Le ministère public ne portera pas en appel la peine de prison à domicile imposée à Jonathan Gravel, coupable d’avoir pénétré une femme sans son consentement. Cette peine clémente, qui a eu des échos à l’Assemblée nationale, avait mis en lumière les conséquences méconnues d’une nouvelle loi du gouvernement Trudeau.

« Bien que la peine imposée par le tribunal à Jonathan Gravel ne soit pas celle que le poursuivant estimait appropriée dans le cadre de ses représentations, après une analyse rigoureuse de la décision rendue à la lumière des principes de droit applicables, le DPCP annonce qu’il ne peut la porter en appel », a expliqué à La Presse MAudrey Roy-Cloutier, procureure en chef adjointe par intérim au Directeur des poursuites criminelles et pénales (DPCP).

Après avoir étiré le processus judiciaire pendant des années, Jonathan Gravel a profité de la nouvelle loi C-5, adoptée en novembre dernier, pour éviter une peine de prison ferme. Jusqu’à l’adoption de cette loi, une personne condamnée pour agression sexuelle ne pouvait purger sa peine dans la collectivité. L’objectif de cette loi était de s’attaquer à « la surreprésentation des Canadiens autochtones, noirs ou marginalisés dans le système de justice pénale ».

À la fin janvier, le juge David Simon a condamné Jonathan Gravel à 20 mois de prison à purger chez lui en raison de sa réhabilitation et de son faible risque de récidive. Une décision qui avait suscité l’ire du procureur de la Couronne. Dans une sortie fracassante, MAlexis Dinelle avait blâmé le gouvernement Trudeau pour l’adoption de cette nouvelle loi.

« En ce moment, Justin Trudeau et [le ministre de la Justice du Canada] David Lametti ont probablement des comptes à rendre aux victimes d’agression sexuelle », avait pesté MDinelle.

Cette décision a provoqué des remous jusqu’à l’Assemblée nationale. Le ministre de la Justice du Québec Simon Jolin-Barrette a qualifié la loi C-5 de « recul dans la lutte contre les violences sexuelles ». À l’unanimité, l’Assemblée nationale a adopté une motion pour demander à Ottawa de modifier la loi pour mettre fin aux peines de prison dans la collectivité en matière d’agression sexuelle.

« Malgré cette décision de ne pas porter la cause en appel, le DPCP tient à réitérer qu’il va continuer à s’opposer à l’emprisonnement dans la collectivité et réclamer de l’incarcération ferme lorsque les circonstances le justifient, particulièrement dans les causes de violence sexuelle », précise la porte-parole du DPCP, en soulignant le « courage » de la victime.

Jonathan Gravel a pénétré sans avertissement une femme dans l’anus en 2014. Le Montréalais de 42 ans a continué malgré les cris de refus de la victime et les tentatives de celle-ci de se défaire de l’emprise en l’égratignant avec ses ongles. Jonathan Gravel disait avoir « senti » qu’elle y consentait et pensait de toute façon en « être rendu là » dans leur relation sexuelle.

« Les gestes sont graves. Le délinquant a voulu assouvir une pulsion sexuelle en ne se souciant aucunement de la victime ni de son refus non équivoque », avait conclu le juge David Simon.