(Ottawa) Le député du Bloc québécois Simon-Pierre Savard-Tremblay n’a qu’une façon de décrire l’étude que mène présentement le comité du commerce international au sujet de l’accord de libre-échange conclu entre le Canada et le Royaume-Uni samedi dernier : le théâtre de l’absurde.

C’est que les membres du comité de la Chambre des communes ont entrepris l’examen de cet accord intérimaire sans même avoir entre les mains le texte de l’entente. Le comité a entendu certains témoins cette semaine. Les parlementaires doivent approuver cette entente qui remplacera l’Accord économique et commercial global (AECG) avant le 31 décembre, alors que le Brexit confirmant le départ du Royaume-Uni de l’Union européenne doit entrer en vigueur le lendemain.

Le hic, c’est que le texte de l’accord ne sera disponible que « d’ici deux ou trois semaines ». Pis encore, les travaux de la Chambre des communes doivent prendre fin le 11 décembre, soit dans deux semaines.

« C’est le théâtre de l’absurde », a lancé au bout du fil le député Simon-Pierre Savard-Tremblay, qui est aussi l’un des deux vice-présidents du comité parlementaire.

La ministre du Commerce international du Canada, Mary Ng, doit comparaître devant le comité lundi. Encore là, aucun député n’aura entre les mains le texte de l’accord. La ministre a déjà fait savoir qu’un projet de loi serait déposé aux Communes rapidement afin de ratifier l’entente.

« Les travaux prennent fin le 11 décembre si tout va comme prévu. Va-t-on devoir faire un zoom pour voter sur cela entre deux bouchées de dinde pendant le temps des Fêtes ? Sérieusement, cela veut dire qu’on pourrait devoir entériner un accord alors qu’on n’en connaît pas du tout le contenu. Mais notre ligne est bien claire : on ne va pas se commettre d’aucune façon même si par sympathie on est favorable à ce que nos entreprise aient de nouveaux débouchés au Royaume-Uni. Dans les accords, souvent le diable est dans les détails », a-t-il affirmé.

Au bureau de la ministre Ng, la directrice des communications, Eleanore Catenaro, a indiqué que l’accord en question est en train d’être examiné par les avocats et il doit aussi être impérativement traduit en français avant d’être déposé au Parlement. Cela explique le délai. « Nous sommes engagés dans une course contre la montre », a-t-elle indiqué à La Presse.

Elle a ajouté que la ministre Ng s’est entretenue avec ses homologues des partis de l’opposition afin de répondre à leurs questions, dans la mesure du possible, au cours des deux derniers jours. Elle a rappelé que Mme Ng avait été sans équivoque que l’accord en question n’ouvrira pas davantage le marché du fromage aux produits britanniques, préservant ainsi le statu quo dans le système de gestion de l’offre.

En fait, l’accord provisoire permet aux exportations canadiennes d’éviter 98 % des nouveaux tarifs douaniers.

Au terme de plusieurs mois de pourparlers, le Canada et le Royaume-Uni ont conclu samedi un nouvel accord de libre-échange avant l’échéance du 31 décembre, évitant ainsi de nouveaux tarifs douaniers qui seraient entrés en vigueur au moment du Brexit officiel.

La nouvelle entente assure ainsi une continuité jusqu’à la conclusion d’un nouvel accord plus complet de libre-échange avec les Britanniques. Des négociations doivent être menées au cours de la prochaine année.

Les échanges commerciaux entre le Canada et le Royaume-Uni, le cinquième partenaire commercial du Canada en importance, représentaient 29 milliards de marchandises en 2019.

Le premier ministre Justin Trudeau et son homologue britannique Boris Johnson ont fait l’annonce de ce nouveau pacte, samedi matin, dans le cadre d’une conférence de presse virtuelle.

Le Royaume-Uni a quitté l’UE à la fin de janvier dernier, pour respecter le référendum sur le Brexit, mais les deux parties étaient en période de transition depuis 11 mois.

Les négociateurs canadiens et britanniques travaillaient à conclure un accord de transition fondé sur l’AECG depuis tout ce temps, au bénéfice notamment des produits canadiens, comme les steaks et les fruits de mer ou encore les pièces automobiles.

Avec La Presse canadienne