Après un automne où il a été moins présent médiatiquement, Gabriel Nadeau-Dubois prépare l’imminente rentrée parlementaire en attaquant de front la question de la relance de Québec solidaire (QS). S’il a échoué à s’imposer comme étant la solution de remplacement au gouvernement de François Legault, le chef parlementaire du parti fait son autocritique.

En entrevue avec La Presse au café Paquebot, au cœur du quartier La Petite-Patrie, où il habite à Montréal, M. Nadeau-Dubois dresse un bilan sans faux-fuyant des résultats de sa formation politique, dont l’appui populaire a diminué de 16,1 % à 15,4 % entre le scrutin de 2018 et celui de 2022.

« Personnellement, je pense que j’ai l’image de quelqu’un qui se remet peu en question, mais parfois, les images sont très loin de la réalité. J’étais moins présent à l’automne parce que je me suis livré à un exercice de réflexion et d’autocritique. Je me mets énormément de pression », dit-il, martelant qu’il « ne prend pas à la légère les résultats du 3 octobre ».

Les 11 et 12 février prochains, les membres du parti se réuniront d’ailleurs en conseil national pour faire le bilan du dernier sprint électoral. Malgré le déploiement de moyens considérables pour mener la plus importante campagne de l’histoire du parti, les solidaires comptent seulement deux nouveaux députés à Québec : Haroun Bouazzi et Alejandra Zaga Mendez, tous deux à Montréal. La défaite d’Émilise Lessard-Therrien en Abitibi-Témiscamingue les secoue encore.

Une chose que j’entends beaucoup, c’est un jour, ça sera votre tour. Comme si les gens trouvaient que j’avais du potentiel, qu’ils avaient apprécié le travail que QS avait fait dans l’opposition, mais qu’ils hésitaient encore à voter pour nous.

Gabriel Nadeau-Dubois, chef parlementaire de Québec solidaire

« Moi, c’est à cette réflexion-là que j’invite les membres du parti lors de notre conseil national. Comment faire la démonstration qu’on n’est pas bons seulement pour talonner François Legault, mais qu’on est prêts à le remplacer », poursuit-il.

Cap sur les régions

Le premier chantier qu’il veut entreprendre est une conquête des régions. QS a obtenu des résultats intéressants dans les centres urbains à l’extérieur de Montréal et de Québec, mais le parti n’arrive toujours pas à s’enraciner dans les milieux ruraux, affirme Gabriel Nadeau-Dubois.

« J’ai passé le temps des Fêtes à Thetford Mines avec ma famille et je suis allé en masse au Tim Hortons. J’ai senti un respect pour le travail que fait Québec solidaire. Mais entre le respect et la confiance qu’on est capables de gouverner, il y a un pas à franchir. On a encore des choses à prouver », dit-il.

PHOTO ALAIN ROBERGE, LA PRESSE

Gabriel Nadeau-Dubois, chef parlementaire de Québec solidaire

Les solidaires doivent continuer à interpeller les jeunes électeurs, segment de l’électorat qui est déjà enclin à écouter leurs idées, mais ils doivent aussi s’intéresser plus que jamais aux enjeux qui touchent les autres générations, affirme M. Nadeau-Dubois.

« Je m’étais donné comme mission personnelle de créer une alliance intergénérationnelle, mais je n’ai pas réussi. Ça, pour moi, c’est incontournable pour Québec solidaire. Si on veut avancer, si on veut gouverner le Québec, il va falloir connecter avec d’autres électeurs, [en plus des] jeunes », poursuit-il.

Se défaire des « taxes orange »

Plus de trois mois depuis la victoire écrasante de la Coalition avenir Québec, le chef parlementaire de QS revient sur un épisode qui a marqué la dernière campagne électorale : l’étiquette des « taxes orange » que lui a collée François Legault, alors qu’il peinait à expliquer sa plateforme économique.

Plus une position est compliquée, plus elle est facile à attaquer. Plusieurs de nos propositions économiques et fiscales étaient trop complexes. Ça nous a desservis. Je prends ma part de responsabilités là-dedans, surtout qu’on était face à un adversaire dont les propositions étaient d’une simplicité extraordinaire.

Gabriel Nadeau-Dubois, chef parlementaire de Québec solidaire

La proposition de QS de taxer davantage les « ultrariches », c’est-à-dire les Québécois qui disposent d’un actif net de plus de 1 million, a fait grand bruit l’automne dernier.

« Ce que je veux dire à ces gens-là, c’est qu’on les a entendus. On va faire le travail qu’on a à faire. On va revenir en 2026 avec de nouvelles propositions », dit-il, précisant que les prochaines promesses solidaires viseront toujours une plus grande redistribution de la richesse.

Élection partielle

Pour la prochaine session parlementaire, qui commencera le 31 janvier à Québec, Gabriel Nadeau-Dubois promet de mettre son équipe à l’avant-scène. En coulisse, il travaillera activement à l’organisation de la prochaine élection partielle dans la circonscription de Saint-Henri–Sainte-Anne, à Montréal, dont le siège est vacant depuis la démission de l’ex-cheffe libérale Dominique Anglade.

« Je ne veux pas que Québec solidaire plafonne, mais oui, c’est le risque en ce moment. Le risque du plafonnement, je le vois, et je ne veux pas que ça arrive », affirme-t-il.

« La rigueur et la pertinence, ça ne tue pas toujours la une à court terme, mais dans la durée, ça paraît et ça met les bases d’une crédibilité dont on a besoin à Québec solidaire. Moi, ça sera une de mes priorités cet hiver », conclut-il.