Le co-porte-parole de Québec solidaire, Gabriel Nadeau-Dubois, a rabroué la députée Ruba Ghazal dimanche pour s'être prononcée sur la portée de la position du parti concernant le port du voile intégral.

En matinée, l'élue dans Mercier s'est dite à l'aise à ce qu'une téléphoniste de l'État chargée de servir les citoyens puisse porter le niqab ou la burqa. « Si ça lui permet de gagner sa vie, pourquoi pas ? » a-t-elle affirmé au dernier jour du conseil national du parti, au cégep de Limoilou. Pour elle, « ce qui est important, c'est que la femme puisse avoir la totale liberté de gagner sa vie ».

Cette situation, hypothétique, serait conforme à ses yeux à la position adoptée par les militants samedi, à savoir qu'une employée de l'État pourrait porter le niqab ou la burqa hormis dans certaines circonstances.

En conférence de presse, Gabriel Nadeau-Dubois a répliqué que sa collègue a fait une erreur en illustrant la signification de la proposition, sans toutefois lui donner tort sur le fond.

« Nous, on a dit qu'on ne ferait pas de cas par cas, et Ruba ce matin a répondu à vos questions. Elle n'aurait pas dû faire du cas par cas. Et nous, on ne le fera pas. Et on ne le fera plus », a-t-il lancé.

Il était visiblement irrité, et il ne s'en est pas caché d'ailleurs. « Mon non-verbal vient de l'instance à vouloir nous entraîner dans un jeu qu'on ne veut pas jouer, le jeu du cas par cas, des hypothèses, des problèmes imaginaires. On ne jouera pas ce jeu. Et là-dessus, on trace une ligne aujourd'hui. »

« Des femmes qui portent le niqab et qui veulent devenir rectrice de l'UQAM, ça n'existe pas, a-t-il ajouté. Et à partir d'aujourd'hui, vous ne nous entendrez plus alimenter une crise qui n'existe pas en faisant des scénarios hypothétiques et imaginaires. » QS ne fait pas « de la politique dans les nuages », mais bien « de la politique au Québec en 2019 » où il n'y a pas de « femme portant le niqab qui souhaite vendre des bouteilles de vin à la SAQ ».

Depuis samedi, les représentants de QS y vont de toutes sortes d'interprétations quant à la proposition adoptée par les 300 délégués qui cible, sans le nommer, le voile intégral cachant le visage.

Selon cette proposition, une employée de l'État pourrait porter le niqab ou la burqa hormis dans certaines circonstances. « Le port de vêtements couvrant le visage peut être restreint pour les fonctionnaires ou personnes employées de l'État lorsque ces vêtements contreviennent » à l'un ou l'autre de quatre critères, indique-t-on.

Ainsi, il ne faut faire le recrutement d'adeptes (prosélytisme) et manquer à son devoir de réserve. Le signe religieux ne doit pas non plus entraver l'exercice de la profession ou encore contrevenir à des normes de sécurité. Les militants ont par ailleurs rejeté un critère qui aurait eu pour effet d'interdire le voile intégral à toute personne donnant des services directs à la population.

Comme l'a expliqué M. Nadeau-Dubois, QS est contre une « interdiction mur à mur » du voile intégral dans l'appareil de l'État. Il disait ne pas avoir d'exemple de situation où le port du voile intégral serait compatible avec l'exercice de la profession. Mais Ruba Gazhal s'est avancée sur ce terrain. « Les critères sont restrictifs, sont claires. Lorsque Ruba a répondu, elle a répondu dans le meilleur de sa connaissance », a commenté la co-porte-parole Manon Massé.

L'animatrice de l'assemblée plénière, celle qui dirigeait les débats, affirmait à La Presse samedi qu'une commis de la SAAQ, par exemple, pourrait très bien porter le voile intégral selon la proposition adoptée.

Dans leurs discours de clôture du conseil national, Mme Massé et M. Nadeau-Dubois ont réservé seulement deux petites phrases allusives au sujet du port de signes religieux, le dossier auquel a été consacré l'essentiel de la journée de samedi. « Les peuples fiers et forts n'ont pas besoin d'exclure pour se sentier fiers », a ainsi déclaré M. Nadeau-Dubois sous les applaudissements. Ils ont surtout fait valoir la campagne du parti pour forcer le gouvernement à lutter contre les changements climatiques avec plus de détermination.