L’annonce d’une entente entre le Parti libéral du Canada (PLC) et le Nouveau Parti démocratique (NPD) avait eu l’effet d’une bombe l’an dernier. Grâce à cet accord, les libéraux minoritaires pourront demeurer au pouvoir jusqu’en 2025. Un an plus tard, il tient toujours le coup, même si le chef néo-démocrate, Jagmeet Singh, reste sur sa faim.

« Je suis fier, mais pas satisfait, déclare-t-il en entrevue. On a obtenu trois grandes victoires pour les gens. On a mis en œuvre un programme de soins dentaires pour les enfants de moins de 12 ans, on a doublé le crédit d’impôt de la TPS, on a aidé les gens pour payer leur loyer. Donc, ce sont des choses que les libéraux n’auraient jamais faites sans y être forcés par nous. »

Insatisfait, le chef néo-démocrate réclame davantage d’aide du gouvernement pour le logement abordable, davantage d’améliorations au système de santé et une réforme de l’assurance-emploi, qui n’apparaît pas dans l’accord. L’augmentation du crédit d’impôt de la TPS n’y figure pas non plus.

« Ça nous a donné un plus grand outil de négociation pour faire des choses hors de l’entente, fait-il remarquer, confiant. Ça nous donne plus d’accès au gouvernement, plus d’occasions pour les convaincre, et on l’a utilisé. »

Jagmeet Singh et Justin Trudeau doivent se rencontrer au moins une fois par trimestre, puis les leaders libéral et néo-démocrate en chambre doivent tenir des réunions régulières, tout comme les whips. Un groupe de surveillance doit également se rencontrer tous les mois.

Les conservateurs se sont moqués à maintes reprises du « gouvernement néo-démocrate-libéral » depuis la conclusion de cette entente. Et dans les rangs bloquistes, on rappelle la tendance centralisatrice du NPD qui, ajoutée à celle des libéraux, menace l’autonomie du Québec.

Je pense que les autres partis sont un peu jaloux. Ou peut-être s’ils ne sont pas jaloux, on a montré comment ils sont effectivement nuls. À quoi bon avoir plus de 100 députés conservateurs s’ils ne peuvent pas aider les gens, alors que nous faisons face à des défis historiques ?

Jagmeet Singh, chef du Nouveau Parti démocratique

« À quoi bon avoir plus de 30 députés du Bloc s’ils ne peuvent pas changer la vie des gens quand on a un seul député et qu’on a eu la chance d’aider des milliers de gens au Québec avec les changements qu’on a faits », ajoute-t-il.

Encore du chemin à faire

Seulement quelques-unes des 24 priorités énumérées dans l’entente ont toutefois été concrétisées par le gouvernement libéral en un an. Outre le programme de soins dentaires, qui sera élargi cette année aux adolescents, aux aînés et aux personnes handicapées, et le changement de la définition de logement abordable au programme de financement des logements locatifs, il y a les dix jours de congé de maladie payé pour les travailleurs sous réglementation fédérale. Une promesse électorale des libéraux…

Jagmeet Singh se défend de défoncer des portes déjà ouvertes. « On a réussi à faire annuler quelques subventions aux énergies fossiles », rétorque le chef néo-démocrate.

Il attend également avec impatience en 2023 le projet de loi sur la transition équitable pour les travailleurs de l’industrie pétrolière, celui pour interdire le recours aux briseurs de grève et celui sur l’assurance médicaments qui, selon l’entente, doit être adopté « d’ici la fin de 2023 ».

« Ce ne sont pas des choses qu’on a accélérées, ce sont des choses auxquelles le gouvernement a dit non et on l’a forcé à dire oui », soutient-il, citant en exemple les votes du gouvernement contre l’idée d’instaurer un programme de soins dentaires et un programme d’assurance médicaments lors de sessions législatives précédentes.

Un premier test la semaine prochaine

La première vraie mise à l’épreuve de l’entente pourrait toutefois survenir la semaine prochaine lorsque les députés seront appelés à voter sur une motion conservatrice pour faire témoigner Katie Telford, cheffe de cabinet du premier ministre Justin Trudeau, dans le dossier de l’ingérence étrangère électorale.

M. Trudeau a évité de dire vendredi s’il en ferait un vote de confiance. S’il s’est engagé à soutenir les libéraux lors de votes sur le budget et sur des questions de confiance, par exemple une motion pour accorder des crédits, le NPD n’est pas tenu de le faire pour les autres votes déclarés comme vote de confiance par le gouvernement.

« On n’a pas encore décidé comment on va voter pour cette motion », indique Jagmeet Singh, déplorant au passage le jeu partisan entre les conservateurs et les libéraux.

En vertu de leur entente, le gouvernement doit informer le NPD le plus rapidement possible s’il choisit d’en faire une question de confiance. Les néo-démocrates doivent en retour indiquer au gouvernement comment ils voteront avant de le déclarer publiquement.