Québec serre la vis aux « taxis illégaux » de plus en plus nombreux à l’aéroport Montréal-Trudeau. Des amendes allant jusqu’à 50 000 $ seront dorénavant données aux chauffeurs non autorisés. Aéroports de Montréal (ADM), de son côté, devra tenir un « registre des autorisations délivrées » en plus d’augmenter le nombre d’inspecteurs.

Ce qu’il faut savoir

  • La Presse avait révélé en mars que près de 400 infractions avaient été répertoriées à l’aéroport Montréal-Trudeau depuis janvier.
  • Tout chauffeur de taxi non autorisé faisant de la sollicitation illégale s’exposera dorénavant à des amendes allant jusqu’à 50 000 $.
  • Aéroports de Montréal augmentera pendant ce temps le nombre d’inspecteurs pour suivre le phénomène.

La ministre des Transports, Geneviève Guilbault, annoncera jeudi diverses « modifications » à la Loi concernant le transport rémunéré de personnes par automobile.

Objectif : interdire « d’adopter tout comportement susceptible d’importuner ou d’intimider l’individu sollicité » par une personne souhaitant lui offrir un transport rémunéré. Il sera notamment sanctionnable de « toucher la personne ou ses biens », voire la solliciter « d’une façon persistante malgré son refus », la suivre, la gêner dans ses déplacements, ou encore la menacer et l’injurier.

En mars, La Presse avait révélé que près de 400 infractions avaient été répertoriées à l’aéroport Montréal-Trudeau depuis janvier, et ce, seulement pour la présence de ces « taxis illégaux », dont les chauffeurs sont parfois harcelants, ou encore cherchent à frauder l’usager en augmentant le prix de façon arbitraire. En 2022, 660 évènements du genre avaient été signalés.

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Préoccupée, la ministre des Transports, Geneviève Guilbault, avait alors amorcé des discussions avec ADM, à l’issue desquelles des solutions potentielles avaient été trouvées pour « rétablir l’ordre » à l’aéroport. Un retour rapide sur la situation avait alors été promis.

Des amendes très salées

À partir de maintenant, la loi imposera aux responsables – dans ce cas-ci Aéroports de Montréal – la tenue d’un « registre des autorisations délivrées » aux différents opérateurs, à savoir principalement les taxis et les véhicules Uber. Seuls les chauffeurs dûment « autorisés » pourront être en activité, sous peine de lourdes sanctions.

Tout contrevenant s’exposera en effet « à des amendes allant jusqu’à 50 000 $ en ce qui concerne la sollicitation, et jusqu’à 10 000 $ pour les chauffeurs sans autorisation dans les lieux où elle est requise », indique le cabinet de la ministre.

« Dans le cas où une chauffeuse ou un chauffeur n’est pas en possession de l’autorisation qui lui a été délivrée, elle ou il s’expose à une amende de 250 $ à 750 $ », ajoute-t-on.

La modification législative adoptée ce jeudi par Mme Guilbault accorde aussi une « nouvelle habilitation à la ministre des Transports ». Celle-ci pourra désormais « désigner » lorsque nécessaire « des lieux où une autorisation du responsable du lieu est requise pour offrir des courses ». Autrement dit, d’autres points chauds où les résidants et touristes sollicitent les taxis et les Uber pourraient être ciblés dans un deuxième temps, mais seul l’aéroport est considéré comme « balisé » pour le moment.

Plus d’inspecteurs en place

À Aéroports de Montréal, on assure avoir déjà « augmenté le nombre d’agents de sécurité dans les secteurs visés par les taxis illégaux » dans les dernières semaines. « Une fois les modifications législatives et réglementaires adoptées, nous nous assurerons de la présence des agents et inspecteurs nécessaires pour assurer le respect de la réglementation », assure le porte-parole, Eric Forest.

« Il faut aussi considérer que les montants élevés des amendes […] devraient avoir un effet très dissuasif sur ces pratiques », insiste M. Forest, qui rappelle au passage « qu’avant l’abrogation de la loi sur le taxi, cette problématique était quasi inexistante à YUL ».

Le tout survient en effet trois ans après que Québec eut adopté en 2019 la Loi concernant le transport rémunéré de personnes par automobile, qui est encore aujourd’hui loin de faire l’unanimité dans l’industrie du taxi. La nouvelle loi a aussi entraîné, en décembre, la disparition du Bureau du taxi de la Ville de Montréal.

PHOTO DENIS GERMAIN, ARCHIVES COLLABORATION SPÉCIALE

Véhicules à l’aéroport Montréal-Trudeau

« Avant, on savait combien de personnes avaient un permis à Montréal. C’était légiféré, c’était clair. Là, il n’y a même plus réellement d’inventaire. N’importe qui peut devenir chauffeur autorisé », avait d’ailleurs déploré en mars le directeur général de Taxi Coop, Jean Fortier, lors d’une entrevue.

ADM rappelle toutefois que le projet de loi devra être officiellement « adopté » à l’Assemblée nationale avant de pouvoir implanter les changements. « Nous avons bon espoir que ces mesures seront en vigueur juste à temps pour la saison estivale », avance M. Forest.

La porte-parole de Tourisme Montréal, Aurélie de Blois, salue quant à elle ces nouvelles mesures « qui vont assurément prouver leur efficacité dans les prochaines semaines », tant pour les Montréalais que pour les touristes. « Avec des sanctions allant jusqu’à 50 000 $ et une surveillance accrue, on devrait voir tout ça être respecté rapidement. Ça va changer la donne. On n’est pas un Far West », conclut-elle.