(Québec) Plus tôt que tard au cours de la session parlementaire qui débute mardi, le premier ministre François Legault entend faire une « intervention solennelle », sous forme de déclaration à l’Assemblée nationale, voire d’adresse à la nation, afin d’inciter les Québécois à ne pas relâcher les efforts dans la lutte contre la COVID-19, a appris La Presse. La session sera « précautionneuse », axée surtout sur la gestion de la pandémie, dit-on à Québec. Mais ce n’est pas le seul dossier chaud à suivre cet automne. Tour d’horizon.

Maîtriser le coronavirus

PHOTO BERNARD BRAULT, LA PRESSE

Le gouvernement Legault est inquiet de la tendance à la hausse des cas confirmés de COVID-19.

Le gouvernement Legault est inquiet de la tendance à la hausse des cas confirmés de COVID-19. Il constate également un certain relâchement dans le respect des consignes. C’est dans ce contexte que François Legault prépare une « intervention solennelle », comme on le dit en coulisses. Aucune formule ni aucune date n’a encore été arrêtée. Ce pourrait être une déclaration ministérielle – un discours exceptionnel prononcé au Salon bleu. Mais on pense également à une forme d’adresse à la nation sur l’internet, voire sur les ondes. Le gouvernement veut ainsi lancer « un appel à la solidarité et à la mobilisation » pour lutter contre la COVID-19. Car maîtriser la propagation du coronavirus est la clé pour relancer l’économie et retrouver un semblant de normalité. Le gouvernement fait d’ailleurs face à un défi de communication : ses messages sont relayés, mais ils ont une portée moindre que lors des rendez-vous de 13 h durant le confinement. Il y a également une certaine fatigue chez les Québécois. On souhaite ainsi une intervention marquante, un rendez-vous incontournable, pour rejoindre davantage la population. Dans un tout autre contexte, François Legault avait eu recours à une forme d’adresse à la nation en mars 2019 pour défendre son projet de loi sur la laïcité de l’État. C’était un discours préenregistré et diffusé sur le site web du premier ministre et sa page Facebook.

Un premier bulletin sur la gestion de la crise

PHOTO EDOUARD PLANTE-FRÉCHETTE, ARCHIVES LA PRESSE

La commissaire à la santé et au bien-être, Joanne Castonguay, se penche sur la performance du réseau de la santé lors de la première vague.

Le gouvernement Legault recevra un premier bulletin sur sa gestion de la crise de la COVID-19 cet automne. Le Protecteur du citoyen déposera un rapport d’étape sur son enquête visant à « faire la lumière sur la réponse du gouvernement et du réseau de la santé à la crise de la COVID-19 dans les milieux de vie collectifs pour aînés » comme les CHSLD. Le rapport final sera présenté l’an prochain. Ce n’est pas la seule enquête en cours. La commissaire à la santé et au bien-être, Joanne Castonguay, se penche sur la performance du réseau de la santé lors de la première vague. Et la coroner en chef du Québec mène une « vaste enquête publique sur certains décès survenus au cours de la pandémie de COVID-19 dans les CHSLD » et autres milieux d’hébergement pour aînés.

Nouvelle mouture du projet de loi 61

François Legault a abandonné le projet de loi 61, mais il est loin d’avoir laissé tomber la volonté d’accélérer la réalisation de projets d’infrastructures en vue de relancer l’économie. La présidente du Conseil du trésor, Sonia LeBel, déposera un nouveau projet de loi durant cette session, dont le menu législatif ne sera pas très costaud, par ailleurs. Québec a toujours l’intention de s’accorder plus de pouvoirs pour réaliser les projets, mais son approche sera plus modérée que dans la première mouture. Il cherchera notamment à réduire les délais en matière d’évaluation environnementale et faciliter les expropriations.

Relance et mise à jour économiques

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La relance économique, en particulier l’augmentation de la production locale, est la priorité du gouvernement pour la deuxième moitié de son mandat.

Avec un déficit prévu de 15 milliards cette année, comment le gouvernement Legault s’y prendra-t-il pour retrouver l’équilibre budgétaire comme il le souhaite d’ici cinq ans ? Une bonne partie de la réponse se trouvera dans la mise à jour économique du ministre des Finances, Eric Girard. Ce dernier a promis d’y arriver sans « austérité » ni hausse du fardeau des contribuables. On doit aussi s’attendre à ce que le gouvernement profite de l’occasion pour faire des annonces. Car le déficit prévu de 15 milliards comprend une provision de 4 milliards qui, en plus de pallier les « risques économiques et sanitaires potentiels reliés à une possible deuxième vague », doit servir à « financer des mesures de soutien et de relance additionnelles », peut-on lire dans des documents présentés en juin. La relance économique, en particulier l’augmentation de la production locale, est la priorité du gouvernement pour la deuxième moitié de son mandat.

