La famille de Jean René Junior Olivier, abattu par des policiers à Repentigny en 2021, dénonce la récente décision du Directeur des poursuites criminelles et pénales (DPCP) de ne pas déposer d’accusations criminelles contre les policiers impliqués.

En plein Mois de l’histoire des Noirs, la famille de Jean René Junior Olivier a fait part vendredi de ses sentiments d’injustice, de tristesse, de grande déception et de manque de confiance envers la Ville de Repentigny.

Cette sortie publique fait suite à la décision la veille du DPCP de ne pas déposer d’accusations criminelles contre les policiers impliqués dans l’affaire. Le 1er août 2021, Jean René Junior Olivier, un homme noir de 38 ans, a été abattu par des policiers après que sa mère eut appelé les services d’urgence en raison de l’état d’instabilité psychologique de son fils.

« Je serai accablée pour toujours par la perte de mon fils », a affirmé la mère du défunt, Marie-Mireille Bence, dans un communiqué diffusé vendredi. « Personne ne sera jamais tenu responsable de la mort prématurée de mon enfant », dénonce-t-elle.

Perte de sentiment de confiance

La famille estime aussi que cette décision entache encore davantage le sentiment de confiance des personnes noires envers la Ville de Repentigny.

La prise de cette décision expressément pendant le Mois de l’histoire des Noirs est interprétée comme un message que la vie des Noirs n’est pas prise au sérieux au Québec.

Marie-Mireille Bence, mère de Jean René Junior Olivier

« Nous constatons que dans la majorité des cas où les personnes noires sont tuées par la police, il n’y a pas d’accusation portée contre les policiers impliqués, observe-t-elle aussi. Nous pensons qu’il est important de prendre des mesures pour s’assurer que les personnes noires et autochtones soient traitées équitablement par la police et que leurs droits soient respectés. »

Rappelons que les enjeux de profilage racial ont fait les manchettes à de nombreuses reprises à Repentigny dans les dernières années.

En 2020, un groupe de neuf jeunes noirs avaient reçu des constats d’infraction1 totalisant 11 500 $ pour avoir enfreint les mesures sanitaires sur un terrain de basketball. Le même soir, sur le même terrain, un groupe de jeunes blancs avaient reçu un avertissement.

L’année suivante, un rapport montrait que les personnes noires avaient près de trois fois plus de chances2 que les Blancs d’être interpellées par le Service de police de la Ville de Repentigny.

L’été dernier, un homme noir a gagné sa cause3 devant le Tribunal des droits de la personne pour avoir été victime de profilage après avoir été interpellé au volant d’un véhicule de luxe.

La notion de danger imminent

Concernant le dossier de la mort de M. Olivier, le DPCP a conclu jeudi que « l’intervention policière était légale et se fondait principalement sur le devoir imposé aux policiers d’assurer, dès les premiers instants jusqu’à la fin de la séquence de tirs, la sécurité des citoyens sous leur protection ainsi que leur propre sécurité ».

Mais selon Max Stanley Bazin, président de la Ligue des Noirs du Québec, « la notion de danger imminent est extrêmement variable selon la couleur de la peau ».

À son sens, la fin tragique de M. Olivier est liée aux questions de discrimination systémique et de profilage racial. « Il n’a pas échappé à la Ligue des Noirs du Québec qu’il y a une différence de traitement concernant les personnes en crise noires versus les personnes en crise blanches, a-t-il indiqué à La Presse par écrit.

Au Québec, ce n’est pas compliqué, si vous êtes Noir, vous n’avez pas le droit d’être en crise et malade, car si vous l’êtes votre vie est en danger, sauf si par chance le policier est accompagné d’une personne formée pour intervenir auprès des personnes ayant des troubles de santé mentale.

Max Stanley Bazin, président de la Ligue des Noirs du Québec

Selon l’organisme, le constat est clair : « Il y a deux poids, deux mesures au Québec, car le taux de survie des personnes de la majorité blanche en cas de crise est nettement supérieur à celui des personnes noires. »

1. Lisez « Profilage racial : la police de Repentigny montrée du doigt » 2. Lisez « Les Noirs interpellés trois fois plus que les Blancs » 3. Lisez « Victoire douce-amère pour le plaignant » Lisez « Aucune accusation ne sera portée contre les policiers qui ont tué Junior Olivier »