En raison des importants dommages causés par un incendie survenu il y a deux semaines, l’Institut national du sport (INS) du Québec, le centre sportif du Stade olympique et les étages locatifs de la Tour de Montréal seront fermés pour une période de quatre à six mois, a appris La Presse.

La fermeture a été confirmée en fin d’après-midi mercredi à une soixantaine de dirigeants, de responsables et d’intervenants liés à l’Institut national du sport du Québec, où des centaines d’athlètes se préparent pour les Jeux olympiques et paralympiques de Paris, l’été prochain.

Les 4000 membres et les autres milliers d’usagers du centre sportif devront également trouver un nouvel endroit pour courir, pédaler, soulever des poids, nager et bouger.

PHOTO DOMINICK GRAVEL, LA PRESSE

La tour du Stade

Les plus de 2000 employés de Desjardins et de SIGMA-RH qui occupent les étages locatifs de la Tour inaugurés en 2018 n’auront pas accès à leur lieu de travail pour au moins quatre mois. Ils se sont déjà mis en télétravail à temps plein, a fait savoir Chantal Corbeil, porte-parole principale médias chez Desjardins.

Cette mesure forcera par ailleurs le déplacement in extremis des Essais olympiques de natation, qui étaient prévus dans la piscine des Jeux de 1976, du 13 au 19 mai. Natation Québec, qui en avait obtenu l’organisation pour la première fois depuis 2012, travaille actuellement à une solution de rechange pour tenir l’évènement ailleurs dans la région de Montréal, avec l’appui de Natation Canada.

Le Parc olympique devait faire une mise au point sur la situation mardi, avant de simplement indiquer que les lieux seraient fermés « jusqu’à nouvel ordre ». La décision de fermer l’endroit pour une période de quatre à six mois a été communiquée dans la journée de mercredi.

L’incendie s’est déclaré à l’extérieur du côté sud-est de la tour du Stade (Tour de Montréal), dans la nuit du 20 au 21 mars. « Il a rapidement été maîtrisé, mais des fenêtres à proximité, qui donnent sur un gymnase de l’INS, ont explosé à cause de la chaleur », a expliqué Cédric Essiminy, conseiller en relations publiques du Parc olympique, mercredi soir. « La fumée est entrée dans le centre sportif et dans le système d’aération qui dessert toute la tour. C’est la suie qui a provoqué le gros des dommages en pénétrant dans les 16 étages de la tour, dont le centre sportif et l’INS. »

Incendie causé par « une action humaine »

L’opération de nettoyage a commencé dès le 21 mars. « On ne peut pas rouvrir tant que ce n’est pas décontaminé, nettoyé et que les tests de qualité de l’air ne nous permettent pas de nous assurer que nous offrons un environnement sécuritaire, a ajouté M. Essiminy. Depuis le sinistre, il y a environ 300 personnes qui travaillent à nettoyer, décontaminer et mesurer la qualité de l’air. »

Selon le Module des incendies criminels du Service de police de la Ville de Montréal (SPVM), à qui l’enquête a été confiée le jour même, le feu a été causé par « une action humaine ».

« Cependant, à ce stade-ci, il n’a pas été déterminé s’il s’agit d’un geste accidentel ou intentionnel, a indiqué Jean-Pierre Brabant, porte-parole du SPVM. C’est ce qu’on tentera de déterminer durant l’enquête qui est toujours en cours. »

Le brasier a pris naissance dans une zone qui abrite un « bassin-miroir », fermé durant l’hiver. Or, cet endroit est recouvert en partie d’un toit où des sans-abri vont se réfugier. Pour se réchauffer, l’un d’eux aurait allumé un feu qui se serait ensuite propagé dans de la fibre de verre contenue dans une structure, selon des informations obtenues par La Presse.

Les dommages causés seraient d’au moins quelques centaines de milliers de dollars. Des responsables ont réussi à inverser la poussée du système de ventilation, pour évacuer la fumée, sans quoi il y aurait eu plus de dégâts.

Une tuile avant les Jeux

Après avoir dû composer avec les contraintes de la pandémie avant les Jeux d’été de Tokyo et les Jeux d’hiver de Pékin, en 2021 et 2022, l’Institut national du sport du Québec doit encore réagir promptement à moins de 115 et 150 jours des Jeux olympiques et paralympiques de Paris.