Des promesses qui se concrétisent

Des promesses électorales de la CAQ vont cheminer cet automne. Le ministre des Transports, François Bonnardel, présentera les détails du projet de tunnel Québec-Lévis, autant au sujet du tracé, du budget que de l’échéancier. La CAQ a promis une première pelletée de terre en 2022. Elle veut arrimer ce projet avec celui du réseau structurant du maire Labeaume. Dans un tout autre ordre d’idées, le ministre délégué à la Santé et aux Services sociaux, Lionel Carmant, déposera un projet de loi pour rétablir la gratuité de la fécondation in vitro, pour le premier cycle seulement. Le crédit d’impôt sera maintenu pour contribuer à financer des cycles supplémentaires. En santé, les engagements visant à réduire les délais d’attente aux urgences et à permettre à tous les Québécois d’avoir accès à un médecin de famille paraissent en danger.

Un nouveau chef au PQ

PHOTO YAN DOUBLET, LE SOLEIL

Guy Nantel, Sylvain Gaudreault, Frédéric Bastien et Paul St-Pierre Plamondon

Qui de Frédéric Bastien, Sylvain Gaudreault, Guy Nantel ou Paul St-Pierre Plamondon deviendra le 10e chef de l’histoire du Parti québécois ? La réponse sera connue le 9 octobre, jour du dévoilement des résultats de la course à la direction. Pour la première fois, en plus des membres, le scrutin sera ouvert aux sympathisants du parti au coût de 5 $. Toute une commande attend le prochain leader : il prendra les rênes d’une formation lourdement endettée et dont les intentions de vote demeurent faibles, selon les sondages.

Rapport attendu de la commission Laurent

Un important rapport est attendu cet automne, celui de la Commission spéciale sur les droits des enfants et la protection de la jeunesse. Cette commission avait été créée à la suite de la mort tragique d’une fillette de Granby l’an dernier. Au terme des consultations, fin mai, sa présidente Régine Laurent a déclaré qu’une réflexion de société est nécessaire au sujet de la priorité donnée actuellement au maintien des enfants dans leur famille biologique. On a également dénoncé devant la Commission le manque de travailleurs sociaux pour traiter les dossiers, alors que les signalements sont en hausse, tout comme le nombre d’enfants qui sont pris en charge par la DPJ. Deux autres rapports à venir sont quant à eux le fruit du travail de députés de tous les partis : il s’agit de la commission parlementaire spéciale sur l’exploitation sexuelle des mineurs et du comité transpartisan sur l’accompagnement des victimes d’agressions sexuelles et de violence conjugale. Enfin, le groupe d’action contre le racisme – créé dans la foulée de la mort de George Floyd aux États-Unis et composé de sept élus caquistes – doit dévoiler des mesures concrètes en novembre.

Contestation de la loi 21

Le plan d’action sur la langue française est peut-être repoussé à l’an prochain, mais l’enjeu identitaire va refaire surface cet automne malgré tout. Adoptée l’an dernier, la Loi sur la laïcité de l’État fera l’objet d’un procès en novembre. Cette loi interdit aux agents de l’État en position d’autorité coercitive – juges, policiers, procureurs de la Couronne et agents correctionnels –, mais aussi aux enseignants du réseau public de porter des signes religieux dans l’exercice de leurs fonctions. Le Conseil national des musulmans canadiens, l’Association canadienne des libertés civiles et une étudiante en enseignement qui porte le hijab, Ichrak Nourel Hak, la contestent. Ils la jugent inconstitutionnelle et discriminatoire.

Plan vert

PHOTO BERNARD BRAULT, ARCHIVES LA PRESSE

Un projet de loi pour instaurer une consigne de 25 cents sur les bouteilles de vin est dans les cartons du gouvernement.

« L’année 2020 sera l’année de l’environnement », déclarait François Legault à la fin de janvier. C’était avant que la pandémie ne bouscule les plans… Québec reviendra toutefois à la charge sur ce thème avec le dépôt de son « Plan pour une économie verte », sa politique-cadre de lutte contre les changements climatiques. Le ministre de l’Environnement, Benoît Charette, présentera sa stratégie pour arriver à une réduction de 37,5 % des émissions de gaz à effet de serre d’ici 2030. La Presse dévoilait ce printemps une version de ce plan qui mise beaucoup sur l’électrification des transports. Aussi au menu de M. Charette : un projet de loi pour instaurer une consigne de 25 cents sur les bouteilles de vin et de spiritueux et de 10 cents sur tous les contenants de boissons prêtes à boire de 100 ml à 2 L – comme les bouteilles d’eau et de jus en plastique ainsi que les cartons de lait. La mesure entrera en vigueur progressivement à compter de l’automne 2022, après les élections générales.

Négociations avec le demi-million des travailleurs de l’État

Québec doit renouveler les contrats de travail de ses 500 000 travailleurs. Sa dernière offre salariale propose une convention collective de trois ans avec des hausses salariales de 1,75 % les deux premières années et de 1,5 % la dernière. Québec ajoute des montants forfaitaires pour tous de 1000 $ cette année et de 600 $ l’an prochain. Les centrales syndicales ont fait chacune des demandes différentes, mais on parle en général d’augmentations d’au moins 2 % par année (certaines veulent 2 $ l’heure la première année). Le gouvernement tient à donner des hausses salariales plus importantes aux préposés aux bénéficiaires en CHSLD et aux enseignants en début de carrière. Il a servi un avertissement aux syndicats : « En raison de circonstances exceptionnelles, la capacité gouvernementale de maintenir cette proposition pourrait évoluer rapidement ».