La contrôleuse financière d’un voyagiste montréalais s’en est mis plein les poches pendant des années. Pour cette fraude de 100 000 $, France Villeneuve risque de s’en tirer avec un an de prison à domicile. Une peine « bonbon », selon l’avocat des victimes, dont l’intervention surprise a fait dérailler l’audience.

Accusée en décembre 2020, la résidante de Saint-Donat âgée de 64 ans a finalement plaidé coupable mercredi matin au palais de justice de Montréal à un chef de fraude de plus de 5000 $.

France Villeneuve a été embauchée en 1996 pour s’occuper des finances de Géo Tours, un voyagiste montréalais spécialisé dans les groupes de touristes européens et les voyages terrestres à travers l’Amérique du Nord. Au fil des années, elle a gagné la confiance des propriétaires.

Dans une poursuite civile, elle est décrite comme « omniprésente » au sein de l’entreprise. Elle était d’ailleurs la seule à maîtriser entièrement le système informatique comptable.

Abusant de cette confiance, la fraudeuse a subtilisé 97 000 $ à son employeur entre 2012 et 2017. Comme c’est souvent le cas, c’est la remplaçante de Mme Villeneuve – partie en congé maladie – qui a découvert des « anomalies » dans certaines dépenses de sa prédécesseure.

Les faits présentés mercredi par la procureure de la Couronne MSandra Tremblay en révèlent toutefois peu sur le stratagème utilisé par France Villeneuve. Aux dires de la défense, l’accusée croyait avoir droit à ces sommes puisqu’elle travaillait davantage en l’absence des propriétaires.

La Couronne était capable de prouver hors de tout doute raisonnable une fraude de 97 000 $. Toutefois, la somme dérobée pourrait être bien plus élevée. Un audit comptable produit dans le cadre d’une poursuite civile conclut que France Villeneuve a encaissé 357 695 $ en sus de ses salaires normaux entre 2005 et 2017, en partie grâce à une deuxième « fiche employée » à son nom.

« Mme Villeneuve a signé les chèques ou autorisé les transferts bancaires. Les montants ont été déposés dans son compte personnel. Nous n’avons pas retracé les pièces justificatives supportant ces dépenses. À noter que ces montants n’ont pas été ajoutés aux revenus d’emploi de Mme Villeneuve », conclut l’auditeur dans son rapport.

Pour régler la poursuite à l’amiable, France Villeneuve a versé 107 000 $ à l’entreprise. Cette entente « confidentielle » a causé bien des remous mercredi. Dans une intervention extrêmement inusitée, l’avocat des propriétaires de Géo Tours a demandé à la juge Mairi Springate d’écarter la quittance civile de sa décision sur la peine en raison de l’entente de confidentialité.

« Si les avocats ont fait une suggestion bonbon, les victimes ont le droit de s’exprimer », a fait valoir MYacine Agnaou, l’avocat des victimes.

« Je m’objecte à ce que mon collègue vous adresse la parole », a lancé MMichel Massicotte, en sommant ensuite MAgnaou de se taire.

Visiblement embêtée, la juge Springate a reporté le débat en juillet prochain afin de déterminer si MAgnaou a le droit d’intervenir. Il faut savoir que le rôle de l’avocat des victimes est très encadré en matière criminelle.

La juge n’a donc pas entériné la suggestion commune présentée par la procureure de la Couronne et l’avocat de l’accusée. Il s’agit d’une peine d’un an de prison à domicile, assortie d’une probation. Pour justifier cette peine, MMassicotte a fait valoir l’absence d’antécédents judiciaires et les problèmes de santé de sa cliente.