« On est dans la dernière ligne droite », a résumé le directeur communication et marketing de l’INS, Jean Gosselin. « Dans certains cas, des qualifications restent à faire. C’est clair que c’est loin d’être le meilleur moment. Dès demain, on va commencer des rencontres individuelles pour chacun des sports pour bien analyser les impacts et les hypothèses de solution. L’idée est de s’approcher de la solution la plus optimale possible et de voir comment on peut les accompagner là-dedans. »

Les nageuses artistiques, des plongeurs, des boxeuses et des judokas, entre autres, subiront les contrecoups de la fermeture de l’INS.

Par mesure de prudence, l’organisation, qui accueille chaque jour de 250 à 350 athlètes pour de l’entraînement, des traitements et du suivi scientifique, avait déjà recommandé à ses pensionnaires de planifier leurs activités à l’extérieur au moins jusqu’à la fin d’avril. Quatre jours après l’incendie, sa clinique médicale a été redéployée en partie dans des locaux temporaires qui logeaient anciennement les employés du Parc olympique, à l’angle du boulevard Pie-IX et de l’avenue Pierre-De Coubertin.

« À ma connaissance, aucun athlète n’a manqué un rendez-vous depuis, a ajouté M. Gosselin. Là, on va se rééquiper davantage pour compléter nos équipements et être en mesure d’offrir une plus grande envergure de services. »

Sinon, les professionnels de l’INS se mettront « en mode voyage » pour accompagner les athlètes directement sur leurs nouveaux lieux d’entraînement, comme ils le font déjà lors des compétitions et des stages à l’extérieur.

Les judokas se trouvent un toit

En attendant le retour de ses meilleurs athlètes en tournée en Europe, Nicolas Gill travaille justement à trouver des solutions pour la cinquantaine de judokas qui s’entraînent normalement au dernier étage du dojo de Judo Canada à l’INS.

« On a pris des mesures temporaires », a indiqué le directeur général de la fédération canadienne, avant de se faire confirmer la durée de la fermeture. « Un mois, c’est une chose, six mois, c’en est une autre. »

Pour l’heure, sa troupe poursuit ses activités dans un dojo tout neuf du centre sportif IPPON, sur le chemin de la Côte-Sainte-Catherine. « C’est très adéquat, impeccable, mais c’est plus petit, a noté le double médaillé olympique. Ce n’était qu’un prêt d’un mois au départ. Là, six mois… C’est comme héberger un chum pour quelques semaines et finalement, il emménage chez vous ! »

Gill a eu l’occasion de retourner dans les locaux de l’INS à quelques reprises pour accompagner les experts en sinistre de la compagnie d’assurance de Judo Canada. Il y a vu de la suie partout. Considérant l’immensité du centre sportif, la période de la fermeture ne l’étonne pas outre mesure : « Nos tatamis sont gris et bleus. Là, ils sont tous de la même couleur ! »

Où se tiendront les Essais olympiques de natation ?

Natation Québec s’engage pour sa part dans une course contre la montre afin de trouver un endroit de remplacement pour tenir les Essais olympiques. La multiple championne mondiale Summer McIntosh, la septuple médaillée olympique Penny Oleksiak, la Québécoise Mary-Sophie Harvey et tous les meilleurs nageurs au pays devront obligatoirement y passer afin de se qualifier pour Paris.

« Tant la Ville que le gouvernement, que Natation Canada souhaitent que ça reste à Montréal », a indiqué Francis Ménard, directeur général de la fédération québécoise. « Il n’y a pas beaucoup d’options sur la table. »

Selon toute logique, Natation Québec vise le complexe sportif Claude-Robillard, seul endroit avec un bassin de 50 mètres de 10 couloirs accessible par le métro. Il manquerait tout de même un autre bassin standard pour l’échauffement, pour le dénagement et surtout pour l’entraînement pendant la compétition.

« Rien n’est encore ficelé », a souligné M. Ménard, à la recherche d’une piscine supplémentaire. Déjà, le Stade olympique, avec son bassin d’échauffement de seulement cinq couloirs, ne répondait pas aux critères de Natation Canada.

« Il est de notoriété publique qu’on n’a pas les installations adéquates au Québec pour présenter un évènement de cette envergure. »

Avec la collaboration de Daniel Renaud, La Presse

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Possible fermeture du centre sportif du Parc Olympique