Le campement propalestinien compromet la santé et la sécurité de la communauté, a plaidé l’Université McGill devant la Cour supérieure, lundi. Si la demande d’injonction visant à le démanteler était accordée, la mairesse de Montréal, Valérie Plante, a affirmé ne pas vouloir d’affrontement avec la police.

Les avocats de l’Université ont présenté lundi leurs arguments devant le juge Marc St-Pierre au palais de justice de Montréal.

L’Université avait déposé vendredi une demande d’injonction provisoire afin que soit démantelé le campement propalestinien qui occupe son campus depuis deux semaines, citant des risques pour la santé et la sécurité.

Dans sa demande, l’Université affirmait craindre une escalade des tensions, comparant le campement à un « aimant » à manifestations et contre-manifestations.

« On veut absolument éviter qu’il y ait un évènement malheureux dans le futur », a plaidé MJacques Darche, qui représente l’Université.

Il a donné l’exemple de la manifestation pro-israélienne qui a eu lieu début mai à quelques mètres seulement du campement.

L’évènement, qui s’est déroulé sans heurt, avait nécessité la présence de plus d’une centaine de policiers.

« C’est pas ça, l’université », a-t-il laissé tomber. « Mais c’est peut-être ça, la démocratie », a répliqué le juge St-Pierre, ajoutant qu’aucun incident violent n’avait jusque-là été rapporté en lien avec le campement.

Selon l’Université, plus d’une centaine de tentes sont désormais dressées sur son terrain.

Ses avocats ont comparé le campement à un « minivillage » comptant une buanderie, une cafétéria et même une bibliothèque.

« Il y a une limite entre manifester avec des slogans, des pancartes […] et faire du camping dans un campement clôturé », a souligné Me Darche.

Depuis le début du campement, l’Université a doublé ses effectifs de sécurité. Elle devra aussi dépenser plus de 700 000 $ pour déplacer la cérémonie de remise des diplômes, qui se déroule habituellement sur le terrain occupé par le campement.

Début de l’audience

Les premières heures de l’audience ont été principalement consacrées à des questions de procédure, notamment parce que l’injonction n’identifie personne comme telle.

Plusieurs organisations se sont tout de même présentées lundi devant le tribunal pour défendre les manifestants.

Au cœur de leur argumentaire : le campement n’est pas une occupation, mais une manifestation, et est donc protégé par le droit à la liberté d’expression.

Le campement est une façon de « faire passer un message » par des individus qui n’ont autrement « pas accès au microphone », a fait valoir MJulius Grey, qui représente l’Association des Palestiniens et Juifs unis.

« Il n’y a aucune preuve d’urgence, aucune preuve de danger », a ajouté MAlexandre Romano, qui représente l’Association mcgillienne de professeurs de droit, dont certains membres participent au campement.

Les défendeurs se sont aussi appuyés sur le rejet d’une autre demande d’injonction visant à démanteler le campement, cette fois déposée par deux étudiants.

Dans sa décision rendue début mai, la juge Chantal Masse avait noté la fragilité de la preuve présentée par les plaignants, deux étudiants qui reprochaient aux manifestants de créer un environnement « hostile » et « dangereux ».

« Le tribunal est d’avis que la balance des inconvénients penche du côté des manifestants dont la liberté d’expression et de réunion pacifique serait atteinte de façon importante », avait-elle conclu.

Les manifestants, qui exigent de leur administration qu’elle coupe tout lien scolaire et financier avec Israël, ont réitéré depuis le dépôt de la demande leur volonté de rester sur le campus.

Au cours de la fin de semaine, un autre campement propalestinien a émergé sur le terrain de l’Université du Québec à Montréal.

Lundi, ce fut au tour de l’Université de Sherbrooke de voir un campement en appui à la Palestine se mettre en branle sur son terrain. Selon ce qu’a rapporté La Tribune, une dizaine de personnes devaient y passer la nuit de lundi à mardi. L’université, de son côté, a dit en soirée « évaluer la conformité réglementaire et sécuritaire de l’installation ».

PHOTO MAXIME PICARD, LA TRIBUNE

Lundi, un campement propalestinien est apparu sur le campus de l’Université de Sherbrooke.

Valérie Plante a affirmé lundi ne pas vouloir d’affrontement avec la police au campement propalestinien de McGill, alors que l’Université demande une injonction à la Cour supérieure.

La mairesse de Montréal a affirmé que le campement est « paisible », mais que l’Université a « absolument le droit » de s’adresser aux tribunaux pour forcer les manifestants à partir.

« La dernière chose qu’on veut, c’est de se rapprocher des confrontations entre des manifestants et un service de police [qui ont eu lieu] dans des villes américaines », a dit Mme Plante. « Ce n’est pas qui on est. »

« Ce que je souhaite, c’est que le dialogue se poursuive entre l’Université McGill et les manifestants », a ajouté l’élue. « Montréal, c’est une ville de paix, une ville inclusive où on a le droit de se partager des opinions. » Elle s’exprimait en marge d’une conférence de presse.