(Ottawa) Le premier ministre Trudeau appuie l’idée de « pauses humanitaires » – à ne pas confondre avec « trêve humanitaire », a insisté son bureau – entre Israël et le Hamas. Pas question, cependant, de réclamer un cessez-le-feu, a-t-il spécifié.

« On doit rester ancrés sur la priorité de protéger les innocents, de libérer les otages […] et on est ouvert et on appuie l’idée de pauses humanitaires pour permettre l’accès à des ressources nécessaires pour les civils », a-t-il déclaré à l’entrée de la période des questions, mardi après-midi.

« Pas de cessez-le-feu », a-t-il spécifié avant de s’engouffrer dans la Chambre des communes.

Le bureau du premier ministre a par la suite insisté sur le fait que cette position n’était pas la même que celle de pays européens – l’Élysée a évoqué « une trêve humanitaire », bien que le président français Emmanuel Macron n’a pas repris ces mots lors de son passage en Israël, mardi.

Le terme « pauses » est celui qu’ont employé les États-Unis. « Des pauses dans les opérations sont un outil, une tactique, qui peuvent parvenir [à protéger les civils] pour une période temporaire », a déclaré mardi le porte-parole du Conseil de sécurité nationale de la Maison-Blanche, John Kirby.

Un cessez-le-feu, « à ce stade-ci, ne bénéficierait qu’au Hamas », a-t-il aussi fait valoir.

Dans les couloirs du parlement d’Ottawa, le ministre de la Défense Bill Blair a manifesté son opposition lui aussi.

PHOTO JUSTIN TANG, LA PRESSE CANADIENNE

Le ministre de la Défense nationale, Bill Blair

Je ne m’attends pas à ce qu’une organisation terroriste respecte le droit international ou tout appel au cessez-le-feu.

Bill Blair, ministre de la Défense nationale

Et ultimement, le « Hamas doit être éliminé », parce qu’il représente « une menace pas seulement pour Israël, mais pour le monde entier », a asséné M. Blair. Il s’agit de la prise de position la plus musclée d’un ministre du gouvernement Trudeau.

Les conservateurs favorables à des pauses

L’opposition conservatrice a approuvé mardi l’idée d’interruptions temporaires des activités militaires.

« Nous soutenons les pauses temporaires pour ces raisons humanitaires, tout en continuant à reconnaître qu’Israël a le droit de se défendre et de prendre des mesures pour éliminer la menace posée par le Hamas. Ces pauses temporaires doivent être respectées par tous », a exprimé le député Michael Chong.

Au Bloc québécois, on plaide en faveur d’un « cessez-le-feu multilatéral et temporaire », à l’image de ce qui a été proposé par les Nations unies. Il n’est donc pas question d’un cessez-le-feu comme celui qu’ont exigé 33 députés, dont 23 libéraux, dans une lettre publiée vendredi dernier.

Le chef bloquiste, Yves-François Blanchet, a accusé Justin Trudeau de manquer de « leadership » puisqu’il ne parvient pas à réconcilier la vingtaine de ses députés qui ont réclamé un cessez-le-feu et les faucons comme le ministre Bill Blair.

PHOTO JUSTIN TANG, LA PRESSE CANADIENNE

Le chef du Bloc québécois, Yves-François Blanchet

Il y a cette lettre-là et, d’un autre côté, il y a le ministre de la Défense [Bill Blair] qui va jusqu’à utiliser un mot assez sévère, [c’est-à-dire] éliminer le Hamas.

Yves-François Blanchet, chef du Bloc québécois, lors d’un point de presse dans le foyer de la Chambre des communes

« Il faut qu’à l’intérieur des caucus, et il faudrait qu’à l’intérieur du Parlement, on soit capable de dégager des consensus », a-t-il poursuivi, se disant davantage à l’aise avec des mots comme « désamorcer, déraciner, rendre inopérationnel » le Hamas.

Le chef néo-démocrate, Jagmeet Singh, est le seul à demander un cessez-le-feu.

Hôpital Ahli Arab : « Israël n’a pas tiré de roquette », dit Trudeau

Le gouvernement canadien a annoncé les conclusions de son analyse tard samedi soir, mais les conservateurs voulaient l’entendre de la bouche du premier ministre : qui est donc responsable de la frappe dans l’enceinte de l’hôpital Ahli Arab, au cœur de la ville de Gaza ?

« J’ai demandé à nos experts de la défense et à nos spécialistes militaires d’analyser des données de source ouverte et classifiées pour en arriver à une conclusion, et la conclusion est que, selon les meilleures preuves dont ils disposent, Israël n’a pas tiré de roquette sur cet hôpital », a répondu Justin Trudeau.

En posant sa question au premier ministre, le chef conservateur, Pierre Poilievre, avait accusé celui-ci d’avoir « amplifié la désinformation à ce sujet la semaine dernière », de s’être ensuite « caché » et d’avoir « refusé de répondre aux questions ».

Avec l’Agence France-Presse