Les effets de la gratuité des transports en commun pour les 65 ans et plus commencent à se faire sentir à Montréal. En l’espace de six mois, la mesure a généré plus de dix millions de déplacements, en plus de faire bondir l’achalandage de 15 à 20 % dans cette tranche d’âge.

« Il faut vraiment que ça reste, cette mesure. Ça a beaucoup aidé les gens de mon âge, qui ont décidé de sortir un peu plus, de briser l’isolement. C’est vraiment une bonne idée qu’ils ont eue et ça doit se poursuivre », lance Denise Sauvé, une résidante de Villeray qui utilise régulièrement le métro.

La Montréalaise se dit d’ailleurs enthousiasmée par ces résultats préliminaires, qu’elle veut voir continuer d’augmenter. « Surtout pour les gens moins nantis, c’est certain que ça relance l’achalandage. Si on retirait ça en raison du contexte financier, c’est certain que les plus âgés vont tout simplement l’abandonner », juge Mme Sauvé, qui espère aussi éviter les coupes de service appréhendées dans le transport collectif. « On viendrait vraiment créer une autre impasse », dit-elle.

Dans un rapport rendu public récemment par la Ville de Montréal, on apprend qu’à la fin de 2023, environ 47 % de la population de 65 ans et plus avait souscrit à l’offre de gratuité dans le métro et les autobus. Dans la métropole seulement, cela représente plus de 166 000 aînés, sur un total d’environ 353 500.

Au bout du compte, la gratuité a ainsi généré « une hausse de 15 % à 20 % des déplacements en transport collectif pour cette tranche d’âge », lit-on dans le document, qui précise que 70 % des utilisateurs du transport adapté ont aussi 65 ans et plus.

À la Société de transport de Montréal (STM), le président Éric Alan Caldwell parle de « résultats formidables ». Selon lui, l’exploit derrière cette initiative aura été « de réussir à ajouter de la clientèle sans que ça coûte plus cher ». « Environ 74 % des déplacements dans cette tranche d’âge se font en dehors de la pointe et pour les 26 % qui restent, on compte sur la capacité résiduelle du métro. On n’a donc pas eu besoin d’augmenter les dépenses ni les coûts pour augmenter l’achalandage », dit-il.

40 millions par année

La gratuité du transport collectif pour les 65 ans et plus a été officiellement annoncée dans le dernier budget de la Ville de Montréal, en novembre dernier, mais il s’agit d’une promesse phare du parti de Valérie Plante depuis 2017, année où la mairesse a été portée au pouvoir pour la première fois.

Cette mesure coûte 40 millions annuellement à la Ville. Fait à noter, toutefois : comme cette nouvelle mesure incitative n’a été mise en place qu’au mois de juillet 2023, elle n’a coûté que 24 millions pour sa première année.

PHOTO HUGO-SÉBASTIEN AUBERT, ARCHIVES LA PRESSE

Le président de la STM, Éric Alan Caldwell

À l’instar de la mairesse Valérie Plante, le président de la STM estime que les critiques concernant la gratuité chez les aînés sont infondées, puisque cette dépense est liée à son budget et non au paiement versé à l’ARTM. « D’aucune façon ça n’affecte la contribution qu’on donne au déficit. Au contraire, comme notre contribution est basée sur le nombre de passagers, plus j’ai de personnes aînées qui rentrent dans le métro, plus je donne d’argent à l’ARTM », avait illustré Mme Plante en novembre dernier.

Oui, ça coûte de l’argent, mais la Ville de Montréal le paie en plus de sa contribution au transport collectif. C’est une mesure sociale que la Ville a décidé d’assumer.

Éric Alan Caldwell, président de la STM

L’ARTM, de son côté, précise par courriel que « pour la période allant du 1er juillet au 31 décembre 2023, la Ville de Montréal a versé un montant de 17,5 millions pour compenser les revenus tarifaires qui n’ont pas été payés par les usagers dans le cadre de la gratuité ».

Pour la suite, persiste Éric Alan Caldwell, « rien ne nous indique qu’il y aura une diminution de l’adhésion au programme de gratuité ». « Au contraire, on s’attend à ce que ça continue d’augmenter encore et encore », affirme celui qui est également conseiller municipal dans le district d’Hochelaga.

En mars 2023, soit tout juste quelques mois avant l’implantation de la gratuité pour les 65 ans et plus, une étude de l’Université McGill avait d’emblée révélé qu’environ quatre aînés sur dix utiliseraient « davantage » les transports en commun dans la métropole en raison de ce programme.

L’histoire jusqu’ici

3 octobre 2017 : Lors de sa première campagne pour obtenir la mairie de Montréal, Valérie Plante promet la gratuité des transports en commun pour les enfants et les personnes âgées.

1er juillet 2021 : Auparavant réservé aux 6 ans et moins, l’accès gratuit aux transports en commun montréalais est étendu à tous les enfants de 11 ans et moins.

1er juillet 2023 : L’accès aux transports en commun devient gratuit à Montréal pour les aînés de 65 ans et plus.