Les manifestants propalestiniens pourront demeurer sur le terrain de l’Université McGill. La Cour supérieure a rejeté mercredi la demande d’injonction interlocutoire visant à démanteler le campement, revigorant ses occupants.

« Nous ne bougerons pas ! », scandaient les étudiants propalestiniens à l’entrée du campement, quelques heures après le rejet de la demande d’injonction temporaire.

Déposée vendredi, la requête citait des risques pour la santé et la sécurité, comparant le campement à un « aimant » à manifestations et contre-manifestations.

Or, l’Université a échoué à démontrer l’urgence d’intervenir, a tranché le juge Marc St-Pierre dans sa décision attendue.

  • Il s’agit de la deuxième demande d’injonction visant à démanteler le campement rejetée par la cour.

    PHOTO DOMINICK GRAVEL, LA PRESSE

    Il s’agit de la deuxième demande d’injonction visant à démanteler le campement rejetée par la cour.

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Depuis l’apparition des premières tentes, aucun incident violent n’a été rapporté.

Même la contre-manifestation évoquée par l’Université pour illustrer la crainte d’une escalade de tensions « s’est faite pacifiquement », a souligné le juge.

Or, une demande d’injonction provisoire ne peut être accordée « à titre préventif », a-t-il rappelé.

L’Université arguait également que le campement se trouvait sur le même terrain où se déroule normalement la cérémonie de remise des diplômes.

Or, ses avocats ont admis devant le tribunal avoir trouvé un autre lieu pour la cérémonie, signifiant qu’il n’y avait plus urgence d’intervenir, a conclu le juge.

L’Université s’est dite « déçue » de la décision rendue mercredi. « Nous procédons actuellement à l’analyse du jugement », a-t-elle déclaré par courriel.

L’administration a déposé la demande d’injonction après avoir épuisé « tous les protocoles d’intervention à sa disposition ».

« Les tensions montent, et des enjeux de sécurité et de santé publique se posent sur le terrain », a-t-elle ajouté.

Ses avocats avaient présenté lundi leurs arguments au palais de justice de Montréal. Ils avaient comparé le campement à un « minivillage » comptant une buanderie, une cafétéria et même une bibliothèque.

« Il y a une limite entre manifester avec des slogans, des pancartes […] et faire du camping dans un campement clôturé », avait plaidé MJacques Darche, qui représente l’Université.

PHOTO PATRICK SANFAÇON, ARCHIVES LA PRESSE

L’injonction ne visait personne comme tel, mais plusieurs organisations se sont tout de même présentées devant le tribunal pour défendre les manifestants.

Elles arguaient qu’un démantèlement brimerait leur droit à la liberté d’expression.

La demande d’injonction suscite « des questions complexes » quant à « la confrontation de deux droits fondamentaux, celui relatif à la jouissance de la propriété et celui relatif à la liberté d’expression », souligne la décision.

L’Université pourrait déposer une demande d’injonction permanente pour débattre de ces questions, affirme le professeur de droit à l’Université Laval Louis-Philippe Lampron.

À l’inverse, la demande d’injonction interlocutoire est accordée uniquement en cas d’urgence immédiate. « Elle ne va pas trancher sur le fond de l’affaire », explique-t-il.

Il s’agit de la deuxième demande d’injonction visant à démanteler le campement rejetée par la cour.

Dans une décision rendue début mai, la juge Chantal Masse avait noté la fragilité de la preuve présentée par les plaignants, deux étudiants qui reprochaient aux manifestants de créer un environnement « hostile » et « dangereux ».

« Le tribunal est d’avis que la balance des inconvénients penche du côté des manifestants dont la liberté d’expression et de réunion pacifique serait atteinte de façon importante », avait-elle conclu.

Les manifestants soufflent

La décision de mercredi a été accueillie avec enthousiasme à l’intérieur du campement. En point de presse, une représentante du groupe a parlé d’un « précédent incroyable » pour le mouvement étudiant propalestinien.

Nous espérons que la décision de la cour apprendra à McGill qu’il est plus coûteux d’exercer des mesures exceptionnelles pour réprimer ses propres étudiants par des moyens légaux plutôt que de répondre à leurs demandes.

Rama, une porte-parole du campement

Les manifestants, qui exigent de leur administration qu’elle coupe tout lien scolaire et financier avec Israël, ont réitéré leur volonté de rester sur le campus tant qu’il le faudra.

Et aucune résolution ne semble poindre à l’horizon : les discussions seraient au point mort, a dénoncé le groupe.

Bonnardel « analyse » la décision

PHOTO EDOUARD PLANTE-FRÉCHETTE, ARCHIVES LA PRESSE

Le ministre québécois de la Sécurité publique, François Bonnardel

Le ministre de la Sécurité publique, François Bonnardel, a indiqué qu’il prendrait le temps « d’analyser » la décision rendue.

« Notre position demeure la même et nous appuyons la demande de McGill », a déclaré sur les réseaux sociaux celui qui a déjà qualifié le campement d’« illégal ».

Plus d’une centaine de tentes sont désormais dressées sur le terrain de l’Université McGill.

Appelé à plus d’une reprise à intervenir, le Service de police de la Ville de Montréal (SPVM) s’est toujours montré réticent à démanteler le campement.

« La direction marche sur des œufs. Elle ne veut pas qu’une situation dégénère et entache l’image publique », estime Stéphane Wall, superviseur retraité du SPVM spécialisé en usage judicieux de la force.

L’histoire jusqu’ici

  • Une centaine d’étudiants propalestiniens campent sur le terrain de l’Université McGill depuis fin avril.
  • Ils réclament de l’Université qu’elle coupe tout lien financier et scolaire avec Israël.
  • L’établissement a déposé une demande d’injonction temporaire visant à démanteler le campement.