Un consensus se dégage pour le REM de l’Est, rebaptisé Projet structurant de l’Est (PSE). Le comité chargé par Québec et Montréal de revoir le projet recommande un tracé de Pointe-aux-Trembles au cégep Marie-Victorin, dans Montréal-Nord, avec deux points de connexion à la ligne verte, en plus d’un prolongement de quatre stations vers Rivière-des-Prairies, Laval et Charlemagne. Surtout, les experts plaident pour une voie souterraine « sur tout le parcours ». Facture finale : 36 milliards.

C’est ce qui ressort du rapport final sur le projet obtenu de diverses sources par La Presse. Le tracé de base demeure similaire, allant de Pointe-aux-Trembles au cégep Marie-Victorin. On y ajoute toutefois deux points d’entrée sur la ligne verte, soit aux stations Honoré-Beaugrand et Assomption. La capacité de la ligne verte du métro sera suffisante jusqu’en 2050, selon une évaluation de la Société de transport de Montréal (STM), qui s’attend à recevoir 4000 passagers de plus en heure de pointe, soit 10 % de surplus.

Le rapport retient aussi un prolongement de deux stations vers Rivière-des-Prairies, une à Laval et une à Charlemagne-Est, par la rue Sherbrooke.

INFOGRAPHIE LA PRESSE

Ajouter deux stations à Rivière-des-Prairies assurerait « un achalandage supplémentaire estimé de 3700 passagers en pointe du matin », selon le rapport, alors qu’une station supplémentaire à Saint-François-de-Laval depuis Rivière-des-Prairies « présente un accroissement additionnel d’environ 2000 passagers ». Le prolongement vers Charlemagne, enfin, générerait un achalandage supplémentaire de 4300 passagers.

Résultat : le projet ferait 34 km et l’achalandage, en pointe du matin, serait de 29 000 passagers. Le coût est évalué à presque 36 milliards de dollars, l’enfouissement de sept stations d’abord envisagées comme aériennes étant nécessaire. La facture initiale du comité était d’environ 17 milliards, mais a été gonflée par des hausses de coûts liées « à l’évolution de l’inflation, aux frais de financement et [aux] pertes fiscales », peut-on lire dans le document.

Québec exclut toutefois un éventuel prolongement, évoqué dans le passé, d’une station supplémentaire (pour un total de trois) vers Rivière-des-Prairies et un tracé qui passerait par l’autoroute 40. La liaison avec Mascouche est aussi écartée. On viserait plutôt de se rendre à Charlemagne.

« Les prolongements étudiés vers le boulevard Saint-Jean-Baptiste de Rivière-des-Prairies et Lachenaie, ainsi que les deux options de prolongement de l’antenne nord vers Terrebonne et Mascouche, sont peu performants en matière de mobilité et représentent des coûts très élevés […] compte tenu de la distance des tracés, respectivement estimés à 39,9 et 42,9 milliards de dollars », peut-on lire dans le rapport.

Quant à une optimisation du service sur la ligne exo5 Mascouche, aussi appelée le train de l’Est, le comité recommande de l’écarter en raison « des coûts substantiels anticipés et des gains d’achalandage limités ».

Souterrain sur tout le tracé

Autre fait saillant majeur du rapport : les experts de Québec et de Montréal jugent que l’implantation du train léger « devrait se faire en voie souterraine sur tout le parcours retenu », contrairement au reste du Réseau express métropolitain de CDPQ Infra, qui est en majeure partie au sol, mais aussi en aérien.

Un tracé aérien représenterait en effet de grands défis d’intégration en raison « des structures bétonnées de caractère industriel, et de leur gabarit élevé en comparaison du gabarit des immeubles adjacents », selon le comité. « En plus de l’impact visuel, il faut aussi ajouter les impacts sonores et vibratoires de ces infrastructures dans le milieu avoisinant et sur la qualité de vie des résidents », estime-t-il, citant « les enjeux techniques et les risques » à prendre en compte.

En souterrain, « le projet ne pose pas de défis techniques compte tenu de la qualité du roc en sous-sol », selon les experts, qui estiment que les passages sous la rivière des Prairies « ne présentent pas non plus de défis majeurs sur le plan technique ».

Au contraire, les « passages depuis la voie souterraine » à une structure aérienne, par exemple une station, nécessiterait « la construction de trémies de quelque 400 mètres de longueur », note-t-on. Les stations aériennes « atteindraient conséquemment une hauteur de plus de 20 mètres ». Cela poserait « plusieurs défis » dans Mercier-Ouest et Mercier-Est notamment, mais aussi dans la rue Sherbrooke Est, soutiennent les spécialistes.

Toujours rien au centre-ville

Depuis le retrait de CDPQ Infra du projet, en mai 2022, c’est un comité piloté par Québec et Montréal qui avait repris le flambeau. Dès le départ, vu le manque d’acceptabilité sociale en raison de la structure aérienne, la connexion avec le centre-ville avait toutefois été exclue.

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Le tracé consensuel ne prévoit toujours aucune connexion avec le centre-ville, même en souterrain. Les ministres Geneviève Guilbault et Pierre Fitzgibbon ont toutefois prévenu dans les derniers mois que le lien avec le cœur de la métropole pourrait être envisagé à l’avenir, mais pas dans l’immédiat.

Dans son premier rapport intérimaire, paru en janvier, le comité piloté par Québec et Montréal avait rendu publics plusieurs scénarios d’extensions potentielles du REM de l’Est. Parmi eux : un prolongement à Rivière-des-Prairies et jusqu’à Mascouche, un autre entre Laval et Mascouche par l’A25, et un dernier à Laval en passant par Rivière-des-Prairies, pour ensuite aller jusqu’à Mascouche.

L’essentiel de ce premier rapport est donc écarté pour le moment, ce qui risque de décevoir à court terme les cinq maires de municipalités du nord-est de Montréal qui avaient proposé en mai d’« unifier » tous les prolongements du premier rapport, en réclamant la garantie d’un prolongement du REM de l’Est à l’extérieur de l’île de Montréal, afin qu’il se rende jusqu’à Mascouche et Repentigny.

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En se voulant rassurante, la Ville de Montréal précise toutefois dans une déclaration envoyée à La Presse que « le prolongement vers les couronnes sera évalué en vue de phases ultérieures du projet ».