation

La ministre France-Élaine Duranceau participait, avec le premier ministre du Québec François Legault, le premier ministre du Canada Justin Trudeau, le ministre fédéral du Logement Sean Fraser et la mairesse de Longueuil Catherine Fournier, à une conférence de presse à Longueuil, au cours de laquelle Québec et Ottawa ont confirmé leur entente, qui prévoit des fonds de 1,8 milliard, provenant à parts égales des deux ordres de gouvernement, pour financer la construction de 8000 logements sociaux et abordables dans la province au cours des quatre prochaines années.

Pour y arriver, il faut accélérer les processus d’approbation des projets résidentiels, ont insisté les élus.

Dans l’attribution des fonds annoncés, « on va travailler avec les villes qui sont les plus déterminées à faire avancer les choses rapidement, où on sent que ça bouge et que la bureaucratie est en train de s’amoindrir », a indiqué Mme Duranceau.

Les constructeurs déplorent que, dans plusieurs villes et arrondissements montréalais, les délais de délivrance des permis de construction s’allongent, ce qui retarde les mises en chantier.

À Longueuil, obtenir un permis de construction peut prendre 6 à 12 mois, reconnaît la Ville. Une fois la demande déposée, il faut cinq à six mois avant qu’un dossier soit attribué à un employé. « Il faut ensuite ajouter le temps d’analyse qui peut prendre deux, trois mois. Enfin, il faut ajouter le temps requis aux instances décisionnelles (CCU et conseil d’arrondissement) », écrit Raphaël Larocque-Cyr, responsable des relations avec les médias, en réponse aux questions de La Presse.

PHOTO MARCO CAMPANOZZI, ARCHIVES LA PRESSE

La mairesse de Longueuil, Catherine Fournier

Un entrepreneur témoigne, sous le couvert de l’anonymat, avoir dû attendre jusqu’à deux ans avant d’avoir le droit de construire des logements à Longueuil, alors que le projet nécessitait en plus un permis de démolition.

Un autre indique que sa demande n’avance pas depuis plusieurs mois en raison de l’absence de l’employé qui l’avait prise en charge. En réponse à ses interrogations, la Ville lui a répondu qu’elle se donnait jusqu’à 24 mois pour délivrer un permis.

« La réglementation prévoit qu’on demande énormément de documents aux promoteurs », a convenu Catherine Fournier, jeudi.

Délivrer un permis de construction prend 25 jours en moyenne quand on a tous les documents. Mais c’est vrai que ça peut être très long, très fastidieux pour les promoteurs. On est en train de les rencontrer pour voir comment on peut dénouer certaines problématiques.

Catherine Fournier, mairesse de Longueuil

Des règlements municipaux se sont ajoutés avec les années, note-t-elle. « On a 1800 zonages différents à Longueuil à l’heure actuelle, en raison des fusions et défusions de villes qui ont ajouté beaucoup de bureaucratie, alors on est en train d’en faire la révision. »

Les élus municipaux devront décider s’ils veulent ou non se prévaloir des nouvelles mesures provinciales pour alléger leur bureaucratie, dit France-Élaine Duranceau. « Cette mesure vient donner le pouvoir concret aux villes d’agir et de faire débloquer les unités », souligne-t-elle.

« Quand on a regardé comment régler la crise du logement à travers le pays, on a entendu directement des développeurs, des maires, des provinces, nous dire qu’on devait accélérer la densification, changer les règles de zonages, accélérer les processus de permis », témoigne Justin Trudeau, incitant les municipalités à « accélérer leur paperasse et améliorer leurs règlements de zonage ».