(Québec) Enlever une circonscription à la Gaspésie et une autre dans l’est de Montréal ne passe pas auprès des élus de péninsule et de la métropole. « Déçus » et parfois même en colère, les députés locaux de la Coalition avenir Québec (CAQ) et du Parti québécois (PQ) n’ont pas dit leur dernier mot.

Mardi, la commission de la représentation électorale a présenté un projet de révision de la carte électorale, comme le prévoit la loi, en proposant de retirer une circonscription à la Gaspésie et dans l’est de Montréal pour l’élection de 2026. En contrepartie, elle a aussi proposé d’en ajouter une dans les Basses-Laurentides et une autre en Estrie, en raison du déplacement de la population et du poids démographique. Des consultations publiques et parlementaires se tiendront cet automne sur le sujet.

En point de presse, mercredi, le député péquiste de Matane-Matapédia, Pascal Bérubé, a vivement dénoncé la proposition faite par la commission. Si cette nouvelle carte électorale est mise en place, il aurait sous sa responsabilité 50 municipalités réparties entre deux régions administratives, le Bas-Saint-Laurent et la Gaspésie.

« Un comté ne devrait jamais être sur deux régions administratives. Pour une raison évidente, ce n’est pas les mêmes réseaux en santé, par exemple, pas les mêmes réseaux scolaires. Ça, c’est épouvantable », a-t-il dit.

Selon M. Bérubé, avec une telle réforme, il y aurait deux types de députés à Québec : « ceux qui vont être exténués compte tenu du nombre de kilomètres à faire, de la nature de ce qu’ils auront à faire, qui va être très complexe dans le milieu rural, et ceux qui auront une tâche moins grande en termes de transport ». Il demande au gouvernement de changer la loi pour préserver les circonscriptions actuelles dans les régions.

Les caquistes surpris et déçus

De l’autre côté de la chambre, sur les banquettes gouvernementales, les élus caquistes Stéphane Sainte-Croix (Gaspé) et Catherine Blouin (Bonaventure) sont tout aussi surpris de la proposition faite par la commission de la représentation électorale.

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Stéphane Sainte-Croix, député caquiste de Gaspé

« Il y a des enjeux très particuliers en termes de couverture du territoire, d’un point de vue social, économique, culturel et démographique. Ces enjeux pourraient devenir compliqués par la fusion [qui est proposée] », a dit M. Sainte-Croix.

« C’est certain que c’est un scénario qu’on ne veut pas envisager. On est tous les deux surpris que ce scénario-là soit même envisagé », a renchéri Mme Blouin.

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Catherine Blouin, députée caquiste de Bonaventure

À ce stade-ci, les deux députés affirment qu’il ne faut pas exclure d’autres options, comme celle d’augmenter le nombre d’élus qui siègent au Parlement, afin de préserver les circonscriptions régionales. Par ailleurs, la nouvelle configuration du Salon bleu, qui se refera une beauté cet hiver dans le cadre d’importants travaux de rénovation, prévoit une capacité élargie à 129 bureaux assis, plutôt que les 125 actuels.

Or, en mêlée de presse à New York, le premier ministre François Legault a affirmé qu’il n’est pas question pour l’instant de revoir à la hausse le nombre de députés. Il a toutefois reconnu qu’il était important de « protéger autant que possible » la Gaspésie et l’est de Montréal, notamment.

« On a 125 comtés au Québec, le même nombre qu’en Ontario, pour une population qui est beaucoup plus petite », a-t-il soutenu. Selon M. Legault, il faut trouver un équilibre entre la représentativité des citoyens et des régions.

« Actuellement, si on regarde le comté d’Éric Lefebvre (Arthabaska, dans le Centre-du-Québec), c’est là qu’il y a plus d’électeurs. Un moment donné, les électeurs, faut aussi que le poids de leur vote soit comparable d’une région à l’autre », a-t-il dit.

Les Montréalais appelés à se manifester

Sur les réseaux sociaux, mercredi, la députée caquiste de la circonscription d’Anjou–Louis-Riel, Karine Boivin Roy, a également dénoncé la proposition faite par la commission de la représentation électorale. La nouvelle carte effacerait son siège, alors que son territoire serait redistribué entre les circonscriptions de Camille-Laurin, d’Hochelaga-Maisonneuve et de Rosemont (qui deviendrait Rosemont–Louis-Riel).

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Karine Boivin Roy, députée caquiste d’Anjou–Louis-Riel

« Sans surprise, je suis déçue en tant que députée et aussi citoyenne qui habite le comté. Assurément, je saisirai l’opportunité de faire entendre les préoccupations de mes citoyens lors des consultations publiques. Je les invite aussi à venir s’y manifester », a-t-elle dit.

Pour sa part, le député de Rosemont pour Québec solidaire (QS), Vincent Marissal, a affirmé qu’il est tombé en bas de sa chaise quand il a lu la nouvelle carte électorale proposée. Avec les nouvelles limites territoriales, le Vieux-Rosemont, où se situe son bureau, serait exclu de sa circonscription. « Ça n’a pas de sens », a-t-il dit, affirmant que la communauté de l’est de Montréal se mobiliserait pour garder son poids politique au Parlement.

Le chef du Parti québécois et député de Camille-Laurin, Paul St-Pierre Plamondon, a écrit sur X qu’il était « choqué et surpris » de constater que l’est de Montréal perdrait une circonscription. « On ne gouverne pas par coins de rue, mais pour des populations dont les enjeux sont partagés », a-t-il dit.

Avec La Presse Canadienne