(Ottawa) Le ministre fédéral de la Sécurité publique, Marco Mendicino, a officiellement mandaté le Service canadien du renseignement de sécurité (SCRS) pour enquêter sur toutes menaces étrangères visant des élus, leurs familles, leurs employés ou le Parlement lui-même.

Le député conservateur Michael Chong, qui a été ciblé par le diplomate chinois Zhao Wei, a appelé ses collègues à aller encore plus loin.

M. Chong a été invité à témoigner devant un comité parlementaire mardi soir. Il a souhaité que ses collègues obtiennent les documents liés à son cas pour mieux comprendre « l’échec systémique » qui a fait en sorte qu’il a appris l’existence de menaces contre sa famille seulement deux ans après qu’elles aient été repérées par le SCRS, alors que l’affaire a été publiée par le Globe and Mail le 1er mai.

Il dit avoir été informé ce mois-ci du contenu d’un rapport de 2021 alléguant que M. Zhao récoltait de l’information sur sa famille à Hong Kong.

« De toute évidence, M. Zhao et les représentants de [la République populaire de Chine] au Canada ont ciblé des députés de manière coercitive et corrompue tous partis confondus, pour les influencer sur des questions de politique étrangère », a souligné M. Chong.

M. Zhao a été déclaré persona non grata par le ministère des Affaires étrangères la semaine dernière.

Dans une nouvelle directive ministérielle, M. Mendicino a donné comme instruction au SCRS de considérer ces menaces comme prioritaires.

« Le SCRS sera désormais tenu d’informer le ministre de toute menace d’ingérence étrangère impliquant des parlementaires ou leur famille, a-t-il écrit mardi sur Twitter. En outre, dans la mesure du possible, le SCRS doit informer les parlementaires des menaces qui les visent. »

Ces mesures voient le jour alors que les inquiétudes sont de plus en plus vives concernant des allégations selon lesquelles la Chine aurait tenté d’influencer les deux dernières élections fédérales, et des accusations disant que Pékin aurait tenté d’intimider des membres du Parlement et leurs familles.

Mais selon M. Chong, cette directive arrive trop tard. « il y a un éventail de choses qui auraient dû être faites hier en matière d’ingérence étrangère et d’espionnage », a-t-il dit au comité.

Il pense que le SCRS devrait aller encore plus loin, en révélant l’identité des coupables aux députés visés et au président de la Chambre des communes, qui pourra alors en informer tous les députés. Selon lui, un protocole semblable existe au Royaume-Uni.

M. Chong a précédemment déclaré à la Chambre des communes que Jody Thomas, conseillère en sécurité nationale du premier ministre Justin Trudeau, lui a indiqué que le rapport de 2021 du SCRS avait été acheminé au Bureau du Conseil privé et aux ministères concernés.

Mais M. Trudeau et plusieurs autres ministres ont soutenu ne pas être au courant du rapport avant que le Globe and Mail n’écrive à ce sujet.

Plusieurs reportages du Globe and Mail et de Global News ont dernièrement allégué que la Chine a mené une campagne coordonnée pour influencer les deux dernières élections en intimider des députés qui avaient une position critique à l’égard de Pékin.

« Cela ne se produirait pas dans un système qui fonctionne comme il faut », a soutenu M. Chong, qui blâme le premier ministre Justin Trudeau.

Des élections partielles sous la loupe

Le gouvernement fédéral a aussi annoncé mardi que le Groupe de travail sur les menaces en matière de sécurité et de renseignements visant les élections surveillera de près les quatre élections partielles du mois prochain, afin de déceler toute ingérence étrangère.

Les électeurs de Notre-Dame-de-Grâce–Westmount, d’Oxford, de Portage–Lisgar et de Winnipeg South Centre éliront leurs députés le 19 juin.

Le groupe de travail a comme mandat de fournir des évaluations sur les menaces d’ingérence étrangère à un comité de sous-ministres, qui informent les membres du cabinet au besoin.

Le groupe de travail doit aussi préparer deux rapports – l’un confidentiel et l’autre public – à propos de toute tentative d’ingérence dans les élections partielles.

Le premier ministre a mandaté l’ancien gouverneur général David Johnston pour déterminer quelles seront les prochaines actions que le gouvernement devra entreprendre pour lutter contre l’ingérence étrangère.

M. Johnston a jusqu’au 23 mai pour informer le gouvernement de sa conclusion, à savoir si une enquête publique ou toute autre forme d’investigation sera nécessaire.