Le nouveau chef de police, Fady Dagher, et la numéro 2 de l’administration municipale, Dominique Ollivier, ont défendu les actions récentes de la Ville de Montréal, jeudi, au procès d’une action collective de 170 millions liée au profilage racial.

Les deux hauts responsables ont reconnu que le profilage existait et ont insisté sur leur détermination à faire progresser les choses. Ils témoignaient à la demande de la Ligue des Noirs du Québec, qui pilote la poursuite, mais n’ont pas contesté leur convocation.

L’organisation tente de faire la preuve que Montréal ne prend pas les moyens nécessaires pour combattre la discrimination raciale par ses policiers.

« On est en mouvement. Il y a une prise de conscience et on se dit que c’est maintenant la chance de le régler [le problème] », a dit Mme Ollivier.

Mme Ollivier a dû répondre à de nombreuses questions de l’avocat de la Ligue des Noirs quant à un rapport de l’Office de consultation publique de Montréal (OCPM) de 2020, très critique à l’endroit du Service de police de la Ville de Montréal (SPVM).

« Ce qu’on voulait amener, c’est le sentiment d’urgence », a expliqué Mme Ollivier, précisant que « plusieurs des recommandations qui sont au sein de ce rapport ont été mises en œuvre ».

PHOTO DOMINICK GRAVEL, LA PRESSE

Le nouveau directeur du Service de police de la Ville de Montréal (SPVM), Fady Dagher, a témoigné jeudi devant la Cour supérieure.

M. Dagher, quant à lui, a décrit la lutte contre le profilage racial comme un « grand chantier avec beaucoup de résistance ». « C’est une problématique très insidieuse, très subtile, très sournoise et on ne se rend pas compte qu’on le fait », a-t-il affirmé. M. Dagher avait déjà admis publiquement avoir lui-même fait involontairement du profilage racial au cours de sa longue carrière policière.

Il a ajouté qu’il fallait guider les policiers afin de les convaincre de changer leurs pratiques parfois discriminatoires, notamment en leur donnant de meilleurs outils pour faire du profilage criminel plutôt que racial.

Crédibilité attaquée

Par ailleurs, en matinée, la Ville de Montréal a attaqué la crédibilité du jeune Noir qui est la personne désignée dans l’action collective.

Les avocats de la Ville ont tenté de mettre au jour des contradictions dans le témoignage d’Alexandre Lamontagne, arrêté après une altercation avec des policiers à la sortie des bars, rue Saint-Jacques, en août 2017. Il a reçu trois constats d’infraction liés à des incivilités, en plus d’être visé par des accusations criminelles finalement abandonnées.

MJean-Nicolas Loiselle, qui représente la Ville de Montréal, a mené un contre-interrogatoire serré. Pourquoi M. Lamontagne assure-t-il n’avoir jamais résisté à son arrestation, alors qu’il a déjà admis avoir forcé en sens contraire des policiers qui le menottaient ? Pourquoi affirme-t-il avoir déposé une plainte en déontologie, alors que c’est son avocat qui l’a fait ? Pourquoi relate-t-il être resté courtois, alors qu’il a précédemment avoué avoir traité les policiers d’« imbéciles » ?

« C’est une question de crédibilité », a indiqué MLoiselle à la juge Dominique Poulin lors de l’une des nombreuses objections de MMike Diomande, l’avocat de M. Lamontagne.

Ce dernier a été choisi pour représenter les milliers d’individus racisés qui ont été interpellés, possiblement sans motif, par le SPVM entre 2017 et 2019. La poursuite demande une indemnisation de 5000 $ pour chacun d’entre eux.