L’entrepreneur Lino Saputo affirme avoir mandaté ses avocats pour envoyer une mise en demeure à Radio-Canada à la suite de la diffusion d’un reportage qui révélait ses liens et ceux de son beau-frère avec la mafia.

Dans un communiqué diffusé mardi matin, l’homme le plus riche du Québec ne précise pas ce que ses avocats vont exiger dans leur mise en demeure et dans une éventuelle poursuite subséquente contre la société d’État. Mais il se plaint du contenu du reportage de l’émission Enquête qui « récupère des vieilles histoires et n’apporte aucun éclairage nouveau », selon lui.

« Désormais, je ne souhaite plus consacrer d’efforts et d’énergie à me justifier ou à commenter des propos faux et malveillants à mon endroit sur la place publique », dit-il, sans pointer d’erreur factuelle dans le reportage.

« Je suis une personne intègre et honnête et je l’ai toujours été. Je sais que je n’ai rien à me reprocher et que je ne me suis jamais associé au crime organisé », poursuit l’entrepreneur.

« Malheureusement, le contenu du reportage ne me laisse cependant d’autre choix que de m’en remettre à mes avocats. Ceux-ci verront à mettre en demeure les journalistes de l’émission Enquête ainsi que la Société Radio-Canada », ajoute-t-il, en incluant un lien vers le site web du cabinet Woods.

Violi, Cotroni, Bonanno et Côté

Le reportage diffusé jeudi dernier révélait que Lino Saputo a eu des liens pendant des années avec des membres du crime organisé, dont l’un des plus importants chefs de la mafia aux États-Unis, Joe Bonanno.

Les journalistes ont déterré des rapports de police datant des années 70 selon lesquels M. Saputo fréquentait les dirigeants de la mafia montréalaise de l’époque, Vic Cotroni et Paolo Violi, et les conseillaient sur la gestion de leur entreprise de pepperoni.

Le reportage présentait aussi des images du mariage de Donald Côté, criminel endurci de l’époque lié à Violi et Cotroni. M. Saputo était le témoin de Donald Côté à cette occasion et a pris place avec lui à la table d’honneur pour la réception.

Les journalistes ont aussi interviewé un policier américain à la retraite que montre à la caméra la documentation financière interne du Groupe Saputo saisie chez le chef mafieux Joe Bonanno.

L’anniversaire de mariage du parrain

Une attache saisie sur une liasse de 1000 $ pendant la surveillance de Bonanno avait permis aux policiers de remonter à une entreprise liée à Saputo. Le policier expliquait que les notes manuscrites saisies dans les poubelles de Bonanno faisaient référence à Lino Saputo et à l’entreprise, ainsi qu’à de l’argent liquide. Une lettre du beau-frère de Lino Saputo, Giuseppe Borsellino, avec papier à en-tête en français, a aussi été saisie chez Bonanno.

L’émission se termine par la présentation d’une vidéo inédite tournée lors du 50e anniversaire de mariage de Nicolo Rizzuto, grand chef de la mafia montréalaise, en 1995. On y voit Giuseppe Borsellino et sa conjointe Elina Saputo prendre la pose pour une photo avec le parrain, dans sa maison.

« Je peux affirmer sans gêne que je suis allé au bout de presque tous mes rêves. Le seul qui ne soit pas complètement concrétisé est de ne pas avoir pu, une fois pour toutes, tourner la page sur ces suspicions à mon égard », affirme M. Saputo dans son communiqué.