(Québec) Le triste anniversaire de la mort de Joyce Echaquan a donné lieu à une confrontation partisane sur le racisme systémique au Salon bleu. Le ministre de la Santé, Christian Dubé, s’est pour sa part dit « très déçu » d’apprendre que seulement 1 % des travailleurs de la santé ont suivi la formation obligatoire ordonnée dans la foulée de son décès.

Le Parti libéral et Québec solidaire ont talonné le gouvernement Legault mardi pour qu’il reconnaisse l’existence du racisme systémique au Québec alors que le 28 septembre marque l’anniversaire du décès de Joyce Echaquan, morte sous les insultes racistes du personnel soignant de l’hôpital de Joliette.

Les deux partis politiques ont aussi demandé au gouvernement de reconnaître le « principe de Joyce » qui vise à garantir aux Autochtones un droit d’accès équitable aux services de santé et services sociaux. Le premier ministre François Legault s’est dit d’accord « avec les prémisses » du « principe de Joyce », mais il refuse d’y adhérer parce qu’on y réclame également la reconnaissance du racisme systémique.

« On a tous une responsabilité […] Il faut que tous les Autochtones aient accès à nos services dans nos réseaux sans aucune discrimination », a mentionné M. Legault. « Il y a du racisme au Québec, il faut le combattre. Maintenant, ce n’est pas le temps de diviser les Québécois avec certains mots », a-t-il ajouté répondant à une question du chef parlementaire, Gabriel Nadeau-Dubois.

M. Legault a affirmé n’avoir « jamais vu un système qui était raciste » lors de son passage à l’Éducation et à la Santé, à l’époque, notamment.

Ce à quoi Québec solidaire a répondu que « le plus important, ce n’est pas ce que le premier ministre a vu », mais « ce que les Premières Nations vivent » dans les institutions.

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Le chef parlementaire de Québec solidaire, Gabriel Nadeau-Dubois.

« Ce que les gens nous disent, c’est que, eux et elles, elles ressentent, elles vivent la discrimination et le racisme systémique. La seule personne qui bloque sur les mots, c’est le premier ministre et ce faisant il retarde le nécessaire processus de guérison et c’est dommage », a défendu M. Nadeau-Dubois.

« On a vu il y a quelques semaines au débat [des chefs fédéraux] en anglais qu’est-ce que ça donne cette chicane-là sur certains mots. Je ne vois pas pourquoi le chef du deuxième groupe d’opposition s’obstine à diviser les Québécois […] Rassemblons les Québécois au lieu d’être radical et de se mettre dans un coin », a lancé M. Legault, toujours dans le même échange.

À son tour, la cheffe libérale Dominique Anglade a demandé au premier ministre de reconnaître le « principe de Joyce » lors de la période de questions. « Il faut collectivement franchir cette étape, celle de reconnaître le principe de Joyce », a-t-elle expliqué.

« Je suis d’accord avec le principe de Joyce. Là où j’ai un problème, c’est quand on voit une vidéo du député de Jacques-Cartier qui fait un amalgame entre Joyce Echaquan » et le projet de loi 96 sur la langue française, a décoché le premier ministre. Une réponse qui a provoqué l’ire de l’opposition officielle.

« Je suis outré que le premier ministre choisisse cette question-là sur le principe de Joyce, sur la réalité que vivent les peuples autochtones au Québec, la réalité que vivent les sept enfants [de Joyce Echaquan] pour s’en prendre à conduite d’un député qui n’a absolument rien à se reprocher », a répondu le leader parlementaire libéral, André Fortin.

François Legault faisait allusion à une vidéo tournée le 12 juin lors d’un rassemblement de Black Lives Matter où le député libéral Greg Kelley dénonce le fait que le gouvernement refuse de reconnaitre le racisme systémique avant d’ajouter au sujet du projet de loi 96 qu’il utilise « encore » la clause dérogatoire pour « restreindre et retirer les droits ».

Le ministre responsable des Affaires autochtones, Ian Lafrenière, a participé mardi à une cérémonie en l’honneur de Joyce Echaquan à Joliette. Le gouvernement Legault doit présenter mercredi une motion au Salon bleu pour honorer la mémoire de Joyce Echaquan.

Formation obligatoire : déploiement « inacceptable », selon Dubé

Le ministre Christian Dubé s’est dit « très déçu » d’apprendre que seulement 1 % des travailleurs de la santé ont suivi la formation obligatoire ordonnée dans la foulée de son décès.

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Le ministre de la Santé, Christian Dubé.

« À la défense du réseau, vous savez que je suis là pour trouver l’équilibre, alors on peut bien dire que tout le temps du personnel a été mis pour la COVID, mais pour moi, c’est inacceptable », a déploré le ministre Christian Dubé, mardi.

Lundi, La Presse révélait que seulement 1 % des quelque 300 000 travailleurs de la santé et des services sociaux ont complété la formation obligatoire sur les réalités autochtones. Québec veut que d’ici mars 2022, la moitié des employés du réseau public aient suivi cette formation de 90 minutes.

« Il y a un peu plus de formation qui a été faite par exemple dans la région de Joliette, mais c’est mineur […] Je ne suis pas à l’aise avec le pourcentage qu’on a en ce moment », a-t-il ajouté en conférence de presse.

M. Dubé a demandé à la sous-ministre Dominique Savoie de « trouver des façons » avec les établissements pour « accélérer » le déploiement de la formation.