En plein ralentissement économique, la Ville de Montréal a présenté mercredi un budget de 7 milliards, en hausse de 3,5 % pour l’an prochain, financé par une augmentation moyenne de 227 $ des comptes de taxes résidentielles.

La taille de l’appareil municipal continue de croître et comptera 400 postes supplémentaires, alors que l’administration de Valérie Plante ne prévoit pas de compression importante des dépenses.

Selon la mairesse, équilibrer les finances de la Ville comportait des « défis » dans le contexte actuel. « Le budget qu’on vous présente aujourd’hui, il est responsable. C’est le mot qui me vient en tête », a dit Valérie Plante mercredi. « C’est un budget qui est stable, qui est connecté aux besoins des Montréalais et des Montréalais. »

« Tout coûte plus cher », a-t-elle ajouté, confiant que le budget avait été « difficile » à ficeler, mais constituait « le minimum requis pour faire rouler la machine ». « Montréal protège les services aux citoyens et garde le cap sur les investissements qui correspondent aux priorités de la population : l’habitation, le transport en commun et la lutte aux changements climatiques. »

C’est la présidente sortante du comité exécutif, Dominique Ollivier, qui devait présenter le budget de Montréal, mais elle a démissionné lundi, dans la foulée des révélations de Québecor sur ses dépenses à l’époque où elle était présidente de l’Office de consultation publique de Montréal (OCPM). C’est le maire de l’arrondissement du Sud-Ouest et nouveau responsable des finances, Benoit Dorais, qui a présenté le budget mercredi avec la mairesse Plante.

« On a dû faire des choix difficiles, a dit M. Dorais. On mise sur les besoins pressants de notre monde. »

Hausse de 4,9 % des taxes résidentielles

Le budget comprend des hausses moyennes de taxes de 4,9 % sur les immeubles résidentiels et de 4,6 % sur les immeubles commerciaux. Cela représente une facture supplémentaire de 161 $ pour une maison unifamiliale moyenne, de 133 $ pour un condo moyen et de 254 $ pour un plex moyen. Il s’agit d’un sommet depuis le budget de 2010 et la dernière crise économique.

En raison de la variation de la valeur des maisons et des taxes locales imposées par les arrondissements, l’impact sur les comptes de taxes n’est pas uniforme à travers l’île. Les propriétaires de Pierrefonds-Roxboro verront leur facture augmenter de 7,2 % en moyenne, contre 2,6 % dans Ville-Marie.

« Nous voulons éviter d’alourdir le poids financier supporté par les contribuables », a assuré Mme Plante. « C’est tough pour les Montréalais et les Montréalaises, on l’entend. » Elle a souligné que l’augmentation du budget est en deçà du taux d’inflation prévu pour 2023 par l’Institut de la statistique (ISQ) pour Montréal en août dernier, soit 5,2 %. Le taux d’inflation prévu pour la région métropolitaine par le Conference Board pour 2024 est plutôt de ​​2,5 %.

Le ralentissement du marché immobilier et des mises en chantier a fait mal aux finances de la Ville en 2023. Elle a notamment récolté 120 millions de moins que l’année précédente en droits de mutation. Les revenus tirés des amendes, notamment de stationnement, sont aussi substantiellement moins importants que prévu.

L’administration ne prévoit pas d’embellie marquée sur ce plan pour 2024.

Elle compte toutefois investir plus d’argent dans ses priorités, pour un total de 234,8 millions en dépenses supplémentaires l’an prochain. « Une hausse modeste et contenue », a assuré Valérie Plante.

Mépris pour les contribuables, selon l’opposition

L’opposition a tiré à boulets rouges sur le budget de l’administration, en parlant d’un exercice qui « méprise » les contribuables en raison de la hausse des taxes.

