La prolifération des nids-de-poule est plus que jamais un enjeu dans la métropole. Plus de 2300 trous dans la chaussée ont été répertoriés en janvier et en février, un sommet depuis 2019. La Ville affirme toutefois avoir déjà repris leur colmatage en raison des conditions météorologiques favorables.

Quelque 2328 signalements pour des nids-de-poule ont en effet été faits au 311 entre le 1er janvier et le 28 février dernier, montrent des données de l’administration municipale rendues publiques vendredi.

En 2023, ce chiffre était d’à peine 1412 durant la même période. L’année précédente, c’était 1776. Et en 2021, en pleine pandémie de COVID-19, un creux historique de 507 nids-de-poule avait été signalé. En 2020, on en avait enregistré 1788, alors qu’en 2019, on en avait compté 3669.

Montréal rappelle à ce sujet que le nombre de signalements ne reflète pas nécessairement le nombre de trous sur la chaussée, puisque plusieurs signalements peuvent avoir été faits pour un même nid-de-poule.

N’empêche, tout n’est pas noir. D’après le porte-parole administratif Hugo Bourgouin, 75,3 % du réseau artériel « a été jugé très bon, bon ou moyen lors de la dernière auscultation » de 2020, comparativement à 61,5 % deux années auparavant.

Si on exclut le « moyen », environ 54 % des artères sont en bon ou en très bon état. Il s’agit d’une hausse marquée par rapport à 2015, alors qu’à peine 21 % des artères obtenaient une telle cote. Cependant, comme le rapportait La Presse précédemment, les améliorations tardent davantage dans les rues locales. La proportion de ces rues en mauvais ou très mauvais état est passée de 30 % à 37 % entre 2010 et 2022.

Selon la responsable de l’eau, Maja Vodanovic, la situation serait attribuable au fait que les budgets locaux n’ont pas augmenté depuis les fusions, ce qui est nettement insuffisant avec les coûts d’aujourd’hui. « Juste à Lachine, on a 3,7 millions pour faire nos rues, entretenir nos bâtiments et nos parcs. C’est comme impossible. Ça n’a jamais été révisé et c’est nettement insuffisant », avait-elle dit.

841 millions d’ici 2033

« Nous ne ménageons aucun effort pour prévenir les nids-de-poule à long terme », assure néanmoins M. Bourgouin, qui rappelle que la Ville a prévu investir 841 millions dans les programmes de planage-revêtement, en vertu de son Programme décennal d’immobilisations (PDI) 2024-2033 déposé en novembre.

Depuis lundi dernier, des conditions météorologiques très favorables, sans neige, mais surtout au-dessus du point de congélation, ont permis la reprise du colmatage mécanisé à l’aide d’appareils Python 5000. Des opérations se déroulent actuellement « jour et nuit », assure Hugo Bourgouin.

Il précise que tout cela « s’ajoute au colmatage manuel fait par les équipes des arrondissements ». La Ville réitère son invitation aux citoyens à signaler les nids-de-poule en appelant au 311 ou en utilisant l’application Montréal Service aux citoyens. Celle-ci permet notamment la prise de photo, la géolocalisation et un suivi personnalisé auprès de la personne ayant fait le signalement.

Chez CAA-Québec, le porte-parole David Marcille déplore que les nids-de-poule coûtent de plus en plus cher aux automobilistes. « Depuis 2020, les coûts de réparation qui y sont liés ont augmenté d’environ 20 à 35 % selon ce qu’on calcule. La facture est donc vraiment refilée aux automobilistes », dit-il.

Le cœur du problème, ajoute M. Marcille, est que le Québec « est pris dans un cercle vicieux, avec des infrastructures vieilles de 40 ans en moyenne ». « On est en rattrapage après des années de négligence, donc on investit des sommes astronomiques en réparation, mais c’est de l’entretien préventif qu’il faudrait faire. »

Dans l’opposition, on condamne le « laisser aller de l’administration Plante qui a coupé plus de 100 millions de dollars dans son budget pour réparer les rues locales au cours des dernières années, alors que le coût des matériaux de construction a explosé ». « On sait que les épisodes de gel et de dégel sont plus fréquents et que ça engendre une hausse des nids-de-poule. Pourquoi le budget pour la réparation des rues locales n’a-t-il pas été bonifié en conséquence ? », s’interroge le chef d’Ensemble Montréal, Aref Salem.

En savoir plus
  • 20 milliards
    CAA-Québec estime qu’il faudrait dépenser dès maintenant 20 milliards pour remettre en état le réseau routier au Québec. Dans la prochaine décennie, les investissements au Plan québécois des infrastructures (PQI) sont de l’ordre de 31,5 milliards dans le réseau routier. Environ 77 % de cette somme ira au maintien et 23 % à la bonification des routes.