(Ottawa) Des vidéos filmées par la Sûreté du Québec ont été soumises en preuve au procès de Tamara Lich et de Chris Barber, qui s’est amorcé mardi. Les organisateurs du « convoi de la liberté » ont plaidé non coupable à une série d’accusations, dont celles de méfait et d’incitation à commettre des méfaits.

Les accusés ont été accueillis par une poignée de sympathisants peu bruyants à leur arrivée au palais de justice de la capitale fédérale. Un contraste avec les klaxons tonitruants qui avaient caractérisé les trois semaines de leur manifestation contre la vaccination obligatoire imposée aux camionneurs et d’autres mesures sanitaires pour limiter la propagation de la COVID-19 durant la pandémie.

« L’histoire est en train de s’écrire. Nos libertés sont en jeu », a affirmé un homme affublé d’un chapeau en papier d’aluminium, qui se fait surnommer en anglais Tin Foil Hat Guy. Il se tenait à l’extérieur du palais de justice, sous une chaleur accablante, comme il l’avait fait l’an dernier avant chacune des audiences de la Commission sur l’état d’urgence présidée par Paul Rouleau.

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Un sympathisant de Tamara Lich et de Chris Barber quitte le palais de justice après l’ouverture de leur procès à Ottawa, mardi.

« En ce moment, nous nous battons pour nos libertés. Durant le convoi de la liberté, c’était ça, la liberté, et nous avons été dénigrés, des gens ont été arrêtés et le processus judiciaire était excessivement long. Ça ne devrait pas être le cas. Ces gens n’ont toujours pas recouvré toute leur liberté », a ajouté l’homme, qui a refusé de nous donner son vrai nom.

Les conditions de libération de Tamara Lich, qui lui interdisaient de circuler au centre-ville d’Ottawa, ont été assouplies pour la durée du procès. Elle avait été incarcérée 49 jours en tout après avoir été appréhendée par la police en février 2022. Chris Barber avait été relâché le lendemain de son arrestation.

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Tamara Lich

Mme Lich et M. Barber faisaient partie du noyau qui aurait incité des milliers de camionneurs et de manifestants à paralyser le centre-ville d’Ottawa durant trois semaines, en janvier et février 2022. Tous deux affirment qu’ils avaient peu de contrôle sur les participants.

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Chris Barber

Confusion entourant la liste des témoins

La Couronne compte appeler à la barre 22 témoins, mais le maire Jim Watson n’est pas l’un d’eux, contrairement à ce qu’il avait affirmé aux médias à son arrivée au palais de justice d’Ottawa mardi. Il s’attendait à témoigner, mais la Couronne et la défense ont finalement confirmé qu’il ne faisait pas partie de la liste des témoins.

Le procureur de la Couronne, Tim Radcliffe, veut faire témoigner des membres de la haute direction de la police d’Ottawa, des policiers qui étaient responsables de la communication avec les manifestants et d’autres qui devaient faire respecter l’ordre public. Il appellera également à la barre de hauts responsables de la Ville d’Ottawa et du service de transports en commun OC Transpo, des résidants du centre-ville d’Ottawa et des employés de commerces du secteur.

Le procès se tient à la Cour de justice de l’Ontario et est présidé par la juge Heather Perkins-McVey. Il s’est ouvert mardi avec le témoignage d’un policier d’Ottawa nommé Craig Barlow à qui la Couronne avait demandé de préparer une compilation d’images vidéo du « convoi de la liberté » dans laquelle on entend des klaxons tonitruants et on voit certaines rues bloquées par des camions. Des extraits de vidéos filmées par la Sûreté du Québec lors de l’opération policière pour déloger les manifestants ont aussi été présentés en preuve.

« Les deux accusés exerçaient un contrôle sur le placement des véhicules », a fait valoir MRadcliffe. Il a ajouté qu’il ne demandait pas un « jugement sur leur objectif politique », mais plutôt sur les moyens entrepris pour l’atteindre qui ont « dépassé leur droit à la liberté d’expression ».

L’avocate de la défense, Diane Magas, qui représente Chris Barber, a fait valoir que la Couronne ne devrait pas utiliser le mot « occupation », qui est « incendiaire » et « inexact » pour décrire l’évènement. Tamara Lich est représentée par l’avocat vedette Lawrence Greenspon, qui a souligné que les accusés ont simplement exercé leur liberté d’association et leur liberté d’expression.

Tamara Lich et Chris Barber sont accusés de méfait, d’intimidation, d’entrave au travail de la police et d’incitation à commettre des méfaits. Leur procès doit s’échelonner sur 16 jours.

Face à l’inaction de la police, de la Ville d’Ottawa et du gouvernement de l’Ontario, le gouvernement fédéral avait fini par recourir pour la première fois de son histoire à la Loi sur les mesures d’urgence. S’en était suivi la plus grosse opération policière de l’histoire du pays pour mettre fin à la manifestation.

La commission Rouleau a conclu « à contrecœur » en février que le gouvernement de Justin Trudeau avait eu raison de recourir à cette mesure d’exception dans les circonstances.

Avec La Presse Canadienne