PHOTO DOMINICK GRAVEL, ARCHIVES LA PRESSE

Alan DeSousa

« Ils ne semblent pas comprendre la situation des Montréalais », a dénoncé le porte-parole de l’opposition en matière de finances, Alan DeSousa, qui est aussi le maire de l’arrondissement de Saint-Laurent. « Il y a de l’itinérance, il manque de logements abordables, des dépassements de coûts qu’on dénonce depuis longtemps et ils sont insensibles à ça. Ça serait le temps de se serrer la ceinture. En ce moment, les Montréalais ont de la misère à boucler leur budget. Comment pensez-vous qu’ils vont se sentir quand on va encore leur demander de payer plus ? Pensez-vous que cette administration aura une quelconque crédibilité ? »

La mairesse Plante s’est défendue d’être trop dépensière avec l’argent des contribuables. Elle a affirmé que tous les services municipaux menaient une « révision des programmes » afin de trouver des économies, incluant les organismes paramunicipaux comme l’OCPM, dans la tourmente en raison de dépenses exagérées.

Le budget prévoit notamment de nouveaux investissements en matière d’inspection par le Service de sécurité incendie (SIM), de sécurisation aux abords des écoles et de transition écologique.

L’administration souligne de nouvelles mesures pour améliorer la sécurité des piétons près de 33 écoles, des investissements de 702 millions pour les infrastructures de l’eau et 240 millions pour des « aménagements éponges » ayant pour but de limiter l’impact des pluies abondantes.

La police et les transports en commun coûteront cher

Comme chaque année, c’est la sécurité publique qui accapare la part du lion du budget municipal avec 18 % des dépenses.

Le Service de police de la Ville de Montréal (SPVM) a encore largement dépassé son budget 2023. Le conseil municipal lui avait accordé 788 millions, alors que ses dépenses devraient finalement s’élever à 830 millions. On blâme les heures supplémentaires effectuées par les policiers, en pleine pénurie d’effectifs, tout en assurant que l’embauche de nouveaux agents permettra de réduire ce type de dépenses en 2024.

Le budget de la sécurité publique pour 2024 est en hausse de 35,5 millions comparativement au budget 2023.

Parmi les autres postes budgétaires qui font gonfler les dépenses pour l’an prochain, on retrouve le ramassage et le traitement des matières résiduelles (en hausse de 25,3 millions), le financement de BIXI, notamment pour le vélo d’hiver (12,7 millions), le déneigement (11,4 millions) et la sécurité informatique (10,6 millions).

La Ville prévoit aussi que sa contribution au transport collectif sera de 715 millions, en hausse de 48,4 millions.

Du côté des arrondissements, les dépenses sont en hausse de 37,6 millions.

De nouveaux employés seront embauchés dans les secteurs jugés prioritaires par l’administration : police (107 postes), prévention des incendies (25), bureau de projet du prolongement de la ligne bleue du métro (19), sécurité informatique (12), sécurisation des piétons, notamment aux abords des écoles (9), brigadiers (9), inventaire des bâtiments patrimoniaux (8) et équipe mobile de médiation et intervention sociales (6).

La Ville précise qu’elle reçoit des fonds du gouvernement du Québec pour l’embauche de nouveaux policiers et que le bureau de projet de la ligne bleue est financé par l’Autorité régionale de transport de la métropole (ARTM).

Dans les arrondissements, 188 postes s’ajoutent pour répondre à divers besoins.

Au total, la Ville aura 491 employés de plus, mais 91 postes seront éliminés dans des secteurs jugés non prioritaires, pour un total de 400 postes supplémentaires.

Ce qu’il faut savoir

  • Montréal présente un budget de 7 milliards, en hausse de 3,5 %, soit 234,8 millions de dépenses supplémentaires comparativement à 2023.
  • L’augmentation moyenne des comptes de taxes résidentielles est de 227 $, soit 4,9 %.
  • La Ville ajoutera 400 postes, notamment 188 dans les arrondissements.
  • L’administration de Valérie Plante ne prévoit pas de compression importante des dépenses.